Uhmlaba

Uhmlaba : Planète pivot de la première vague de colonisation durant l'exode.
Population : huit millions d'habitants environ. Durée du jour : trente-six heures standard. Durée de la nuit : vingt-deux heures standard. Planète au climat chaud, parfois soumise à de violentes tempêtes. Le gros de la population vit sur les terres émergées, mais beaucoup vivent en marge sur des embarcations ou des villages en mer. Uhmlaba dispose de deux villes principales localisées à huit mille kilomètres l'une de l'autre : la ville d'Alphacity est localisée sur Aanga, l'unique continent. Nughana, la seconde, est une plate-forme habitable du Sélénium qui engrange pour le reste de la galaxie une quantité astronomique de fruits de mer.  




Le vent est chaud. Miao est à l'ombre, sous un morceau de toile plastique empalé sur un énorme bout de métal saillant qui la protège du soleil. Tout son corps la tire de l'intérieur  chaque tentative de mouvement. Ses yeux ont du mal à se faire à la lumière extérieure. Et elle a faim. C'est cette faim qui la pousse à s'asseoir. Avant que ses yeux ne soient habitués à la luminosité, son flair a déjà capté l'odeur du poisson frais qui repose près d'elle. Il remue encore légèrement. Il a dû être posé là récemment. A cause de l'inclinaison du sol, l'animal n'avait que peu de chances de pouvoir s'éloigner sans glisser de nouveau auprès d'elle.

Dans un coin, plus sur la gauche, des tas de vêtements sentant fort l'iode reposent en vrac. Elle se rend compte qu'elle est nue. Mais quelqu'un a déposé un drap à moitié brulé sur elle.

C'est à ce moment-là que des bruits de griffes sur le métal lui indiquent le retour de Jake.

Woof.

Ses souvenirs sont encore confus, aussi c'est la faim qui parle en premier. Elle attrape le poisson et mord dedans à pleines dents, tout en grattant la tête de Jake pour le remercier. Qu'est-ce qu'elle fait là exactement ? Elle ne reconnaît pas l'endroit. Elle se rappelle être arrivée sur la station avec le cirque... Et oui, ce chien, c'est Jake. Il appartient à un garçon... Finn, c'est ça ? Oui, c'est ça !

Salut Jake. Et encore merci pour le poisson, dit-elle en avalant goulument la dernière bouchée avant de jeter la tête.

Tu sais où est ton maître ? demande Mia au chien.

Wooooooooooooooo.....

Il... Tu veux dire que...

Le crash ! Ça y est, elle se souvient. Elle était sur la station, il y a eu une explosion, et... ils sont tombés sur la planète ! Alors, ça veut dire... Que tout le monde est mort, forcément. Personne n'a pu survivre.

Les larmes lui montent aux yeux tandis qu'elle serre Jake dans ses bras. Là-bas, il n'y avait presque que des gens qu'elle détestait, qui lui faisaient peur, et pourtant... Et elle commence à se demander : Est-ce qu'elle aussi est morte ?

Atridès, lui, est réveillé depuis des jours. Il semble que le chien les ait sortis de l'eau et rassemblés, mais la fille-chat ayant mis du temps à se remettre, le théopolien avait décidé de la laisser au chien. Tous les jours, Atridès découvre une nouvelle chose sur ce monceau de gravats de métal.

Ses journées ont d'abord été consacrées à la survie, et il a réussi à pêcher et à trouver des réserves de nourriture non-infiltrées d'eau. Mais aujourd'hui, il réalise qu'au loin, des embarcations se dirigent vers eux. Ce soir, ils auront de la compagnie.

Mais il ne sait pas encore quoi en penser.

Bon... La pêche a encore était bonne aujourd'hui, et avec la pluie de cette nuit, les collecteurs d'eau que j'ai bidouillé doivent être pleins.

Allons voir si la gamine va mieux. Il repart donc vers l'abri de fortune qu'il a fabriqué, avec un gros poisson encore fiché dans son harpon "fait-maison".

D'après ce qu'Atridès avait pu voir de la station, elle comportait une douzaine de portes d'amarrage principales et des centaines de plus petites pour les vaisseaux de diverses tailles. Certains ponts d'amarrage flottent ici et là autour dans la "mer de débris" qui les entoure. C'est tout ce qui les protège des animaux de grande taille.

Le théopolien est assez sûr que la station s'est écrasée sur un point élevé dans l'océan, comme une sorte de pointe de montagne engloutie. Ca leur procure beaucoup de poisson, mais de petite taille. Le coin semble riche en pieuvres, en tous cas.  

Il a été utile de trouver un point d'accès à l'intérieur du bâtiment : Atridès y a croisé maints cadavres, et a pu ramasser toutes sortes d'objets de science dont l'utilité est parfois dûre à déterminer. Et un bon couteau, dur comme l'acier mais effilé comme une lame de rasoir. Ainsi que quelques boissons alcoolisées et des boites de conserve que le chien avait insisté pour emmener.

Il arrive devant ce dernier, couché devant mia qui termine un poisson ... cru !

Mmmm... Chalut, fait Mia en avalant la queue de son second poisson.

Puis elle réalise qu'elle est toute nue et ramène craintivement le morceau de toile brûlée sur elle.

T'aurais pu attendre que je rallume le feu pour le faire cuire, quand même... On n'a pas beaucoup de combustible, et vu que tu étais inconsciente, c'était pas prudent, j'ai préféré l'éteindre.

Ça va mieux ? Bois un peu d'eau... Et ce poisson-là, on lève les filets, on retire la tête et la queue, puis on le fait flamber au... Il lit péniblement l'étiquette de la bouteille. ... "Cognac". On verra bien ce que ça donne...

Si tu veux, mais j'ai l'habitude de manger cru. Ou des restes. C'est pas grave.

Heu... Atridès ? Où est-ce qu'on est, là ? On ne devrait pas être... tu sais... morts ?


Bah, on est sur la planète avec les océans... Celle qui était sous la station, derrière le "vide". La planète "Houlala", je crois. La station est tombée dans la mer, et voilà.
On a eu de la chance, c'est un "haut-fond".

Et t'inquiète pas, on est morts. Comme tous les autres, même Joie. C'est triste, je l'aimais bien.

Ça arrive...

Mais moi, je reviens toujours à la vie, donc c'est normal. C'est ma quatrième ou cinquième fois, tu sais ?

Toi, eh bien je savais que tu étais un Esprit, bien sûr, mais je ne savais pas que tu étais aussi une demi-Déesse. C'est bien, ça me fait de la compagnie !

Par contre, le chien... Je ne savais pas qu'il y avait des chiens demi-Dieux ! Mais en fait, c'est logique. , dit-il d'un ton sûr de lui.

Évidement, il commence à faire la cuisine. Rallumer le feu, mettre une plaque de métal (qu'il a déformé pour en faire une poêle) sur le trépied de fortune, vider le poisson...

Mia le regarde faire avec un air mi-figue, mi-raisin. Un esprit, et maintenant une demi-déesse ? Et le chien aussi ? Ce type a l'air gentil, mais... Il est complètement fou ! Il vaudrait peut-être mieux ne pas le contrarier.
Et puis l'odeur du poisson grillé la met en appétit, et elle préférerait qu'il ne la prive pas de repas, alors elle sourit en attendant sagement qu'il ait fini de cuisiner.

Heu... Pardon, mais... Tu n'aurais pas trouvé quelque chose comme... des vêtements ? finit-elle par oser demander timidement.

Pourvu qu'il ne l'oblige pas à rester toute nue. Elle détestait quand Trévelian la forçait à le faire.

Humm ? Ah, si, bien sûr. J'ai mis tes vêtements à sécher, la-bas. Je n'allais pas te laisser dormir toute mouillée, quand même. Ils sont en sale état, mais on t'en empruntera des neufs quand on trouvera un village.

Le "Cognac" dans la poêle, on laisse chauffer un peu, et on approche une braise !

Voilààààà... Avec des aromates, ça aurait été plus sympa. Bon, sinon, on est au milieu de l'océan, donc les nouveaux chitons, c'est pas pour tout de suite, mais il y a des gens qui arrivent en bateau. Ils seront là pour le coucher du soleil !

Le chien lêche le visage de la jeune fille, puis va se poser dans un souffle des narines, la tête sur les pattes avant, la truffe devant le feu. Il est midi et le soleil est à son zénith, le vent est absent, les nuages épars. Sans récupérer autre chose que des poissons, Atridès estime pouvoir tenir des mois. Mais soudain, Mia et Jake relèvent la tête en dressant leurs oreilles : un bruit particulier ; de l'autre côté de leur satellite, une chose a heurté la coque, puis des pas ont commencé à résonner sur le céramet. C'est à plusieurs centaines de mètres.

Hé, ça y est, il y a des gens qui approchent. Ils ont débarqué. Qu'est-ce qu'on fait ?

Grrrrr....

Il faut procéder dans l'ordre. On a encore un peu de temps avant qu'ils arrivent, j'imagine ?

Oui, tu as raison, Jake : déjà, ne pas gâcher le poisson. Ils sont capables de le manger à notre place. Bon appétit ! , annonce Atridès en tendant un filet à Miao sur une plus petite plaque de métal, froide celle-là, et les restes aux chien.
Lui-même se sert et continue la conversation la bouche pleine.

Enchui'te, trouver une raison pou être en vie. Ch'inon, ça va encore attirer les prêtres, ils vont encore nous coller, ça va être chiant. Tu sais comment on aurait pu survivre ? J'y connais rien en navire de l'espace.

Et puis on va les voir !

Ben... Y'a les capchules de chauvetage, articule Mia en mastiquant. On aurait pu ch'échapper comme cha.

Parfait ! On dira ça ! Si vous avez fini, on emballe nos affaires... Et aussi tous les trucs technologiques que j'ai trouvé, ça pourrait faire monnaie d'échange...  Puis on va voir ceux qui arrivent.
Je propose qu'un seul y aille et que les deux autres restent en retrait, au cas où.
Qui pour négocier avec eux ? Ça ne te dérange pas que ce soit moi ou Miao qui nous en chargeons, Jake ?

Wof.

Maintenant qu'elle a trouvé de quoi se vêtir, Mia fait l'inventaire de ce qu'il a trouvé : deux créditubes, un phaser-coup de poing, assez en vogue en ce moment. Ca ressemble à une sorte d'anneau avec une poignée. un ventilateur, ça peut servir. une map de la station. Et une sorte de vieux modèle de compact-disc en métal.

Il demande au chien si il veut parlementer ? Il est encore plus fou que je ne croyais.

Et... heu... Ce n'est jamais moi qui négocie, d'habitude. Je ne sais pas si je saurais. Il vaudrais mieux que ce soit toi. Enfin... D'accord ? dit-elle en essayant de na pas le contrarier.

Comme tu veux ! De toute façon, je suis bon en négociations. Le truc, c'est de savoir ce qu'ils veulent, ce que tu veux, discuter, et à la fin avoir ce que tu veux plutôt que ce que eux ils veulent. Pas compliqué.

Vous m'indiquez d'où ils viennent ?

Par là, fait Mia en tendant le doigt.

Atridès suit la direction, et Jake lui emboîte le pas. Ils gravissent les débris d'un vaisseau fusionné à la coque par la chûte, et se retrouvent en hauteur. De là, ils peuvent voir un homme gravir les débris de son côté. Alors qu'il cherche des points d'appui pour monter, il croise leur regard, et part d'un sourire montrant toutes ses grandes dents blanches.

Hey ! Ca va ?

Ça va ! Vous êtes les secours ?

Si vous en avez besoin, oui, je peux être les secours. Je suis le premier arrivé, ça me qualifie. Je suis bien le premier arrivé ?

Oui, tu es le premier arrivé ! Les autres, du côté nord, ne devraient arriver qu'au couchant. Tu veux bien m'emmener, moi et les autres survivants vers un village ?


Vous êtes combien ?

Deux, plus moi.

Allez, venez. Mais dépêchez-vous, parce que d'après les relais radio, ce sont les ravageurs qui vous arrivent dessus. Et ils vous prendont pour la concurrence. Et ils éliminent la concurrence.

Je suis Tom Meenie. Ma femme Lucy fait la meilleure soupe de mer de toute la planète. Allez chercher vos amis, mais faîtes vite. Je vous attendrai là-bas.



Il montre du doigt son embarcation, qu'il a amarrée en contrebas. Une sorte de catamaran basé sur deux boudins gonflables avec un poste de commandes au centre, et deux petits véhicules indépendants accrochés à l'arrière. Il dispose de moteurs et d'une voile, mais sera tout juste apte à les porter tous les quatre.

Mia, qui a suivi la scène de loin sans se faire voir, commence à rassembler leurs maigres possessions.

Sifflement vers ses compagnons d'infortune, un bras levé pour leur dire d'approcher.

Bon, c'est tranquille ! Parfait... C'est rare, en fait...

Mia arrive, les bras chargés et Jake sur ses talons. Elle reste forcément un peu méfiante, mais salue tout de même l'homme.

Bonjour.


Salut gamine. Vous savez, en échange du voyage, je veux bien que vous me racontiez comment vous vous êtes retrouvés là.

le gaillard se met alors à pousser le catamaran de sa rame, et très vite, cale sa voile pour prendre le peu de vent disponible.  Elle se gonfle légèrement, puis il activé une soufflerie silencieuse qui les garde au frais tout en faisant avancer le bateau.

Heu...

Mia, qui non seulement n'a pas l'habitude d'être le porte-parole, mais qui en général n'avait tout simplement pas le droit de parler sauf si on l'y autorisait, se tasse sur elle-même et se tourne vers Atridès, n'osant ouvrir la bouche.

Ce dernier soupire.

On n'a pas vraiment bougé, en fait. On était dans ce truc de métal, mais dans l'espace. Il y a dû avoir un problème, et la station est tombée.
Mais comme on s'est réfugiés dans les... Les capsules de sauvetage, on a eu de la chance. C'est ça, Mia, j'ai rien oublié ?

On est tombés loin d'un village ? Et c'est qui, les ravageurs ?

Les ravageurs, mon jeune ami, ce sont les rebelles et les bandits d'Uhmlaba. Ils sont revenus à un mode de vie viking, même si la plupart n'en ont jamais entendu parler.

...

C'étaient des barbares en bateau qui allaient d'île en île et pillaient tout. Viols, meurtres et vols. Ils ont un quartier général,  mais personne ne sait où. D'après les news, ils se sont attaqués au Sélénium avant hier. C'est pour ça que vous n'avez pas eu de secours. Ils les empêchent de passer.

Mia n'a pas tout compris, mais elle a tout de même saisi que ces "ravageurs" étaient une menace, aussi elle commence à jeter des regards inquiets vers le nord.

Ah. D'accord.

Et vous nous emmenez où, là ?

Manger les meilleurs plats de la galaxie : ceux de ma femme. Quand on a faim, ils prennent une dimension incroyable.

Et vos parents... ils étaient dans la station ?

Pas les miens, en tout cas. Je n'en ai pas... Peut-être les tiens, Mia ?

Et merci d'avance pour l'invitation, Tom !

Mes parents, non. C'étaient mes maîtres.

Sans bien savoir pourquoi, Mia est triste en repensant à Astley. Il n'a jamais montré d'affection pour elle, et pourtant, quand elle a été en danger, il est venu la récupérer.

Eh bien alors, vous n'avez rien perdu. C'est bien, ça. J'avais peur que l'ambiance soit irrémédiablement fichue !

Le seul qui regarde effectivement derrière eux, c'est Jake. Le pauvre piaille à l'occasion, réalisant que le corps de son maître reste quelque part là-dedans.

C'est bien, que vous ayez du poisson, ça veut dire que vous pourrez participer à la pêche... quand vous aurez pris un peu de repos, bien sur !

Pas de problèmes ! Je suis pas mauvais pour pêcher, dit-il en grattouillant la tête de Jake, puisque ses gémissement lui font mal au cœur. Et puis il voit l'air de la fille-chat et ajoute à leur attention :
Bon, je sais que c'est pas facile pour vous, il y avait des gens que vous aimiez bien... Moi aussi.
Mais au moins, on est en meilleure situation qu'avant l'accident sur la station, non ?

Oui oui, bien sûr, répond hâtivement Mia qui reste sur l'idée qu'il ne vaut mieux pas contrarier les gens qui n'ont pas toute leur tête. Surtout ceux qui ont aussi beaucoup de muscles.

Alors petite, tu es une mutante ? Il y a quelque chose que je devrais savoir ? C'est ton ami, ce garçon, n'est ce pas ?

Une mutante, oui... Je crois. Et oui, c'est... un ami.

Cela fait tout drôle à Mia de prononcer ces mots. C'est la première fois qu'elle dit ça de quelqu'un, en fait. Du coup, elle n'est pas vraiment sûre de ce qu'est vraiment un "ami", mais Atridès a été gentil avec elle et l'a aidée, plusieurs fois, sans rien lui demander en échange. Alors même si il n'est pas tout à fait sain d'esprit, peut-être que c'est un ami, en effet.


Ouais. J'imagine que vous êtes probablement perturbés par tout ça. On remettra les questions à plus tard, ça m'a l'air mieux.

Visiblement à moitié rassuré par ce qu'il a pu constater, Tom se met à naviguer, d'après ce que peut en voir Atridès, vers le nord. Il leur faut bien deux heures avant d'arriver en vue d'une terre, bien qu'elle soit un peu décevante par la taille : L’ile doit faire un kilomètre carré, pas bien plus. Dessus siègent des murailles de bois local, des tas de métal, et l'ambiance n'est guère chaleureuse.

Une légère fumée grise monte du centre du fortin, et Mia peut voir Tom activer un communicateur codé pour signaler son arrivée. Moins d'une minute plus tard, une  large portion de mur commence à coulisser vers la droite. Le catamaran s'y engage.

A l'intérieur du fortin, quelques chiens vivent à côté du petit ponton d'amarrage qui comporte actuellement sept autres bateaux de types variables. Le plus imposant doit faire dans les dix mètres et est probablement réservé à de gros transports.

Une femme noire au tablier de cuisine découvre de larges dents à leur arrivée :

Ha ! Tu pars Chercher du métal, et tu reviens avec des enfants ? Je t'ai déjà dit que j'étais désolée, Tommypiou !

Femme ! Arrête de m'appeler comme ça devant les enfants ! Hahaha !

Désolée, les enfants, on est restés de grands enfants, surtout lui ! Venez, comme je le connais, il a fait de la publicité pour la nourriture locale, hein ?

Ah ça oui ! Il nous a parlé d'une soupe de fruits de mer qui est la meilleure de la planète, parait-il !

Atridès est conquis par l'accueil. D'un autre côté, il n'a jamais été trop difficile sur ce point... Par contre, le naturel revenant au galop, il observe les murailles de l'intérieur. Ça a l'air vraiment... léger, pour lui qui est habitué aux murs de granit de six mètres de haut. Et pourtant quand on s'embête a construire un bastion, surtout sur une île de cette taille, c'est que c'est nécessaire. Sûrement pour ces ravageurs.

Il examine aussi ce qui tient lieu d'armes de siège : catapultes, balistes, etc. Mais rien de tel. Une sorte de tourelle posée sur de vieux tubes de métal semble pouvoir s'élever ; elle est équipée d'un appareil métallique avec une chaise à l'arrière, et des douilles de métal en sortent par le côté. Un système ingénieux pour recharger, probablement. Au sol, près de la base de l'objet, se trouvent d'autres genres de canons, posés négligemment à terre, de diamètres assez impressionnants, mais nulle part il ne voit leurs munitions.

Mia, elle, est plus intéressée par les habitants... Et on a parlé de nourriture, ce qui est probablement encore plus important ! Mais son odorat a déjà repéré tout ça : il n'y a que deux personnes ici, et elle les a en vue. Quand aux cuisines, elles se trouvent sous la fumée mentionnée plus tôt, et répandent une odeur que la mer seule ne sait pas rendre.

Après avoir laissé les passagers descendre, Tom prend le temps de refermer, puis d'attacher convenablement le catamaran. Pendant ce temps là, Lucy pousse de petits cris aigus tant elle a l'air d'aimer les animaux. Elle prend le temps de montrer à Jake les autres chiens, et de lui dire desquels se méfier ; l'une d'eux semble très maternelle avec les deux autres.

Puis elle se relève avec difficulté, sa hanche semble lui faire des soucis. C'est une femme de moins de quarante ans, semble-t-il, avec de larges hanches et de petits seins, et qui boîte très légèrement.

Alors, c'est quoi vot' blase ? C'est encore comme ça qu'on dit dans les mondes terrestres, non ? Ou peut-être que je me fais vieille...

D'après ce qu'en sait Mia, c'est encore comme ça qu'on dit sur Nueva Nova et sur York prime. Mais juste là, et juste parce que les gens de là-bas ont des phrasés aussi étranges que leurs activités ou leurs origines.

Notre blase ? Une abréviation pour "blason", peut-être. Elle veut savoir qui on est et d'où on vient.
Alors, moi, c'est Atridès de Lycopolis, elle, c'est Mia du Cirque, et lui c'est Jake de... De la Station, on dire.

Et vous ? Vu que nous sommes invités, nous nous devons de mettre la main à la pâte pour vous. Comment pouvons nous aider ?

Mais la femme a arrêté d'écouter après les premiers mots.

Tu viens de la planète des dieux ? Pour de vrai ?

Bah oui... Mais comment le sais-tu ? Presque personne ne connait la planète Théopolis, encore un peu moins la ville d'Astropolis, et Lycopolis, même si c'est une grande cité-état, il faut avoir posé les pieds sur nos terres pour en avoir entendu parler ! Ou s'y être vraiment intéressé, j'imagine...

Il y a un court regard entre les deux locaux. Ils restent silencieux mais quelque chose vient de se passer.

En tout cas, c'est bien que tu connaisses, Lucy. Les gens me regardent comme un fou quand je parle des Dieux, le plus souvent !

Tu y crois ? Je ne veux pas être sceptique ou mettre ta parole en doute, mais la plupart des gens n'ont jamais vu d'esprits, de dieux ou de magie en général, tu sais. Ils ont du mal à admettre que l'univers est grand, et peuplé de choses étranges.

Pourvu que ça dure.

Allez, les enfants, allons manger. Dis, Lucy... On va devoir se préparer, juste au cas où. Les ravageurs sont allés sur le site du crash, et ça va les occuper longtemps, je pense. Jusqu'à l'arrivée des renforts du Sélénium, sûrement. Ils viendront ici, ensuite, et ils auront récupéré tant de métal et d'armes que... Eh bien, disons qu'on ne restera pas ici beaucoup plus longtemps.

Les quatre humains se mettent donc à table, et Jake a droit à sa portion devant la porte.

Le repas, fait de fruits de mer variés et parfois très étranges, est renforcé de carottes et de tomates du potager, ainsi que d'aromates inconnus de nos deux amis. Il est succulent, et même si la faim rend tout meilleur, il aurait certainement sa place dans un restaurant professionnel.

Bien entendu, Mia ouvre de grands yeux : elle est attablée avec les autres. On lui pose des questions, on s'intéresse à son avis. Tom et Lucy Meenie sont les premiers à la traiter en égale. Après Atridès, bien sur. les sujets restent futiles pendant la durée du repas : l'organisation de leur abri, le fait qu'ils font pousser et pêchent tout ce qui compose leurs repas, la nécessité de nourrir les animaux, les dangers des poulpes de mer. Il paraît qu'ils peuvent atteindre près de quinze mètres de large !

Puis, le repas terminé, Tom Meenie reprend un air plus sérieux.

Alors, maintenant que vous avez mangé, ça va mieux ?

On est comme la plupart des vrai Uhmlabais : accueillants. Mais on ne veut pas d'ennuis, vous voyez ? Donc je vais vous redemander de nous raconter votre histoire. Je sais, ça sera peut-être difficile. Mais prenez votre temps.

Mia se hâte de reprendre un dernier morceau et de l'enfourner dans sa bouche, laissant Atridès raconter.

Et ce dernier la regarde avec la petite moue de celui à qui on ne la fait pas, celui qui a bien compris la stratégie d'esquive de la gamine.

On ne veux surtout pas vous apporter d'ennuis, vous savez ? On va repartir au plus vite...

A priori rien ne presse... Prends ton temps, vraiment.

 Pour notre histoire, il n'y a pas grand chose à dire ! Comme je te l'ai déjà raconté, il y a dû avoir un accident sur la station, tout a explosé et elle est tombée... Je n'y connais rien en technologie, je ne peux expliquer d'où c'est venu.
Tout ce que je peux ajouter, c'est que c'est arrivé au moment où j'étais en train d'enfoncer la garde d'un certain Compor. Il avait enlevé Mia, je ne sais pas pourquoi non plus. Alors forcément, j'y suis allé avec quelques personnes qui connaissaient aussi la petite pour la récupérer...

Compor... Comme Ellon Compor ? Mon gars, tu as presque eu de la chance que la station s'effondre. C'est difficile de se frotter à ce malade mental. Nouvel échange de regard du couple ; un air sérieux les prend, de manière fugace.

Et toi, Mia, raconte-moi donc... tu as des talents mutants ? Il y a une raison à ce que cet homme te kidnappe ?

Il voulait me voler mon corps, il a dit. Je n'ai pas tout compris.

... Ca a l'air fou, mais vu son état de santé, ça ne m'étonnerait guère. Et il n'y a pas de témoin qui ait survécu, j'imagine ? Ce serait trop beau de pouvoir l'inculper.

THOMAS !

Quoi ? Je devrais les écouter sans m'indigner, sans leur indiquer quoi faire ?

Bah, il était sur la station, donc il doit être mort aussi. Il a eu ce qu'il méritait. Sinon, désolé de demander ça, mais comment un couple de pêcheur sur une petite île perdue connaissent Ellon Compor et Théopolis ?

On ne vient pas d'ici. Et on a pas mal bourlingué. Mais là, on est à la retraite. Fini le travail, ou alors juste pour nous-même.

Juste pour vous même ? Et Atridès se rend compte que le bastion n'a dû être construit que par et pour eux deux. Et les armes de sièges modernes...
Vous êtes d'anciens mercenaires ?

... Quelque chose comme ça. C'est dans le passé. Mais tu marques un point, Atridès. Personne n'a envie de s'étendre sur le passé ; alors parlons du futur.

Que voulez-vous faire, maintenant ? Vous comptez quitter la planète ? Et pour aller où, faire quoi ?

Oh, moi, je m'en fous du passé. Je peux en parler. Pour le futur, j'en sais trop rien...

En fait, mon voyage a commencé quand je m'éclipsais de la maison d'un noble, pas loin de Théopolis. Apparemment, il ne voulait pas trop que je sois son gendre. Moi non plus, en fait. Mais sa fille, si... Et j'ai croisé dans ma fuite une jolie égérianne. Joie. Elle, elle voulait que je reste avec elle. Pourquoi pas ? Elle était sympa, sacrément mignonne et douée pour plein de choses, euh... Sourire un peu béat.

Bon, elle m'a emmené à Astropolis, où les prêtres m'avaient dit que je ne devais jamais aller sous peine de subir le courroux des Dieux. Mais je n'en ai rien eu à foutre : les prêtres, c'est des cons, et les Dieux, de toute façon, ils ne me laissaient jamais rien faire sous prétexte que je suis plus jeune qu'eux, que j'ai une destinée, l'histoire de mon médaillon, que je ne dois surtout jamais être seul, ce genre de conneries... Ils m'ont fait chier depuis mon enfance, ceux là !

Bref, Joie a teint mes cheveux, m'a fait passé pour un membre de son peuple, et on est parti.

Et je me suis retrouvé sur la station. Voilà.

Maintenant, je ne sais pas... J'irai voir ailleurs. L'univers est grand, non ? Toi, tu veux aller où, Mia ?

Mia a l'air très étonnée qu'on lui pose la question.

Moi ? Heu...

Je ne sais pas. Je n'ai jamais pensé que je pourrais avoir la chance d'aller quelque part où j'aurais choisi d'aller, alors... Voir de jolies choses ? Et puis... Un endroit où il y a des livres, peut-être ? Je n'avais pas le droit d'en lire, alors...

Oh mince, mon livre ! Elle a soudain l'air très triste. Je n'en avais qu'un seul, et il est perdu, maintenant.

Bah, des jolis endroits, il y en a partout. Même chose pour les livres.
Je pense qu'on devrait aller vers le spatioport de la planète, réfléchir à notre destination ensemble, et t'acheter un bouquin ! C'est où le spatioport, d'ailleurs ?

A Alphacity, à deux mille kiomètres d'ici, mais il faut passer par des zones contrôlées par les ravageurs et infestées de bestioles titanesques... On a des ultrasoniques pour repousser les bêtes, mais ça attire aussi les ravageurs. Il faudrait un appareil volant, et faire un sacré détour pour y arriver en prenant le moins de risques possibles.

Alors comme ça tu sais lire, ma puce ? Si tu veux, j'ai quelques livres pour toi.

C'est vrai ?!? Oh oui, je veux bien ! J'ai toujours voulu avoir d'autres livres !

Après le repas, Lucy montre la chambre d'amis à Mia ; elle explique à Atridès qu'il devra se contenter du canapé, parce qu'elle "ne doute pas qu'il soit un gentleman", et que "Mia semble n'avoir jamais vraiment dormi dans un lit".
Atridès ouvre la bouche pour faire remarquer que lui non plus ne dort pas souvent dans un lit, et qu'il n'a aucune idée de ce qu'est un gentleman. Mais finalement, il ne dit pas un mot.
Heureusement, le canapé est des plus confortables, et chacun passe une nuit agréable.

Mia s'est même vue prêter "un conte de deux cités", qui est quand même moins bien que son premier livre, et écrit d'une façon assez arriérée. Elle ne comprend pas tout, loin de là, mais ce n'est pas grave : Elle l'adore quand même !!! Elle a rarement été aussi contente !

Au matin, ils sont réveillés par l'odeur du chocolat chaud et du café, qu'ils peuvent boire en dégustant les fruits locaux et le pain encore chaud. Mia, comme de juste, s'en met plein la panse, comme si c'était son dernier repas. Elle en donne aussi un peu en douce à Jake.

La farine est assez rare, alors profitez du pain. Le reste, on le fait pousser nous-même, que ce soit les grains de café ou de cacao, et même la canne à sucre !

Bon, par contre j'ai une mauvaise nouvelle...

Mia dresse les oreilles, la bouche encore pleine.

Les ravageurs ? demande-t-il en finissant d'avaler son chocolat chaud.

HAHAHA ! Non ! Je vais juste emmener un de vous pêcher, comme on avait dit ! Le jour ou les ravageurs débarqueront, je peux t'assurer que j'aurai une autre tête.

Alors, qui veut faire une sortie ?

Whoof !

Tu comprends tout ce que je dis, toi, hein ? Tu peux venir, mais je préfèrerais un de tes maîtres, quand même.

Ben moi j'ai jamais péché... Mais je veux bien venir quand même si vous êtes sûr que ça ne vous embête pas.

Je veux bien, mais si Mia veut y aller, pas de soucis. Je peux faire d'autres choses, ici...

J'aurais pensé que tu voudrais rester là, te reposer, lire et aider Lucy, Mia. Mais il faut bien apprendre à pêcher un jour. Il y a un dicton à ce sujet, je crois...

"Donne un poisson à un homme..."

Ah ! oui... "Il n'aura plus faim aujourd'hui. Apprends lui à pêcher..."

"Et il n'aura plus jamais faim". Eh bien Atridès, tu vas pouvoir m'aider à tresser, dans ce cas.

Mia a l'air très embêtée.

Non mais si tu veux y aller, vas-y. C'est toi qui décides, Atridès.

Tut tut tut. C'est décidé, allez, suis Thomas, c'est un bon professeur. Mais fais tout ce qu'il te dit de faire, entendu ?

Non, ne t'inquiète pas, Mia. J'aime bien tresser aussi, et puis je sais déjà pêcher. J'ai fait ça toute mon enfance... Fais attention de ne pas tomber du bateau, surtout. Tu sais nager, n'est-ce pas ?

Oui, oui, ne t'inquiète pas, je nage très bien. Je faisais ce numéro où je devais sortir d'un bassin. Le plus dur, c'était de sortir du sac. Et du coffre. Et d'enlever mes chaînes.

Dehors...

Rien que sortir le grand catamaran est une bonne expérience pour Mia. Dur à mettre à la mer, l'engin s'avère réellement agréable à chevaucher. On peut y marcher, y grimper, y rentrer, et les deux jet-ski accrochés à l'arrière doivent être bien utiles. Tom explique que c'est son engin préféré, et qu'il a coûté assez cher, mais qu'il a été tout autant rentable.

Une fois sortis de l'île, es directions s'offrent à eux.

Alors, tu veux qu'on aille où ? Il faut profiter : la nuit va se terminer, et on aura le frais un moment. On doit être rentrés avant le midi, sinon on va cuire et c'est pas productif.

Allez, choisis une direction, la pêche du jour est ta responsabilité.

Vraiment ? Bon... Par là, alors, fait Mia en désignant une direction au hasard.


Très bon choix, on mangera du poulpe, ce soir. Par contre, tu vois les tâches plus claires dans l'eau ? Oui ? Ce sont des zones où des bouts de terre sont "proches" de la surface de l'eau. On ne pêchera que là, parce que les eaux profondes sont très dangereuses, sur cette planète.

Allez viens, on va attacher le filet à l'arrière du bateau, et c'est tellement plus simple à deux...

Ah, ça, les noeuds, je sais faire ! s'exclame Mia qui avait peur d'être inutile.

Attention ! Il faut pouvoir les enlever assez facilement une fois arrivés, mais aussi qu'il ne tombe pas quand on aura fait notre pêche.

Après avoir appris quelques noeuds de marins, et après quelques silences, Thomas respire les embruns quand Mia réalise que la grande tâche claire qu'elle prenait pour une bonne zone de pêche se déplace maintenant vers eux, et pas l'inverse.

Heu... C'est normal, ça ? demande Mia en pointant le doigt vers la masse sous-marine.

Une chose d'un blanc laiteux, un tentacule d'un mêtre de large et de presque huit de haut sort alors de l'eau pour se diriger droit vers Mia.

Merde, les soniques sont désactivés, quel con !

La fille-chat fait un bond en arrière sur le bateau en poussant un cri aigu. Mais le tentacule est énorme, massif et rapide. Il la fouette légèrement, mais elle manque de tomber à la renverse. Elle tient sur le bateau, en équilibre instable, uniquement gràce à sont entrainement, mais la chose revient à la charge aussitôt.

Alors Jake, d'un bond, va s'accrocher à l'appendice de toutes ses pattes et de tous ses crocs, et commence à mordre dedans avec force.

Aussitôt, le tentacule se raidit et semble happé par le fond, avec le chien.

C'est bon, il ne reviendra plus... C'est quoi, tout ce sang dans l'eau ? Mia, ça va ?

Mais Mia ne répond pas. Mue par on ne sait quel instinct, elle a déjà plongé pour aider Jake.

Sous l'eau, rien, Mia est obligée de plonger. Et puis de la surface arrive un large faisceau de lumière. Mia se retrouve alors dans un autre monde, où tout lui est soudainement révélé.



Sous l'eau, huit piliers titanesques sont répartis géométriquement. Et la pieuvre géante, dont la tête doit facilement faire trente mètres de diamètre, en enserre trois dans ses appendices. Jake est au bout de l'un d'eux, et il ne semble pas vouloir lâcher prise. Il est ballotté d'un sens à l'autre et le sang pollue les eaux avoisinantes.

Sachant qu'elle ne pourra pas retenir son souffle plus d'une minute, elle s'accroche à un des piliers pour mieux observer la situation, tout en se demandant d'où vient la lumière en surface. Elle n'a toutefois pas grand espoir de pouvoir faire grand chose...

Sur l'ïle...

Alors, grand dadais, qui t'a appris le tressage ? Je pensais pas que ça se faisait vraiment, ou en tous cas pas par des hommes, sur Théopolis.


Ahaha ! Si, ça se fait. Dans les campagnes. Moi, j'ai passé mon enfance encore plus loin de la civilisation, dans les forêts. Il fallait bien des paniers pour récolter les fruits et les baies, ou faire des nasses pour les poissons.

Et oui, c'est souvent les femmes qui font ça. Mais mes mamans et mes papas étaient souvent trop occupées à se baigner dans le lac, à jouer de la musique et à baiser pour avoir le temps de vraiment travailler...
'Fallait bien que quelqu'un s'en charge, non ? La pêche, la chasse, la cueillette, la cuisine, le pressage et la fermentation des jus de fruits, le bucheronnage, la charpenterie, le tressage, la fabrication des arcs et des flèches... Tout ça, j'ai participé plus souvent qu'à mon tour !
Mais c'était bien. On rigolait bien, avec eux.

C'est seulement quand mes poils ont commencé à pousser que je suis parti pour les cités des Humains. Là, ça a vite été le service militaire et l'apprentissage des lettres...

Et ça ne t'a pas plu, les armes et les lettres, on dirait.

Tout en écoutant, elle marche et Atridès la suit inconsciemment au dehors, jusqu'à une pile de roseaux disposés sous une bâche haute. Elle lui en tend un.

Oh, si ! dit-il en prenant le roseau. Tu veux en faire quoi, Lucy ? Une natte, un panier, une nasse, autre chose ?

On va faire une sphère et y coudre des peaux pour avoir de belles boules étanches. On y stockera des liquides divers. Et il nous en faudrait beaucoup, alors suis le mouvement ds yeux, d'accord ? Bien. Tu disais ?

J'aimais bien. Savoir lire, écrire, compter, c'est utile. Apprendre un peu la philosophie et la géométrie...
Savoir se battre à main nue, au glaive, à la lance. Seul ou au sein d'une phalange, aussi. C'est comme ça qu'on devient un homme, non ?

Non, c'est les prêtres et les généraux qui m'ont fait chier. La vie de la Cité, j'aimais bien. Mais quand on se fait chier, on va voir d'autres cieux !

Tu ne t'entends pas avec les figures d'autorité ?

Atridès récupère donc suffisamment de roseaux pour créer l'armature. Il les tord, les assemble, les noue avec facilité, pour créer les méridiens, presque sans y réfléchir. Plus tard, il faudra renforcer avec les latitudes de la sphère.

Bah... Ils font leur métier. C'est utile la discipline, parfois. Par exemple, si la phalange se brise, on est tous morts. C'est déjà arrivé, et pas de ma faute ! C'est la seconde ligne qui a merdé. Ils n'ont pas comblé les morts de la mienne assez vite. Je crois qu'ils se chiaient dessus face aux centaures... Et on a pris cher. Il n'y a que les lignes arrières et la cavalerie qui ont réussi à fuir. Nous, devant, on s'est fait massacrer.

Mais pour l'autorité, faut pas abuser. Pour le boulot, je veux bien, à la limite. Si ils commencent à vouloir diriger ma vie, m'obliger à rester dans un temple, moi je dis : "A plus, les vieux, je prend ma bite et mon glaive, et je pars faire une visite aux petites !"

Et sinon, toi ? Comment une numide comme toi a fini ici ? Une sphère de roseau prend forme.

Eh beh, il va falloir que tu apprennes deux ou trois choses si tu veux survivre dans ce monde. Moi, je ne suis pas une jeune fille de bonne famille. Donc ton langage, ça ne me dérange pas. Mais à certains endroits, tu passeras pour un plouc grossier. Fais gaffe.

Tant pis, je parle comme je parle. Même si je peux faire des efforts s'il le faut vraiment.
Par contre, d'après mon expérience, les jeunes filles de bonne famille aiment plutôt bien les "ploucs grossiers" comme moi !

Très bien, ton tressage, au fait.

Ensuite... Ton histoire de phalange est super, mais pas très crédible.

Ah ? Pourtant ça s'est bien passé comme ça... Qu'est ce que tu ne trouves pas crédible ? , dit-il en lui présentant son travail.

Parfait, on aura vite fini celle-ci. Avec tes mains, on devrait en avoir vingt d'ici midi.

Pas crédible pourquoi... Eh bien, tu n'es pas mort, pour commencer. Et tu n'as aucune cicatrice, ça se voit quand on se balade torse nu...

Tu sais, après les batailles rangées, il y a des soigneurs qui passent dans le charnier. Il y a toujours quelques dizaines de veinards qui sont plein de sang et de plaies, mais toujours vivants.

Et les cicatrices... J'ai la chance de guérir plutôt vite, et sans que ça laisse de marques. Mais bon, tu ne vas pas me croire, et puisque je n'aime pas passer pour un menteur... Atridès cherche un chiffon, sort son coutelas, approche la lame de sa main. Lucy prend une posture différente,  un air inquiet.
Ah non, j'ai besoin de ma main en bon état pour le tressage. Finalement, il la pose sur son bras, et se fait une bonne entaille, qu'il recouvre du chiffon pour éviter que son sang coule partout.

Tu vérifieras à la fin de notre travail ?


Mais pourquoi... Tu sais, tu n'avais rien à prouver. C'est fréquent,  cette cicatrisation, chez les théopoliens ?

Non, j'ai rien à prouver. Mais comme ça, je serais tranquille... Plus de "pas crédible", "menteur" ou de "complétement barge".

Et non, ce n'est pas fréquent, même à Théopolis. C'est assez rare, en fait. Mais ça arrive.

Oh, je suis désolée, ne le prends pas mal, mais tu es tellement jeune, et pas dans ton élément, que je voulais te prévenir... Attends, tu entends ça ?

Il y a en effet une sorte de clochette qui résonne.

La radio ! Il faut que j'aille voir, garde ça en mains, je reviens !

Mais Atridès, qui ne voit pas en quoi tenir en main la sphère de roseau ou la poser au sol changerait quoique ce soit, décide d'emboîter le pas de Lucy. Il est assez curieux de savoir ce qui se passe. Au détour d'une petite masure de chaume et de paille, dans laquelle se trouvent la radio et d'autres machines, Il peut entendre des craquements et des voix.

Lucy Meenie, je vous écoute. Over.  

Meenie ? Nom de code Ange se dirige vers vous. Je répète. Nom de code Ange se dirige vers vous.

QUOI ? Vous voulez rire, contrôle ! On nous a promis l'nonymat, et pour ça, on s'est terrés sur cette planète humide pendant trois ans ! Trois ans !

... Navré, Meenie. On ne sait pas comment il vous a trouvés, mais la dernière station de contrôle qu'il a passée indiquait clairement qu'il venait vers vous. Vous devriez partir.

Sur le vaisseau que vous avez logé sur la station orbitale pour nous, c'est ça ?

Euh... positif, Meenie. Je répète...

Arrêtez de répéter, putain ! La station s'est écrasée ! Okay ? Ecrasée ! AVEC notre seul moyen de fuite. On est entre les barbares et le centre que vous n'arrivez tellement pas à gérer que vous n'en avez AUCUNE nouvelle, visiblement !

Euh... Nous vous envoyons des renforts et un nouveau moyen de transport ASAP.

Ouais, faîtes ça. Et qu'il emmène nos cerceuils, tant qu'à faire. Over. JE REPETE : OVER.

Et elle raccroche en claquant la radio le plus fort possible. Puis elle se prend la tête dans les mains. Atridès n'en est pas certain, mais il se peut qu'elle soit en train de pleurer.

Euhh... Lucy ? Je peux faire quelque chose pour t'aider ?

Oublier tout ça, et continuer à faire des paniers. On en aura besoin. Soit demain, soit après demain. Et ensuite, il faudra partir. Vous pourrez rester si on survit, ou tenter de partir avec nous. Mais le départ serait assez improbable : il faudrait déjà qu'on atteigne le Sélénium en vie.

C'est chez toi, c'est toi le chef. Je veux bien me remettre à bosser sur les "paniers". Mais tu ne penses pas qu'il y a une autre solution à votre problème : faire le mort, se cacher encore un peu ?
'Fin, vous parlerez de ça avec Tom, quand il rentrera avec Mia.

... Et les paniers, c'est pour quoi ? Tu m'avais dit que c'était pour stocker du liquide. Mais une simple outre, c'est aussi bien.

Sauf qu'on ne va pas juste les stocker. On va les catapulter, il faut que ca n'explose pas avant de toucher nos cibles.

Ah, d'accord !
Je pourrai aussi aider pour fabriquer la catapulte. Les canons, je n'y connais pas grand chose, les "phasers", rien du tout, mais ça, oui !


Ne t'en fais pas pour ça. On a bien mieux qu'une catapulte. Allez. Reprenons.

Lucy reste silencieuse après ça. Elle tresse comme si sa vie en dépendait.

D'accord. Atridès reprend le travail. Mais cette fois, il se concentre dessus : il ne laisse plus ses mains agir machinalement. Et ça fait une sacrée différence... Il tresse presque deux fois plus vite.
Tu peux quand même m'expliquer ? Je n'ai pas peur des batailles, mais j'aime bien savoir pourquoi et pour qui je me bats.

Les ravageurs ne resteront pas bien longtemps à piller la station. Pas tous, en tous cas. Et comme je le pensais, le Sélénium n'enverra pas d'aide assez vite : ça laisse de la marge aux bandits, et ils vont en profiter pour se venger de nous. Ca fait trois ans qu'on ne se laisse pas faire, et maintenant ils sont chauds.

Si tu veux, on peut vous envoyer vers d'autres îles. On a plus besoin de cet endroit, maintenant. Vous pourriez même le garder, mais vous ne seriez pas en sécurité pour autant.

Euuuhhh ?
Je ne comprends rien au plan... D'un côté, on prépare des munitions pour la défense, d'un autre côté, tu me parles de fuite vers une autre île, mais ça ne changerait rien puisque les ravageurs vont partout... En plus ce serait une île non-aménagée.
Et après, de nous laisser là ?

C'est pas très cohérent. Garde la tête froide, Lucy, ne panique pas...

En Mer...


Il faut moins d'une minute à Jake pour en finir avec le tentacule.  La bête ne tente même pas de contre attaquer. Puis le chien remonte à la surface. Et les soniques semblent faire le reste. Mais une chose est sûre : chaque pilier est en fait un des terrains de pêche favori de Tom.

N'ayant plus rien à faire sous l'eau, Mia remonte à la suite de Jake, puis nage jusqu'au bateau. Elle se hisse à bord avec le chien, puis le félicite.

C'est bien Jake ! Bon chien ! Tu as chassé la méchante pieuvre !

Vous auriez dû voir ça, tom. C'était incroyable !



Tom éteint le spot qui les a éclairés sous l'eau, mais maintenant que la tension est redescendue, Mia réalise en même temps que Jake que les soniques émettent à une fréquence qu'ils peuvent entendre ; et c'est particulièrement désagréable.

Eh beh, vous n'avez pas froid aux yeux... Ni toi ni lui. Bon chien. Ecoute, je vous présente mes excuses, je ne m'attendais pas à ça. Il n'y a pas de monstres de cette taille dans le coin, normalement. On va revenir vers des eaux moins profondes, hein ?

D'accord, mais... C'était quoi, sous l'eau ? Pas la pieuvre géante, mais... La construction ? Ces piliers géants ? Ils ont l'air... vraiment très vieux.

Maintenant qu'elle y voit plus clair et qu'elle a une idée de ce qui se trouve sous la surface, elle réalise que les zones "hautes" sur lesquelles ils étaient partis pêcher étaient en fait le sommet des piliers. Tom, lui, semble circonspect.

Des piliers, tu dis ? Ils ne peuvent pas être si vieux que ça, la planète a fait partie de la première vague de colonisation. Tout ici a au plus cent, cent quarante ans. Enfin, je crois. Tu sais, la plongée sous-marine est assez déconseillée, vu que la faune marine est assez... massive. On explore les fonds que près des côtes.

Cent quarante ans ? Ah non, c'était beaucoup plus vieux, et c'était une construction, pas un truc naturel. Z'êtes sûr qu'on ne peut pas plonger ? Avec vos soniques, la pieuvre devrait nous laisser tranquille.

Nous oui, mais le bateau, moins. Il faudrait qu'on retourne chercher celui d'un autre bateau... Et qu'on le rende étanche. Tu t'es trouvée une vocation ? Mia l'archéologue. Je voudrais bien voir tes piliers, quand même.

Archélologue ? Heu... Oui, bien sûr. Désolée, je suis curieuse, c'est tout, mais ça vaut le coup d'être vu. Vous avez du matériel de plongée ?

 Oh oui, ça on n'en manque pas. Dans une des cales, on a ça. Mais rien de ta taille.

Ah ? Daccord, alors... Mais le respirateur suffirait, non ?

Ouais, mais tu vois... Un bip répétitif retentit de la radio intégrée dans le bateau. Ah, on dirait que ma femme ne peut pas se passer de moi une heure. Excuse-moi, j'arrive.

Hey, Lucy ! Ouais, qui d'autre ? Tu vas jamais deviner ce qui nous est arrivé ! Une putain de pieuvre géante, des décombres sous marins, cette fille a une chance de ... Quoi ? Les ravageurs ? Tu vas bien ?

Oh merde. Il connaît notre position exacte ? Comment ?
...
D'accord. Ecoute, nous on va faire un peu de plongée.
...
On a repéré des ruines ET un poulpe géant. Tu sais, le genre de truc qui t'arrache des bateaux sans soniques en un coup de tentacule.
...
Ca marche. Je t'aime, chérie, on revient au plus vite.

Qu'est-ce qui se passe ? demande Mia.

Rien, ma belle. On va plonger tous les deux. Jake le chien, tu vas garder le bateau, okay ? Je vais retourner dessous, avec ta maîtresse. Mais pas longtemps, d'accord ? Après, on pêchera un peu, et puis on rentrera.

D'accord, Jake ? Bon chien !

Vous allez voir, ces piliers, c'est... gigantesque !

Oui, bah la pieuvre aussi, et elle n'a surement pas fui. Elle doit se terrer au fond, alors on va rester prudents, d'accord ?

Bien sûr. Il n'y a pas un de ces appareils soniques qu'on puisse emmener avec nous, dis ?

On va juste jeter un coup d'oeil. Nos soniques suffiront juste à l'empêcher de faire surface, alors on ira pas profondément. Choisissons un sommet élevé pour plonger.

Tom montre le dépôt de matériel à Mia, et entreprend se détâcher un respirateur.

Tiens, prends la barre. Je vais t'indiquer comment faire pendant que je bidouille ça.

Elle s'en tire plutôt bien, et bientôt ils sont prêts à plonger. Le sport est allumé, et ils voient déjà sous eux, la grande surface du pylône incrusté d'algues et de coquillages. Avec les soniques, bien sur, plus aucun poisson ni poulpe de petite taille ne s'y trouve plus.

Je suis prête.

Une fois arrivés au contact du haut du pilier, ils ne sont qu'à six ou huit mètres de profondeur. Au fond, la pieuvre géante se terre, mais ses tentacules ressemblent à des ressorts prêts à se tendre. En regardant les autres piliers, aucun doute n'est possible : ils ont été taillés. Leur forme est parfaite et lisse sous les algues qui le recouvrent.

En fait, Mia se sent étrangement bien, sous l'eau, en cet endroit particulier, et ce malgré la présence menaçante en contrebas. Thomas Meenie, lui, est surpris mais semble plus inquiet que curieux. La chose géante le met mal à l'aise.

Curieuse de voir exactement la surface des piliers, Mia commence à écarter les algues et à ôter coquillages et concrétions avec son couteau de plongée.

La couche est si épaisse que c'en devient comme creuser. Mais au bout d'une trentaine de centimètres de matières organiques, Mia trouve une matière ressemblant à la craie, blanche et poreuse, mais elle semble impossible à briser.

Elle fait signe à Tom d'approcher avec sa lampe tout en élargissant le trou. Elle veut mieux voir la surface. Le rasta s'exécute ; elle tire sur l'amas d'algues et réalise que maintenant, il suffit de tirer un peu pour que tout s'arrache uniformément. Dessous, la pierre blanche ressemble à des tas d'anneaux réguliers assemblés géométriquement les uns sur les autres. Et il y a comme un mouvement immobile à l'intérieur. Mais Mia elle-même a du mal à justifier cette sensation.

Comme hypnotisée, elle pose la main sur la pierre pour essayer de mieux sentir ce mouvement.

Sur l'île....

Oh no, he didn't. Lance Lucy dans une langue inconnue. Tu ne trouveras jamais plus calme et concentrée que Lucy Meenie, petit, précise-t-elle en agitant son long cou et son index à l'unisson. Et je sais EXACTEMENT ce que je dis. Je suis ici depuis des années, et toi non. Ecoute et apprends au lieu de douter et refuser de croire.

Les ravageurs arriveront ici sous peu, et on ne survivra peut-être pas. Ils sont sur la route pour retourner au Sélénium. Et le Sélénium n'a plus de quoi nous porter secours. Si je te donne des options variées, c'est juste pour que tu ne te sentes pas obligé, ni de te battre, ni de rester, ni de devoir fuir. Mais soyons clairs : si tu restes avec nous, tes chances de survie augmentent. Et si tu veux quitter cet endroit, c'est pareil. Mais on ne vous retient pas.

Hididneut ? Si tu veux... Je reste avec vous. Mes chances de survie son excellentes, quoi qu'il arrive.
Mais vu que vous nous avez bien aidé, j'aide à mon tour. Et puis une petite bataille contre les ravageurs, ça me dérouillera. Mais il faudra mettre la gamine en sécurité.

Viens, je vais te faire voir comment marche la radio. Tu pourrais avoir besoin de contacter le bateau plus tard, et on doit prévenir Tom.

Après quelques instructions simples (on appuie sur des boutons à chiffres, et il faut connaitre le code de Tom pour lui parler), elle lui explique qu'on parle à tel endroit et qu'on écoute à tel autre, et la sonnerie retentit.

Tom ? Tom, calme-toi, on a des soucis. Oui, mais c'est autre chose. L'ange sait où nous sommes. Non, juste la planète. Mais il n'y a pas quarante mille îles et le Sélénium est dans la merde, ils n'ont plus d'hovercrafts. Et je le sens dans mes tripes, les ravageurs vont venir se venger, Tom. On prépare des bombes d'osier, avec Atridès. Il est bon, on va pouvoir se faire un stock.

...

Quoi ? Tu crois vraiment que c'est le moment ? Oh. Je vois. Bon, okay. Mais il y a du boulot ici aussi, ne revenez pas trop tard. Moi aussi.

On se remet au boulot, si j'ai bien compris... Et c'est qui, l'Ange ?

Un tueur à gages. Tom et moi, on a fait enfermer beaucoup de sales types. Et ils ont de l'argent. Quand les services secrets du Sélénium nous ont dit qu'il était à nos trousses, ils nous ont mis à la retraite. trois ans de paix. Relative, bien sur. Mais bon. C'était bien, tant que ça a duré.

Tom a un plan de secours, pour les ravageurs. Il y travaille avec Mia. On va préparer les défenses, et espérer qu'ils sont toujours bêtes et indisciplinés.

Ça me va. Les troupes indisciplinées se brisent toujours sur celles qui le sont ! Enfin, presque toujours...

Bon, j'imagine que c'est du feu grégeois, que tu veux mettre dans les "paniers" ? Tu sais que ça flotte à la surface, ce genre d'huile ?
On peut en mettre sur l'eau, à l'extérieur. Et leur trirèmes brûleront avec une simple flèche enflammée envoyée dans la flotte ! Comme à la bataille des "Eaux Sombres"...

Haha, oui, c'est l'idée, grosso modo. Mais on va devoir être stratégiques, et bien viser. D'ailleurs, demain, tu expliqueras à Mia comment faire les conteneurs, et je te montrerai comment on les propulsera. Un peu d'entraînement aux "armes de siège", ça ne fait pas de mal. Si tu vises aussi bien que tu tresses...

Oui, pour Mia, pas de problème. C'est une fille, je dois pouvoir lui apprendre vite le tressage...
Par contre, moi, pour les armes de sièges... Petite grimace. Je n'ai passé qu'un an sur les remparts, et seulement six mois avec le génie. J'ai seulement appris à "servir" les batteries et à les réparer. Les réglages d'azimut, c'était pas moi...

Allez, va. On tressera plus tard. Je crois que tu vas t'amuser. Regarde.

Lucy se rend dans l'atelier et fait glisser un mur de bois derrière lequel trône un petit engin de métal doté de deux fourches mobiles. Il en avait vu de plus gros, sur la station. Elle monte dessus, et en quelques gestes habiles, commence à démonter la nacelle de la petite tour, va la ranger dans l'entrepôt et Ramasse la sorte de siège qu'Atridès avait vu plus tôt. Elle le positionne, descend de son engin, et vient en attacher les fixations. Puis elle reprend l'engin et prend entre les fources un canon qu'elle dispose et vient à son tour ajuster. Ce dernier dispose d'une petite porte qu'on soulève pour placer le projectile.

Amène ton panier, vide il ne se cassera peut-être pas. Je vais te montrer, puis tu essaieras.

Une fois chargé, Lucy remonte sur l'engin, et active la tourelle avec un levier près de sa cuisse. Elle se retrouve en hauteur dans un bruit de métal qui claque, et la tourelle tourne de droite et de gauche tandis qu'elle tourne son levier prolongé d'un "U" dans la direction correspondante. Elle avance le levier pour faire lever l'angle de tir, et le tire pour baisser.

Puis elle utilise son pouce gauche pour relever une trappe dans l'extrémité du levier : un bouton y est caché ; elle le presse, et des lumières colorées apparaissent devant elle. Elle tire le levier près de sa cuisse, et l'engin redescend.

Vas-y, tu vas voir, c'est comme un jeu de précision.

Le théopolien a tout suivi avec attention.

Oh ! Ça à l'air simple à faire bouger ! Pas de treuil, pas de manivelle... Atridès s'installe, et essaye les commandes.
Et donc, ça tire en cloche, ou en tir droit ? Comment on fait pour calculer l'inclinaison selon l'endroit que l'on cible ?

Mais avant qu'il n'obtienne une réponse, Atridès réalise que la machine fait tout : lorsqu'il bouge, une image de ce qu'il voit, mais en plus petit, lui montre la trajectoire que prendra son projectile selon son poids, en traçant une ligne rouge. C'est en effet un jeu que n'importe quel enfant pourrait apprécier.

Atridès balaye la zone pour déterminer sa zone de tir maximum, que ce soit en distance comme en angle. Puis il s'amuse à prendre une cible... A deux mètres sur la gauche de ce récif, oui... Et il tente le coup ! La balle rebondit pile où la machine l'avait indiqué, et Atridès est gratifié apr un petit sifflement prolongé.

En cloche, pas mal. Tu as évité de casser la sphère, c'est parfait. La machine ne calcule pas le vent, mais quand les projectiles seront chargés, ils iront bien plus loin et le vent ne sera plus autant un souci.

Dis, au fait, tu sais te battre, tu as déjà tué... Et Mia ? C'est quoi, son histoire à elle ?

J'en sais rien. Je n'ai pas demandé. En plus, on n'a pas eu le temps de discuter beaucoup, et elle est assez timide, donc...

'Faudra lui poser la question, à elle. De toute façon, j'aime pas parler pour les autres !

... Tout ce que je sais, c'est qu'elle bossait dans un cirque, que c'est une danseuse et une acrobate incroyable ! Et aussi que les autres membres de la troupe la martyrisaient physiquement, le coup de la cage et des restes à même le sol comme repas... Mais surtout psychologiquement. Elle en avait une peur panique.

Ça en explique, des choses. La pauvre petite.

Ouais. C'est triste.
Mais ça arrive à plein de gamines, un peu partout...
'Fin, elle est avec moi, maintenant... Ça ira mieux pour Mia, crois-moi !

Les deux se remettent finalement au travail. Lucy recouvre ensuite l'intérieur des paniers avec des peaux de poulpe tannées, et ils en accumulent ainsi pendant quelques heures puis la maîtresse de maison lui rapporte des rafraichissements et le laisse pendant qu'elle part en cuisine.

Atridès continue de travailler quelques minutes. Le temps de faire deux nouveaux "paniers". Et il en a marre... Il a pensé une minute à aider Lucy aux fourneau, mais bon...
Aussi il va faire le tour des remparts. Reconnait les lieux. Profite du soleil. S'assoit. Admire le ciel et l'horizon. S'allonge...

... *Ronflements*

Atriès se réveille à Lycopolis, dans son baraquement, où il siège avec le onze autres membres de son escouade, mais tout le monde dort encore. Il essaie pourtant, mais aucun ne l'entend ni se réveille.

Eh, les gars, debout !
Le sergent va encore nous casser les couilles si on est la bourre ! Ah putain... Les branleurs.
Tans pis pour vous !

Il sort donc du baraquement, rejoint à petite foulée son poste sur les remparts, salue son officier, et se retourne vers l'horizon. Fixe.

A l'horizon, derrière la colline, l'océan rage ; devrait-il y avoir un océan ici ? En tous cas la tempête arrive.

L'officier Lucy arrive, le pas sec. Elle le jauge du regard. Une chouette vient se poser sur son épaule.

C'est nous contre la tempête.

Ça va bien se passer, Officier Lucy. On a déjà vu ça... Nos murs sont solides.

Je ne m'en fais pas pour nos murs, soldat. Si Poséïdon nous accompagne, tout ira bien. S'il est contrarié... Aucun mur ne pourra arrêter la tempête.

Ça, c'est le travail des prêtres de nous garder dans les petits papiers des Dieux. Espérons qu'ils ont fait suffisamment d'offrandes.

Sinon... Haussement d'épaule fataliste.

Ca tombe bien que tu en parles, soldat. Tu as rendez-vous avez eux si on survit. Ils parlent de te faire prêter allégeance à Asclépios.

Quoi ? A Asclépios ? C'est une blague ? Et pourquoi pas à Héra où aux Muses, tant qu'ils y sont ?
Ils iront se faire foutre... Je vais leur amener suffisamment de monde à s'occuper pour qu'ils m'oublient cinq minutes, cette bande de débiles !


BIEN PARLE, HEROS ! REJOINS PLUTOT MES RANGS, ET L'ESPACE SERA MON NOUVEL OCEAN !

Ajoute Poséïdon, qui visiblement pourrait bien être du côté d'Atridès, finalement.

Officier Lucy ? Qu'est ce que je lui dis, au vieux con dans la flotte ? J'ai bien envie de l'envoyer se faire foutre comme les autres Dieux..

... Mais je me suis dis que peut-être, pour une fois, en terme de stratégie et de diplomatie... Éviter les dommages collatéraux !


Sinon, on a des paniers d'osier.

Des Paniers d'osier.

Des paniers d'osier, il faut faire des paniers d'osier.

ATRIDES !

Et le jeune homme se réveille en sursaut.

Quand les pêcheurs reviennent, ils trouvent Lucy qui leur fait signe de baisser la voix ; elle tresse des paniers sphériques tandis qu'Atridès ronfle, à l'ombre.

Mia aide Tommy a décharger son matériel avant de le suivre lorsqu'il rejoint Lucy. Elle sent qu'ils ont des choses à se dire aussi elle ne pipe pas mot, attendant sagement dans son coin en grattant la tête de Jake.

Elle entend des bribes murmurées : "doué mais fainéant" "pauvre petite", "pieuvre géante", "utile si on peut lui faire attaquer les ravageurs", "connard d'assassin", "encore déménager" et enfin "je préfèrerais l'affronter en face une bonne fois pour toutes".

Quant à Jake, il reste tranquillement là, et s'affaisse graduellement pour même finir par lever les pattes afin de se faire flatter les flancs.

Mia hésite, puis se dit qu'ils lui diront de quoi il retourne exactement si ils le veulent.

Heu... Excusez-moi. Je peux vous aider pour quelque chose ?

Viens petite, on parlait de vos découvertes.

Tu sais, on se disait qu'en cas de fuite, on pourrait attirer les ravageurs sur cette chose, si on pouvait désactiver leurs soniques.

Eh bien... Si on pouvait les faire ralentir à cet endroit, un plongeur pourrait le faire sans être vu, non ?

On pense qu'il serait plus facile de les désactiver quand ils seront face à l'île. On prépare des projectiles justement pour éviter de devoir y aller à la "mission spéciale". On a donné, le coup de la b... enfin du couteau, quoi. Partir sans assurances, sans équipement, autant partir à la mort. D'ailleurs, vu la gravit éde l'évènement et le fait qu'on va devoir partir....

Ah non ! C'est moi qui lui montre. Toi, tu vas réveiller Atridès.

Viens, Mia. Je veux te montrer quelque chose.

Elle la fait descendre dans la cave, qui contient tonneaux, réfrigérateurs et matériel mécanique. Derrière les tonneaux, un espace permet de se glisser. Elle trouve un levier entre les tonneaux et le mur, le tire, et le mur s'ouvre sur une petite pièce cachée contenant des sacs pleins et des râteliers sur chaque endroit libre. Il y a là des armes que Mia n'a même jamais vues. Des armes à feu, à impulsion, des mines, des fusils, des couteaux, des choses inidentifiables...

Oooh ! C'est à vous, tout ça ? Mmmm... Bien sûr, que c'est à vous. désolée, je suis idiote.

Mais... Pourquoi est-ce que vous me montrez tout ça ? demande Mia avec une inquiétude grandissante.


Tu peux en prendre deux de ton choix. On va devoir en laisser derrière nous, mais je veux que tu puisses te défendre.

En voyant les réactions de Mia, qui montre tour à tour une paire de gants à lames rétractiles et des lunettes, Lucy écarquille grand les yeux.

Mais... Je... Comment ces lunettes se sont retrouvées là ? Ecoute, vas-y. J'avais dit "ce que tu veux", après tout, mais... Fais attention à les tester avant de les mettre en situation, tu veux ? Ces lunettes-là sont très particulières. Bon choix, les gants. Ça colle avec ton look. Je te montrerai comment ça marche plus tard. Mince, alors...

Merci ! C'est vraiment très gentil. J'adore ces lunettes. Elles ont vraiment un look trop chouette !

En tous cas, c'est bien que tu les aies. J'aurais autant aimé que ce soit une fille qui les utilise ; quand Tom les a trouvées, on a failli divorcer. Allez, viens, on va rejoindre les garçons, mais avant on va te rhabiller. Je n'ai pas grand chose ici, mais on ne peut pas te laisser vêtue de haillons.

Atridès ! Eh, mon gars, debout ! il est super ton panier d'osier, mais y'en a qu'un. Ca va ? T'as pris un coup de chaud ?

Non, non, je ne dormais pas, officier ! ...

Tom. Oh. Non, ça va.
Et les paniers, j'en ai en fait plein. Celui-là, c'était le dernier. Une simple petite sieste. Pour être frais pour les rondes de nuits !

Et c'est tout à ton honneur. Mais on est quatre et tu dois avoir faim. Viens, on va préparer la table.

Euh oui. Bonne idée. On mange quoi ? ... Et, ça s'est bien passé avec Mia ?

Oui... C'est une fille super, elle a juste besoin de reprendre un peu confiance en elle. Par contre, elle est plutôt téméraire. Ce qui me fait peur, c'est qu'elle est avec Lucy, Hahaha ! Dieu seul sait ce qu'elles partagent actuellement. Moi-même je ne sais pas si elles parlent d'armes ou de vêtements. Surement les deux.

Dans la soirée, on mange, on reste à table et on partage. Mia est revenue avec des vêtement très féminins, et un sac contenant un mystère pour les hommes. Ce sont en fait des tenues moins féminines et plus pratiques pour Mia, mais elles laissent le mystère planer avec moult éclats de rire tandis que les mâles s'observent d'un air qui signifie "autant ne pas chercher à comprendre".

Le lendemain est une journée bien plus active et moins drôle, même si la compagnie des Meenie est agréable. Il s'agit de recouvrir tous les paniers, et de les remplir avec les réserves de carburant restantes et de drôles de produits issus de certains poissons locaux. Il semble que le mélange sera détonnant, collant, et puant à la fois.

La journée, même si elle dure longtemps, est bien remplie, et chacun prend une pause pour siester à un moment ou à un autre.

La nuit tombée, un nouveau repas terminé, Thomas prend soin de montrer chaque recoin secret de l'îlot aux deux nouveaux ; et des secrets, les Meenie en ont beaucoup. Outre leur équipement militaire, leurs réserves de munitions, ils ont aussi un petit sous-marin flambant neuf, auquel on accède derrière l'île avec une échelle qui donne dans un sous-sol immergé. On trouve chez eux pas mal d'équipements qui ne sont plus fonctionnels, mais les invités réalisent vite qu'ils auraient pu tomber bien plus mal à leur arrivée catastrophique sur cette planète.

Sans la menace imminente, l'endroit serait un vrai petit paradis. Mais durant la seconde nuit, tout bascule : des bruits de percussions se font entendre, de plus en plus nombreux, au loin. Les ravageurs arrivent. Atridès et Mia, qui jouaient aux cartes avec Lucy, vont réveiller Thomas, qui met pour le coup bien moins de temps que d'habitude à émerger...

Une fois tommy réveillé, Mia se hâte de grimper au plus haut du fort pour observer les arrivants. Pour les autres, ce seraient des vagues noires sur fond de ciel noir avec de minuscules silhouettes noires. Mais pour les yeux de Mia, ce sont une trentaine de bâteaux allant du zodiac au chalutier, équipés artisanalement, et dont certains sont rehaussés d'armes de siège manufacturées de bric et de broc.

Ils chantent et frappent en rythme, et l'effet sur la jeune fille est saisissant. Elle est anxieuse, et fait nerveusement sortir et rentrer ses griffes, car elle n'a jamais participé à une bataille ni même à un combat à mort, contrairement à Atridès et aux deux ex-agents du sélénium. Même si son entraînement au corps-à-corps a été intensif, sa seule vraie expérience de la bagarre vient de la neutralisation discrète de quelques gardes de sécurité durant ses cambriolages. Elle sait que cela va changer cette nuit, et elle sent une boule se former au creux de son ventre, car elle ignore si elle sera capable de tuer quelqu'un... Car elle ne veut pas avoir à le faire, mais elle risque de ne pas avoir le choix.

Le coeur d'Atridès est plus calme. Il sait ce qui arrive, et dans quel état d'esprit ils doivent être. On dirait des barbares, par contre, pas une armée digne de ce nom.

Bon, j'imagine qu'on doit rejoindre nos positions. Je vais à l'artillerie, j'espère pouvoir toucher le navire amiral en tir direct. Ça les calmerait...

Une chose quand même... S'ils prennent les fortifications, quelle est la position de repli ?

QUAND ils les prendront, on ira au sous-marin. Ils nous poursuivront, pour sur. C'est pourquoi Lucy va y attacher le catamaran. Et on tentera de fuir après avoir piégé l'île, Ajoute-t-il avec un soupçon de regret dans la voix. Et puis on ira improviser plus loin. Oh, ne me regardez pas comme ça, moi non plus ça ne me plaît pas, l'improv'.

Ça me va. J'ai vu pire en terme d'improvisation face à l'ennemi...

En tout cas, ils vont devoir payer le prix à Arès pour cet endroit. Et fais attention à toi, Mia, hein ?

Ahouh ! Ahouh ! Ahouh ! , crie-t-il en fonçant vers la batterie de gauche...

Pour l'équipement, je vais résumer :

- Une paire de gants à lames (plutôt à pointes, au final), utiles pour l'escalade (un + sur ce genre de compétences) et pour le corps à corps (pareil, un + pour lesdommages, s'utilisent avec la compétence de bagarre.)
- une paire de goggles à lentilles, attention à ne pas les casser malgré tout, qui permettent de voir à travers les matériaux organiques ou non et peuvent être réglés pour ne voir que le métal, ou que la chair, etc.

- Une épée proche du glaive, faîte dans un métal mat inconnu, de très bonne facture et au tranchant dangereux. Elle n'a pas vraiment d'améliorations technologique, mais est ultra-solide. elle procure un score de dégats de 1+ (ce qui est vraiment bon...)

- Et des jumelles tactiques, un modèle plus performant que celui de l'armée, avec détection IR, ordinateur de reconnaissance faciale intégrée, qui peut mesurer distances et taille/poids des gens ou des objets. La base de données intégrée est déjà remplie du profil de maints bandits intergalactiques et de pas mal de ravageurs.

au-dessus de Nico

Quelques questions quand même sur la configuration des lieux (un plan serait idéal, mais je sais bien que c'est du taf.)

- L'enceinte du fort fait quelle hauteur ? Est-ce qu'elle émerge directement de l'eau ou est-ce qu'il y a une plage ?
- Quelle est la dimension du fort ? Des plus hauts bâtiments ?
- C'est la nuit, mais est-ce une nuit claire ou une nuit noire ?
- Le fort est-il éclairé ? Et les navires des ravageurs ?
- Y avait-il des fumigènes dans l'équipement de Lucy et tommy ? Si oui, beaucoup ?
- Mia a-t-elle pu emprunter des filets de pêches pour les disposer sur les hauteurs, prêts à être utilisés ?

DONC. Les murs dépassent de niveau de la mer de 4+ mètres. Ils se trouvent dans l'eau, et donc oui, il y a de la plage. La nuit est sombre, éclairée par les très nombreuses étoiles par rapport à la Terre, et le ciel est découvert.

Le fort est éclairé de l'intérieur, mais des spots sont disponibles pour l'éclairer mieux.

Les navires ennemis sont juste éclairés de torches.

Et pour les dernières questions, oui, oui et oui.

Alors que les tambours sonnent de plus en plus fort à mesure que les feuxet les bateaux approchent, on sent la tension monter. Thomas passe voir Atridès, et lui montre un truc pour ses tirs : il y a un réglage qui s'appelle : vision magnétique, qui lui permettrait de viser les appareils qu'ils appellent "soniques". Plus tard, s'ils doivent fuir, il faut absolument que ces machines soient désactivées sur tous les poursuivants...

Lucy, elle, est partie se préparer et ne semble pas revenir.

Le temps passe, les cris des ravageurs excités montent, et l'adrénaline s'installe dans le corps de chacun des trois défenseurs.


La tension monte.

Installée en haut de la vigie, au-dessus de la lumière des projecteurs, Mia est quasiment invisible et entend bien le rester jusqu'à ce qu'elle ait une chance d'être utile.

Aussi, Atridès active cette nouvelle fonction, et y ajoute ces nouvelles données aux anciennes pour choisir sa première cible.

Voilà ! Ce grand catamaran portant des "soniques", beaucoup de marins et un peu d'artillerie ! Peut-être le navire amiral...
Il ajuste son tir, prend en compte les données affichées, et entend les détonations des armes ennemies.  

FEU !

Atridès tire par réflexe et voit un pan du mur en face de lui exploser au même moment, envoyant du bois pulvérisé dans sa direction ; heureusement en hauteur, il réalise alors qu'il vient de toucher simultanément le canon qui vient de faire la trouée, et son objectif initial : les éclats de graisse enflammée déclenchent quelques hurlements et mouvements à bord, et la réaction des ravageurs le surprend alors : Ils éclatent de rire, à part pour les malheureux brûlants.

Tom lui crie de redescendre, il rechargera. Il va falloir prendre le rythme.

Prendant ce temps, Les bateaux approchent et à cette vitesse, ils seront à la trouée dans un peu moins de dix minutes. Mia peut voir, malgré l'obscurité, que quatre petits bateaux rapides, un pilote et un homme avec une mitrailleuse laser à trépied sur chaque engin, qui se détachent du gros pour prendre les lieux d'assaut par les flancs, deux par deux.

Mia glisse ses doigts dans sa bouche et siffle du plus fort qu'elle peut pour attirer l'attention des hommes en bas avant de leur faire signe en faisant un 2 avec les mains et en faisant le geste de contourner le fort de chaque côté. Mais Tom est occupé à charger cette fichue machine, et Atridès à la remonter pour tirer de nouveau.

J'y vais ! Atridès, tu pourras recharger seul, fais attention à toi !

Thomas Meenie se met un fusil en bandouillère et un autre à la main. A vrai dire, il s'est sur-équipé. Il part du côté des logements, les pieds dans l'eau, et pose son arme entre les poteaux. Il commence à viser, pendant que Mia, de son côté, se demande où peut bien être Lucy. C'est maintenant qu'ils auraient besoin d'elle !

Ne la voyant pas revenir, et ignorant encore ce qu'elle va bien pouvoir faire, elle se laisse glisser jusqu'au toit du hangar le long d'un cordage, en prenant bien garde de rester dans les zones non -éclairées.

Au même moment, Atridès remonte la tourelle chargée, et une voix s'élève alors qu'une série de spots se braque sur un nubien géant, torse nu, muni d'une sorte de cône qui amplifie sa voix.

C'est fini, petit homme. Les ravageurs reprennent ce qui leur appartient !

Malgré l'envie d'envoyer une bombe incendiaire directement dans la tête du dernier intervenant, Atridès se raisonne et continue de viser les endroits qui feront "le plus mal" : les concentration d'hommes, de navires, ou même de carburant...

Autour de lui, Thomas a commencé à ouvrir le feu, et de petits bruits fusent de ses fusils à accélération magnétique, on entend vite des cris étouffés et des ricochets métalliques... Mia cherche du regard, ne trouve pas trace de Lucy. Inexorablement, les bateaux approchent en canardant de balles les troncs qui leur font face.

Les deux zodiacs du côté de Mia zig-zaguent en tirant eux aussi sur le bois : elle n'a pas été aperçue.

Atridès Enchaîne trois tirs comme son premier : il parvient à optimiser les tirs en appréciant correctement la zone d'impact. à trois reprises, hommes et matériel sont touchés alors qu'il monte et descend pour éviter les tirs ennemis, qui commencent à sérieusement s'orienter sur lui.

Mia voit alors les hommes se lancer tous d'un coup dans les plus petites embarcations, et des dizaines de moteurs s'emballent. Ce sont des hommes qui prendront l'assaut, mainatenant. Ils viseront soit les murs, soit l'entrée. En tous cas la fille-chat ne restera plus bien longtemps cachée.

Tant qu'il fait du dégât, Atridès est content. En plus, focaliser l'attention sur lui aide les trois autres. Donc, il continue. Il recharge, remonte la tourelle, vise de nouveau... Cette fois ci, le goulet d'étranglement que les petites embarcations vont sûrement suivre pour atteindre le portail.

Il y a de forte chance que ce soit son dernier, ou avant-dernier tir avant de devoir quitter ce poste.

Et pendant tout ce temps, Mia, tentant de contenir sa peur, reste cachée. elle voit le premier homme qui passe la muraille, de son côté de l'île. D'en haut, il ne pouvait pas la louper, et quand il saute à terre, il saisit une lame à sa ceinture et commence à crier :


DESCEND DE LA TOUT DE SUITE ET TU VERRAS PEUT ETRE LE SOLEIL SE LEVER DEMAIN !

Le cri du ravageur fait sortir Mia de sa transe et elle bondit hors de vue, entre le hangar et la remise.

La plupart ce des fous furieux sont torse nu, et celui-là ne fait pas exception. Et ses yeux son injectés de sang, et le blanc en est d'un jaune terne. Ils ont d'étranges cernes accentuées par les rares lumières.

Atridès vient d'essuyer une série de balles qui ont failli lui ôter une oreille, mais il entend malgré tout les cris de l'intrus.

Hors de question de perdre ce tir qu'il vient d'armer... Nouvelle visée... Ce navire qui dispose de "soniques". Atridès se souvient des consignes de Lucy. Et il ouvre de nouveau le feu avant de se laisser glisser de la tourelle. Il se dirige discrètement vers celui "qui ne verra pas le soleil se lever demain", main sur le glaive.

Qu'est ce que c'était que cette chose... Le ravageur reste en retrait, l'arme à la main ; Atridès peut manoeuvrer derrière les tonneaux et les machines disposées par eux pendant une vingtaine de mètres, mais il sera plus dur d'en faire autant sur les vingt prochains. Un autre ravageur passe le mur et attérit auprès de son camarade.

Je veux. Tuer.

Oh, tu vas tuer, mon Romeo. Il y a un petit malin qui croit pouvoir se cacher. Fais lui un calin, je vais m'occuper de l'autre.

Entendant cela, Mia dresse ses oreilles pour anticiper leur approche sans se faire voir.

Ô Romeo, mon Romeo ! Je suis ici, viens me rejoindre ! , annonce Atridès en se découvrant un peu. Pourquoi j'ai dis ça, moi ?

Tuer ! hurle le ravageur ravagé en se mettant à avancer en pressant le pas, arrosant à la ronde avec son espèce de fusil à répétition.

Attends, Roméo, att... putain, quels cons, ces convertis. Bon, changement de plan. Je sais que t'es pas un Meenie, petit. Et l'autre non plus. Vous venez d'où, bon sang ? Allez, sors de là qu'on cause, je te ferai pas de mal...

Mais Mia s'est dissimulée sous le rebord du toit du hangar, dans l'obscurité, et ne compte pas bouger avant qu'il soit à sa portée.

Le théopolien se remet à couvert.

Erreur. C'est moi qui fait du mal, ici. Tu es coincé ici avec moi. Tu as deux minutes pour prendre la fuite, ou je m'occupe de toi et de tes hommes. Un par un... Petit. Je continue avec qui ? Désigne-le.

Atridès, après avoir parlé, change de position, toujours dissimulé au mieux. Le but, c'est de ne plus être à l'endroit attendu, attaquer, tuer, se replier. Mais il faut voir comment les choses se déroulent.

Affolé par un mouvement, le grand Roméo tire et gâche ses munitions bêtement. C'est une vraie brute, un homme qui est contrôlé par ses instincts plutôt que l'inverse. Malgré tout, le danger est certain, et il fera probablement tout pour mettre la main sur Atridès. Plus loin, l'autre lève un sourcil et commence à crier :

Attends ton tour, toi ! Je m'occupe du fuyard. Et il se remet à chercher Mia derrière les caisses, les renversant à coup de pied.

De l'autre côté de l'île, à l'est, Thomas arrête de tirer pour contempler la situation. Nos amis l'ont dans le dos, aussi ne le voient-ils pas, mais il leur crie :

REPLI ! Ne les engagez pas, on doit se replier ! Où est Mia ??

Plutôt soulagée par l'ordre donné par Tommy, Mia se glisse de sous le rebord du toit jusque sur le toit dès que le ravageur lui tourne le dos et elle rampe rapidement sur la hangar dans la direction du sous-marin.

Pour se replier jusqu'au sous-marin, Atridès constate qu'il va devoir traverser une bonne zone à découvert. Avec le malade mental qui canarde, ça va être dangereux.
Aussi, il décide de tenter de se débarrasser du "petit" maraudeur. Celui qui donne les ordres. Le "gros" risque de paniquer, de nouveau tirer partout et il ne doit plus avoir tant de munitions que ça.

Prenant son couteau par la lame, celui qu'il avait récupéré dans la station et qui lui servait à vider les poissons, Atridès se relève de derrière les caisse, et le lance. Il part en tournoyant vers sa cible.
Le théopolien se remet à couvert juste à temps pour esquiver la prochaine volée de tirs. Il ne voit pas si il a pu faire mouche, mais les cris du "petit" fusent alors sous le bruit de la mitrailleuse.

Et à ce moment là, la mitrailleuse s'arrête. Un juron, un bruit de mitrailleuse atterrissant sur le sol, et Roméo se met à beugler de rage. Ses pas se dirigent rapidement vers le couvert du théopolien.

Le ciel se couvre alors, cachant la lune.

De son côté, Mia a pu aller de l'autre côté du bâtiment, et elle a alors un point de vue imprenable sur la scène : Les ravageurs commencent à s'engouffrer par le trou derrière Atridès. Thomas arrive près d'elle et se met en joue pour couvrir le théopolien si besoin. Il la cherche des yeux, et on peut lire le désespoir dans ces derniers. Et surtout, elle peut voir au Nord, le catamaran s'avancer, tracté par le sous-marin. Lucy est donc prête.

Un des deux ravageur blessé, l'autre qui a vidé son arme, la nuit qui se fait plus noire... C'est le moment pour Atridès de se replier vers la zone prévue, tout en restant vigilant face à son poursuivant. Il peut voir s'ouvrir une partie de la palissade ; le catamaran qui les attend de l'autre côté doit être prêt.

Quant à Mia, elle bondit du toit pour atterrir près des deux hommes.

Lucy est prête. Elle nous attend.

Thomas ne répond pas à Mia faute de temps. Roméo arrive en chargeant, et il lui tire une rafale de balles en pleine tête. Les cris des ravageurs emplissent alors la nuit par dizaines, alors qu'ils foncent à travers le trou percé plus tôt. Thomas arrose en couvrant la fuite des jeunes, qui sautent prestement sur le catamaran.

Un homme se détache nettement dans la foule, qui passe devant tous les autres, torse nu, sans crainte. Et il semble savoir ce qu'il fait, car les balles de Thomas rebondissent sur sa peau comme s'il était fait d'acier brut.

Tu as été prévenu, petit homme ! Tout ce que tu as est à moi, désormais, et ta vie est finie. Ce soir, je violerai ta femme pendant qu'elle boira ton sang ! Tu m'entends, petit homme ? CE SOIR !

Thomas marmonne quelque chose, puis fait demi tour pour sauter à son tour. Derrière leur chef, les ravageurs ont pointé leurs armes, et un déluge de balles atteint le bâteau. Thomas écarquille les yeux sous le coup de la douleur, et tombe à moitié dans l'eau, le bras sur la coque...

Immédiatement Mia se précipite, oubliant les balles qui fusent autour d'elle, et attrape Thomas pour l'empêcher de sombrer.

Atridès !

Ehh merde ! Couche-toi, Mia !
Le jeune homme attrape d'une main le bras de Thomas, et de l'autre cherche dans l'eau une prise, une ceinture, son pantalon, quelque chose pour le faire basculer dans l'embarcation.
Il s'est arrangé pour se retrouver entre les tirs d'un côté, et Mia et Tom de l'autre.

Trois piqures distinctes viennent lui vriller l'épaule et le dos, mais il parvient sans mal à faire monter Thomas qui, s'il n'avait pas été là, courrait à une mort certaine. Tous trois restent un moment là, à terre, tandis que les balles fusent.

Mia peut entendre le chef des ravageurs leur hurler de fouiller l'île ; ils ont gagné un temps précieux, car s'ils avaient poursuivi immédiatement, la situation serait devenue tendue.

Les deux hommes saignent, mais la douleur n'est pas vraiment intense.

Tom ? Tom ? Vous avez piégé l'île, c'est ça ? , dit-il en observant les blessures de Thomas. Il est finalement moins blessé qu'Atridès, qui, une fois qu'il se meut, commence à ressentir la douleur. Il a juste un peu de mal à respirer.

Du point de vue de Mia par contre, c'est une série de trois flots de sang et des blessures assez sales, sans point de sortie : les projectiles sont encore dans leurs corps.

T'en fais pas... Lucy a le détonateur. Mia, tu sais où est la trousse de premiers secours, je t'ai montré avant hier. Tu peux... Aller la chercher ?

Oui ! J'y vais tout de suite ! s'exclame Mia en filant chercher la trousse de soin.

Sur l'autre bout du catamaran, Jake regarde vers l'île, et une minute plus tard, plusieurs explosions se font entendre, puis la radio se met à bipper.

Tu sais faire les premiers soins, Mia ? Occupe-toi de Tom, dit-il sans attendre de réponse à sa question.

Je prend la radio, Lucy m'a expliqué comment ça marche... Dont acte. Atridès a un peu de mal à se souvenir de tout, mais il finit par appuyer sur les bons boutons.

Thomas ? Tom !? Tout va bien ? On a tout le monde ?

Euh, c'est pas Tom, c'est Atridès. Tout le monde est là, Mia est indemne, Thomas et moi on est légèrement blessés par leurs armes à projectile. Rien de trop grave.  

D'accord. Je vais avoir besoin de toi, soldat. Je n'ai pas de visuel. Il faut que tu me préviennes sur ce canal, dès qu'ils approcheront de trop près. Pendant que vous assuriez la défense là-bas, j'ai déposé sur leurs navires principaux des explosifs et des ... bah, laisse tomber, on va dire des explosifs. Je peux les faire pêter à tout moment, mais il faut encore attendre au cas où. Prenez soin de Thomas, il va faire celui qui n'a rien, mais je n'ai que lui au monde, okay ?

Ça marche !

Pendant ce temps, Mia trouve dans la trousse des items qu'elle ne connaît pas bien, mais il y a des pansements, une bombe de spray cicatrisant, des pinces métalliques, une seringue, des médicaments de diverses formes... Et tout un tas de choses inidentifiables.

Ca va aller, chaton. Pique-moi juste avec la seringue, une seule fois, pas trop près mais pas trop loin de la zone touchée. Lucy fera le reste plus tard. Et si je m'effondre, pas de panique. C'est juste un anesthésiant, mais on en a peu. Et il en faudra pour Atridès.

D'accord, fait Mia, pas trop rassurée mais s'exécutant de son mieux.

Atridès, les ravageurs nous suivent ?

A ce qu'ils peuvent voir, il leur reste une dizaine de navires, surtout les plus gros : Les explosions sur l'île ont dû être dévastatrices et réduire leur nombre drastiquement. Mais il doit y avoir un peu d'ordre dans leur barbarie, car ceux qui pilotent semblent ne pas être descendus des bateaux. Ces derniers ont fait le tour du brasier fumant, et entamé la poursuite. Mais Lucy a un temps d'avance, et se dirige vers les huit piliers...

Oui, mais ils sont encore loin...

Atridès, on arrive près de l'endroit où vit la pieuvre !

Ah. Et donc, on fait quoi ? demande le théopolien en rejoignant Mia et Tom. Ce dernier, allongé au sol avec le dos sur la paroi, garde le sourire en partie gràce aux anesthésiants, mais aussi pour conserver le moral des troupes intact, Atridès le voit bien. Il n'a jamais du diriger d'hommes, mais il sait ce qu'il faut dire. Un militaire.

Vous, rien. En fait, si. Mia, tu vas devoir décider pour Atridès. Il est salement blessé, et l'anesthésiant va le ralentir mais lui faire oublier la douleur. Ca va s'ouvrir s'il force. Alors je veux que tu assures sa protection, et toi, Atridès, tu vas obéir à Mia. Vous vous protégez l'un l'autre. On a nos soniques d'allumés. Ça sert aussi pour se localiser, et localiser les fonds et les bateaux proches. Donc on sait qu'on va aller au dessus de la pieuvre, mais l'idée c'est de saboter leurs vaisseaux à couvert de bonne distance. Et laisser la pieuvre faire le travail. Je crois que toi, tu dirais qu'on les laisse à Poséïdon. Ou Neptune ? Je ne sais jamais lequel c'est. Et on devra affronter ce qui restera. tôt ou tard.

Le vieux grincheux barbu, Maître des Océans, c'est bien Poséïdon.
Par contre, je ne veux pas d'anesthésie. A chaque fois qu'un de mes potes a eu droit à ça, il s'est réveillé avec une jambe ou un bras en moins. Dans le meilleur des cas... J'ai pas trop mal, ça va aller. Leurs armes, c'est de la camelote !

Par contre, je veux bien que Mia veille sur moi. Je ferai attention à elle aussi, bien sûr.
Et elle me prend en main quand elle veut... Petit sourire lubrique, qui s'estompe quand il tourne le visage vers elle et la détaille des pieds à la tête. 'Fin, quand tu seras un peu plus grande. Désolé, petite.

Pour leurs bateaux, Lucy les a piégés. Je lui demande de les faire exploser par radio quand on aura passé la pieuvre, c'est ça ?

...

En tout cas, pas de problème, je t'obéis, Mia. De toute façon, j'ai toujours été merdique en tant que chef... En tant que subalterne aussi, maintenant que j'y pense. C'est peut-être pour ça que je me ballade toujours seul, d'habitude.

C'est moi qui doit donner les ordres ? Heu... C'est que... Je n'ai jamais fais ça. J'obéis, d'habitude.

Et puis... Je ne sais pas vraiment quoi faire. Comment est-ce qu'on peut désactiver leurs soniques ?

E.M.P.

Lucy l'a posé sur le plus gros bateau. Les autres restent toujours en formation autour de celui-là. Tu n'es pas obligée de donner des ordres, Mia. Ce garçon est plutôt censé ; mais prends-en soin, empêche-le de faire des choses insensées. Moi... Et Thomas sombre dans l'inconscience, les laissant entre eux.

Tommy !

Respire, Mia, respire.

Bon, on a un E.M.P. Reste à se souvenir exactement où le déclencher... Oui ! Les soniques vont détecter les piliers. Atridès, tu peux t'occuper de Tommy, s'il te plait ? Je vais m'occuper des soniques et de la radio, d'accord ?

Parfait ! A tes ordres, sergent Mia ! , répond Atridès avec un bon sourire. Sourire un peu forcé, il faut bien le reconnaître. Il souffre de ses blessures, même s'il n'a pas voulu l'avouer.

Atridès commence à basculer Thomas sur le côté : personne n'a envie qu'il avale sa langue... Puis il fouille dans la trousse médicale. Il n'est pas soigneur, loin de là, mais il a vu beaucoup de blessures, et il sait ce qui doit être fait pour donner un peu plus de temps aux médecins pour intervenir. Désinfecter si on peut. Il renifle quelques fioles, mais ne sent pas d'alcool, donc il passe aux pansements. Empêcher trop de sang de sortir...

Une fois arrivés sur la zone des piliers, La radio se remet à sonner et Lucy le leur annonce, ce qui est bien, car dans le noir, impossible de savoir. Par contre, Mia voit clairement que les ennemis approchent à grands pas. Le sous-marin est lent, freiné par son bagage.

Le moment venu, Atridès signale Lucy, et on entend un étrange son suivi de sept petites détonations. Sept bateaux coulent, et il n'en reste plus que quatre. Le grand convoi, deux zodiacs et une sorte de voilier de belle taille. Excepté ce dernier, tous s'arrêtent, leurs machines étant désactivées. Les flots commencent à s'agiter.

D'énormes tentacules viennent claquer partout sur la surface de l'eau, provoquant des remous qui envoient volent les petits bateaux tandis que deux tentacules attirent le gros sous les flots. Le voilier est renversé comme un fétu de paille, et le catamaran menace de sombrer à son tour...

De justesse, Atridès se rattrape sur sa lame en la plantant dans une paroi, alors qu'il cherche un cordage pour se retenir.

Mia, elle, se retrouve jetée en l'air, tout comme Thomas et Jake. Le premier vole un instant près de Mia. Elle pourrait probablement s'accrocher à un cordage, mais pas Thomas qui est inconscient. Si il tombe à l'eau, c'est fini pour lui, alors Mia fait la seule chose qu'elle peut faire : Elle pivote en l'air, prend appui des deux pieds sur Tommy, et pousse de toutes ses forces, en espérant qu'elle parviendra à l'envoyer dans l'écoutille du bateau restée ouverte. Cela la propulse en arrière, loin de tout appui.

Jake vient rebondir sur Atridès qui pourrait le rattraper mais la douleur vrille son bras gauche... C'est le chien, ou lui.

Le jeune théopolien est sûr d'être un demi-dieu, et de ne rien craindre. A part peut-être la colère de ses parents, oncles et tantes, frères et sœurs, cousins et cousines. Il imagine que Jake est de la famille, que lui non plus ne risque rien, mais il n'en est pas complétement sûr, donc... Le chien avant lui.
Il bloque Jake pour le faire retomber sur les filets du catamaran, et pour lui... Eh bien, il fait son maximum pour ne pas finir à la flotte, mais c'est peine perdue ! Il voit le chien tenter de se dépêtrer des filets tandis que le bateau tangue dans l'autre sens, l'empêchant de retomber où il l'avait prévu.

Il s'accroche du bras droit, mais la rambarde humide est glissante, et d'un coup le voici dans l'eau. Au loin, il peut voir la bête débattre ses tentacules dans son imposante immensité. Le bateau principal des ravageurs est en train d'être déchiqueté dans tous les sens, et il peut apercevoir quelques lumières portées par des nageurs improvisés. Mais la bête est précise, et les fauche un par un, et seuls quelques heureux arrivent jusqu'à la surface, survivants pour le moment à la furie de la nature.

Quand Atridès remonte enfin, le catamaran est toujours aux prises avec les vagues. Pas très loin de lui, la tête de Mia émerge également des flots.


Le sous-marin remonte alors, et rapidement, les deux sources se retrouvent sur sa carlingue plate, et l'on voit apparaître les chaines qui retiennent le catamaran. Une écoutille s'ouvre tandis qu'ils montent, et Lucy arrive.

Ca a marché ? Sur le sonar, on dirait que oui...

Mais à la surprise de tous, le voilier, lui, a résisté. Par contre, il semble avoir abandonné l'idée de les poursuivre et a viré à tribord pour éviter la mort par pieuvre géante.

Tous regardent la scène, tandis que les eaux se calment petit à petit. Ils ont vaincu une bonne centaine de personnes. A quatre.

Et puis Lucy s'approche du catamaran, et va chercher son mari.

Tout le monde va bien ? Et maintenant ?

J'imagine que l'on va s'occuper des blessures, et mettre une bonne distance entre nous et eux...

Oui, allons panser ces blessures et trouver une terre hospitalière, mia, tu viens m'aider à transporter Tom ?

Rrrrr.... Grogne le chien, en regardant vers les piliers. Puis sa tête semble suivre une trajectoire vers le sous-marin, et soudainement, ce dernier se cabre comme un cheval effrayé, fait de métal tordu. Le bruit de l'explosion ne se fait entendre qu'à ce moment-là.

Le sous-marin emporte dans son élan le catamaran, qui manque de chavirer mais se rétablit assez vite. Habitués, les passagers parviennent à ne pas retomber à l'eau. Mais Le sous-marin se met à sombrer, et il est accroché au bateau, par ces chaînes...


Oui, je sais, Jake : je suis d'accord avec toi... On ne peut pas être tranquille trente secondes, ici ! Et Atridès utilise la solution de facilité. En fait, c'est quasiment toujours celle qu'il utilise en premier. Après, on voit... Il sort son glaive, avance vers la chaîne, lève son arme au dessus de sa tête, et l'abat de toutes ses forces en hurlant.
RHHHHHAAAAHHHHHHH ! Et encore, s'il faut. Et encore une troisième fois, toujours au même point faible qu'il a estimé. La douleur s'amplifie, et le sang se met à couler de plus belle sur son dos. Il frappe comme un forgeron écraserait son marteau sur une pièce de métal posée sur l'enclume.

Lucy laisse Thomas, et sort un pistolet qui crache un faisceau de lumière sur les chaînes. Lorsqu'elle les touche, elles mettent quelques secondes à fondre. Atridès Obtient un résultat moins simple, mais le temps presse et à deux, ils pourraient y arriver.

Impuissante à aider Atridès et Lucy, et voyant que tous les autres sont encore sur le bateau, Mia fait la seule chose qu'elle peut faire : Elle grimpe rapidement au sommet du mât pour tenter de voir quelque chose sous leau et surveiller les ravageurs. A peine grimpée à la moitié du mat, ses yeux s'écarquillent : Une main est venue se poser sur le flanc du bateau, puis une autre. Elles sont larges et noires, et la seconde se pose lourdement sur le pont, équipée d'un appareil de propulsion marine - c'est le chef des Ravageurs !


Je vous avais prévenus ! Votre vie prend fin CE SOIR ! Mais désormais, vous partirez dans une lente agonie, l'un après l'autre. Et vous, enfants, si vous vous rendez, vous pourriez survivre.

Lucy n'attend pas un instant ; dès qu'elle réalise qui est sur le catamaran, elle abandonne la dernière chaîne pour tirer directement dans la poitrine du barbu. Le rayon semble s'écraser sur le torse du géant, se changeant en fumée à son contact. Jake est en position, la tête au sol, babines retroussées, les pattes tendues et prêtes à sauter.

Mia coupe une des cordes qui montent au mât d'un coup de griffes et la jette à Atridès.

Attachez ça à la chaîne et coupez-la !

Et elle saute pour atterrir sur le pont face au colosse tout en repérant bien où est l'autre extrémité de la corde.

Jake et moi on va le distraire ! Criez quand ça va céder !

Jake a très bien compris quel était son rôle. Il saute de droite et de gauche en groûlant, vers le géant qui n'en a cure. Alors qu'il avance, le chien se jette à son molet, et se fait emmener tant l'homme ne réagit pas à sa présence.

Atridès ne comprend rien du tout à ce que Mia veut faire, mais il s'exécute. Il attache rapidement la corde à un maillon de la chaîne, puis recommence à frapper de plus belle sur cette dernière.

Dans moins de dix secondes ! Et après, je viens mettre une fessée au guignol...  Il a beau faire le fier, son bras et son dos lui font de plus en plus mal, et il sait par expérience qu'il ne va pas tenir très longtemps comme ça. Mais il lui restera surement assez de force pour entraîner ce type avec lui au fond des océans...

Alors qu'inexorablement, le ravageur avance vers Lucy qui se refuse à bouger, faisant barrage de son corps à son époux inconscient...

Mia coupe et attrape l'autre bout de la corde et vient se mettre devant Lucy, en veillant tout de même à rester juste hors de portée de bras du colosse. Même si elle n'a jamais insulté personne de sa vie ou presque, elle connaît quelques jurons et lui en lance un qu'elle a entendu au cirque... qu'elle ne le comprend pas totalement.

Hé, sac de bites ! T'as l'air fort comme un chêne, mais en fait c'est juste que t'as une tête de gland, non ?

Petite fille, tu ne sais pas à qui tu t'adresse. Je suis Sunu l'intouchâble ! Mon sang ne coule que si je le désire. Et les hommes se plient devant moi, de gré ou de force. Je suis l'antéchrist. Je suis le fils du diable en personne, je suis l'alpha et l'oméga, je suis....


...Capable de tenir un monologue très longtemps, assez pour qu'Atridès en finisse avec la chaîne, semble-t-il.


Fini ! Crie Atridès à Mia deux ou trois secondes avant de libérer la chaîne. Sans se retourner vers le "diable" :

... Toi, tu es une petite merde ! , dit-il en le coupant. Le fils d'un sous-fifre rejeté par son dieu ! Oui, il a entendu parlé de certaines religions terriennes.

Moi, je viens de la Terre des Dieux. Moi, je ne suis pas un imposteur. Moi, je suis un fils de Dieu. Fuis, pauvre Mortel ! Atridès avance vers lui, le regard dur, le sabre au clair dès que l'amarre est détruite.

Quant à Mia, dès qu'Atridès a crié, elle a couru droit vers Sunu et fait mine de sauter pour en fait se laisser glisser et passer entre ses jambes. Mais le sol mouillé ne glisse pas assez et le géant la voit venir ; il pose son pied sur son estomac, et force un peu pour la maintenir au sol. Tout l'air présent en Mia semble s'écouler en un seul souffle.

A qui crois-tu parler, avorton ? A ces mots, il se remet à avancer vers Lucy, mais le chien à sa jambe semble l'ennuyer, et il tente d'agripper Jake par le col. Mais ce dernier lui lâche la jambe et esquive sa main, de justesse.

Pour Atridès, le temps semble ralentir.  

Pfffff... C'est encore pour ma pomme, tiens... Aller, voyons voir si vraiment tu ne saignes pas !

Atridès avance vers lui pour l'empêcher d'atteindre Lucy. Il fait tournoyer sa lame dans le but de focaliser l'attention du colosse sur son glaive, mais il compte bien lui décocher à la place un puissant coup de pied chassé destiné à l'envoyer par dessus bord. Le ravageur ouvre les bras et bombe le torse, laissant une ouverture totale au théopolien. Son bras armé se lance vers l'arrière, ce qui accompagne le coup de pied à merveille. Le nubien accueille le coup de pied sans heurt, sans recul, rien. Atridès se serait presque fait mal au pied. Mais au moment du contact, tous les belligérants entendent un étrange "pop". Un bruit minime, mais clair et sec, qui n'a pas sa place à l'issue d'un coup de pied.

Le ravageur fronce les sourcils, conscient que ce bruit vient de lui.

L'autre bruit qu'on entend est celui d'une corde qui se déroule de plus en plus vite. Une de ses extrémités est tirée vers le fond par la chaine brisée, elle-même reliée au sous-marin en perdition. L'autre extrémité... Eh bien quand le colosse l'a plaquée au sol du pied puis a été distrait par Jake, Mia l'a nouée autour de sa cheville sans même qu'il s'en rende compte.

Pfffff... Ce coup-ci, je vais vraiment prendre cher. Ils ont intérêt à me remercier dignement quand je me relèverais d'entre les morts. Lucy va devoir me faire de bon petits plats, et en quantité... Si elle s'en sort. Évidemment, Atridès n'a pas fait attention à la corde nouée par Mia. Il est plutôt concentré sur son adversaire.

Bon, mon pied ne suffit pas pour toi... J'aurai cru. Passons à l'épée, Mortel. Et ce coup-ci, il frappe du glaive. Fort. Il vise le même endroit, le torse. Mais le bruit de corde filant contre le sol devient sec et tendu, et le ravageur n'a que le temps d'écarquiller les yeux avant de se faire tracter à toute vitesse vers le fond, suivant le sous-marin qu'il avait lui-même coulé. Le voilà entraîné par dessus Mia, Il se cogne dans Atridès qui n'arrrive pas à porter son coup correctement, mais qu'à cela ne tienne : Le géant est en mauvaise posture. Il tente tant bien que mal de se retenir à la rambarde avec ses pieds ; mais le poids le fait pivoter vers l'océan, et dans un grand plouf, le silence retombe à nouveau.


Tous essoufflés, les trois survivants éveillés se regardent, pris de fatigue, de douleur, mais aussi de soulagement.

J'ai loupé quelque chose ?

Kof, kof ! tousse Mia. Quelques péripéties, mais tout va bien, maintenant.

Elle tente de se relever malgré la douleur lancinante dans ses côtes.

Bien joué, petite ! C'était sacrément malin, et je n'ai rien vu venir... Tu m'as évité pas mal de coups dans la tronche !

J'imagine qu'on va devoir se contenter du catamaran, Tom. On a perdu le sous-marin. Lucy explique, devant la face de son mari affichant une incompréhension mêlée aux effets de l'anesthésiant : On s'est aussi débarassés de Sunu. On a vaincu les ravageurs. Mais si elle semble fière, elle n'a pas l'air soulagée pour autant. Il faut vous reposer, vous soigner, et remettre le bâteau en état. On va dériver un moment, et avec tous les impacts... J'espère que les systèmes n'ont rien.  

Cet engin est blindé, chérie. Ca va aller.

Bah pas les voiles.

En effet, les trous sont légion et les voiles auront besoin de réparations.

Des voiles, ça va, c'est pas ce qu'il y a de plus difficile à réparer. Mais une ou deux petites heures avant pour soigner mes blessures. Et il s’affale confortablement dans les filets...

Heu... Vous êtes sûrs qu'il ne risque pas de remonter, l'autre ?

Il est réputé pour être invulnérable, mais même s'il survit, on dérive encore alors il n'aura probablement pas moyen de nous rattraper.

Et en effet, la fin de la nuit se passe sans heurts. Les moteurs n'ont pas été touchés, et Thomas ne plaisantait pas en parlant du blindage de l'appareil. Seules les voiles ont subi des dommages, et le catamaran repart donc et l'équipée met le cap au Nord. Après une séance durant laquelle Lucy retire les balles du dos d'Atridès, ce dernier et Thomas finissent par dormir, pendant que les filles remplacent les voiles et jouent aux cartes. Au lever du soleil, Mia n'a plus mal aux côtes, et Atridès pense n'en avoir que pour un jour ou deux à garder le bras gauche dans un linge.

Puis les garçons prennent en charge la matinée. Thomas prépare les filets de pêche, et Atridès l'aide ensuite à faire l'inventaire pendant que les filles vont dormir.

Tu sais, gamin, c'était très con ce que tu as fait pour m'aider. Merci. Je crois sincèrement que je serais mort, sans toi.

Bah, c'était aussi pour Mia. Et puis on est sur le même bateau, faut se serrer les coudes... 'Fin, évidemment qu'on est sur le même bateau, c'est une expression !

Cette image devait bien prendre son origine quelque part. Ecoute, Atridès, à ce sujet, je voulais te dire... Il est possible qu'on tombe sur un assassin d'ici à notre arrivée au complexe du sélénium. Il n'en a pas après vous, alors si jamais moi et Lucy, on se retrouvait en danger à nouveau, je ne veux pas que tu recommences à jouer les héros. Tu comprends ?

Vous n'avez pas à encaisser nos balles.

... Huuuumm...

... Oui, je comprends. Mais toi, il y a un truc qui t'échappe. C'est pas grave, tu vas vite t'en rendre compte. Atridès aide activement pour les filets : et il a une bonne raison pour cela ! Il sait très bien que "lancer des filets" implique "ne rien faire" pendant un bon moment, après !
'Faut bien que les poissons arrivent...

Dis, tu voudras bien changer mes bandages, avant que les filles se lèvent ? Comme ça, il comprendra.

... Et vu qu'on n'est qu'à deux, tu me parles de cet assassin ?

Ouais. Ouais... C'est pas évident, quand j'y pense. On ne l'a vu que deux fois. Une fois, de très loin, et on a fui. La seconde fois c'était durant une mission sur Lemnos, une petite planète à la lisière de la fédération. Pas si loin. On devait capturer un gros producteur de drogue.

Il ne paie pas de mine, c'est un homme moyen. Pas grand. Pas l'air costaud. Pas d'arme favorite. Et rares sont ceux qui l'ont vus et sont restés en vie pour le décrire. Il est brun, à priori. Cheveux courts. Pas de cicatrices apparentes. Il aime le noir et le blanc, parle peu. Et il est réputé pour aller au bout de ses contrats, ce qui doit l'ennuyer dans notre cas, vu que ça fait six ans qu'on lui échappe. On ne sait même pas lequel de nos anciens ennemis aurait pu placer ce contrat.

Et pourquoi vous en avez aussi peur ? Tu viens de me décrire un monsieur "tout-le-monde", sauf qu'il est plutôt acharné.

C'est surtout un homme qui tue sans jamais échouer ; si on est encore en vie, c'est qu'il n'a jamais eu l'occasion de nous approcher.  On est les seuls encoreen vie après l'avoir vu, et ça ne doit pas lui plaire. On a peur de lui parce qu'on est des pros, et même pour nous, sa réputation fait froid dans le dos. A tel point qu'on nous a retirés du service. Le Sélénium ne met pas ses agents à la retraite comme ça, c'est du jamais vu.

Donc, il y a un assassin motivé qui est après vous, il n'aime pas qu'on puisse le reconnaître, et donc il ne laisse pas de témoin. Et nous, on est collé à vous...

Ça va être des vacances ! , dit-il allongé sur le filet du catamaran, regardant le ciel étoilé.

Wow. Ta plaie est pas si grave que je pensais, en fait. Elle t'a retiré les balles, pourtant. La plaie devrait être ouverte...

Je me rétablis vite. C'est pour ça que j'ai fait écran, c'est pour ça que je me suis mesuré à Sunu, Sutu, je ne sais plus... Le chef maraudeur, on va dire.

Je ne risque pas grand chose. Je suis un... Héros, sur Théopolis. Si j'étais un simple mortel, j'aurai pris mes jambes à mon cou, tu sais ?

Mais ça reste injuste. Et si tu... Attends un peu. Mia et le chien sont comme toi, aussi ?

Ça, faudra leur demander toi-même, Tom. Mais c'est une bonne question...

Vous... Vous n'avez pas survécu par miracle au crash... Vous êtes d'entre eux. Qu'est-ce qui vous a amenés sur la station, au juste, tous les trois ?

Moi, je suivais une jolie petite égérianne. Ses cheveux, son sourire, et avec un de ces beaux petits culs... Tu n'imagines pas !

... Jake, il était avec sa famille d'adoption. Ce sont eux qui ont eu un problème en premier lieu. Et Mia, elle travaillait pour un cirque, qui était sur place.

C'est le destin, tout simplement, tu sais ?

Tu sais quoi ? Je ne crois pas au destin. Vous, ici, maintenant ? Vous nous avez autant aidés que, j'espère, nous vous avons aidés. Il y a peut-être des destinées, mais pas de destin.

Je ne suis ni prêtre, ni philosophe, je ne peux pas argumenter sur le "destin".
Je suis pas non plus très éduqué, pas très malin, je suis un gros branleur, mais je sais quand il faut se serrer les coudes. C'est normal, en temps de guerre.

Après on repartira tous de nos côtés... Et on verra bien. Mais il faudra que vous preniez soin de Mia. C'est une chouette gamine qui en a chié dans la vie, et elle sera vraiment très bien avec vous. Jake aussi.
Lucy cuisine bien, elle est gentille et attentive, toi, tu es marrant et solide. Ça sera bien pour eux.

Tu crois vraiment qu'on va faire ça ? On a pas une vie faîte pour jouer les nounous. Tu peux trouver mieux que deux agents poursuivis par un assassin, mon garçon.

A ce moment, Jake relève la tête. Une des filles se réveille, semble-t-il.

Quand Mia se réveille, la mer a disparu. Le catamaran est arrêté au bord d'une grotte merveilleuse, aux couleurs rayonnantes ; la lumière vient de percées au plafond, et de l'eau s'écoule d'entre les rochers arrondis, empilés les uns sur les autres. L'endroit semble immense, même s'il est bas de plafond. Et au loin, se trouve une silhouette de petite taille, enroulée dans des écharpes et autres manteaux, qui ne fait pas très attention à elle, et gravit les rocher en silence, doucement.

Waouh ! C'est vraiment magnifique !

Chaque goutte qui tombe dans l'au fait un bruit éthéré, et fait écho dans toute la grotte. L'étranger avance en marquant fréquemment des pauses ; il cherche à droite et à gauche, et se penche occasionnellement pour regarder sous les pierres. Un instant, il se retourne, le visage dans la lumière, et Mia sait qu'elle le connaît, tout en étant certaine de ne jamais avoir vu son visage.

Ah, te voilà.

Heu... Désolée, dit Mia avec gène, j'ai l'impression qu'on s'est déjà rencontrés, mais...

Manifestement le jeune homme n'est pas surpris.

C'est ton rêve qui fait ça. On ne s'est jamais vus. Ici, les lois sont différentes de celles de la vie éveillée. Quel est ton nom ? Moi, tu peux m'appeler Traum.

Bonjour, Traum. Moi c'est Mia.

Où est-on, exactement ?

Bah, dans ton rêve. Ca doit être un endroit important pour toi, ou un souvenir lointain. Parfois, c'est l'avenir. On rêve du futur plus souvent qu'on ne le pense. Je crois que c'est parce que notre cerveau n'est pas fait pour percevoir le temps de façon linéaire, il... Oh, pardon, je me suis encore mis à divaguer. Venons-en au fait, je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir maintenir la connexion.

Mia, les tiens ont besoin de toi. Je suis venu voir si tu veux qu'on vienne te chercher.

Les miens ? Mais... Je n'ai plus personne, moi. Je ne comprends pas, désolée.

Oui, j'imagine, tu es apparue comme ça, déjà adulte, c'est rare. Je fais partie d'un groupe de jeunes stellaires. L'un de nous est comme un radar, il peut sentir nos semblables sur des distances folles. Il m'a indiqué ta position, et j'ai navigué jusque dans ton rêve. Ca a mis un peu longtemps, mais me voici. On réunit tous nos semblables, parce qu'on nous poursuit. Et ceux qui nous pourchassent pourraient s'en prendre à toi, aussi.

Désolée, je dois être idiote, mais... Je ne comprends pas la moitié de ce que vous dites. Ce... C'est quoi, un stellaire ?

C'est comme ça qu'on appelle les gens comme toi et moi. On a un pouvoir énorme à cause de l'énergie stellaire en nous, comme... ... ... Et c'est comme ça que ... ... ... Tu comprends ?

C'est dur de dire s'il le fait exprès ou non, mais ce Traum a un problème de connexion.

Désolée, mais je ne vous entends plus très bien. Vous dites qu'Atridès a raison ? Qu'on est devenu des sortes... heu... de dieux ?

Mia se sent un peu bête d'avoir posé cette question, mais trop tard. Parfois, la bouche de Traum bouge juste sans paroles.

.... des interférences.... Commun... Le... grave.... dire.... puissant qui m... avec toi. Il a d'abord l'air ennuyé, puis semble souffrir ou lutter. Son visage se crampe, sa main se lève, et il disparaît. Mia se retrouve seule dans la grotte.

Mmmm... C'était vraiment bizarre. On dirait qu'il essayait de me dire quelque chose d'important...

Et du coup, elle commence à admirer la grotte. Celle-ci est magnifique, et chaque rocher est d'une couleur unique. La lumière est chaude, l'eau est claire, et à mesure qu'elle avance, la grotte devient plus étroite, et puis s'agrandit de nouveau. Plusieurs couloirs partent de gauche et de droite. Cependant, Mia remarque avant l'embranchement une couverture et des bols de pierre, manifestement taillés dans les roches locales. Certains sont placés spécifquement pour récolter l'eau de pluie avant qu'elle ne tombe par terre.

Le seul son local, c'est le bruit de l'eau, qu'elle coule ou qu'elle tombe goutte à goutte. Tout cela est fascinant de réalisme. Par contre, Mia commence à se sentir fatiguée, aussi elle va s'allonger sur la couverture pour dormir un peu, tout en se posant une question inédite : "Est-il possible de rêver dans un rêve ?"