Atridès - La Planète Perdue

A peine ont-ils quitté l'équipe de Mia que l'ambiance change sur le vaisseau. Le doc, occupé entre Adam, le fils sans nom de Vadran, et l'appareil à gérer, pare au plus pressé. 

Le Sigma change de cap et met des voiles figuratives vers Eol Prime. Atridès a pu en apprendre plus sur "les bleus". Leur peuple a oublié son origine dans leur guerre éternelle, mais d'après les sources du théopolien, leur oubli ne peut pas dater de plus de deux cent ans, puisque Circé n'était pas dans leur galaxie. Actuellement, au plus haut de leur pouvoir, ils détiennent trois planètes habitables dans trois systèmes très proches les uns des autres, trois planètes que visent les rouges pour une raison indéfinie. 

Eol Prime est à la fois leur planète principale et le terrain le plus ravagé par les assauts incessants de bataillons qui se téléportent de façon semi aléatoire une fois que les étrangers mettent pied sur la planète en arrivant du ciel. Pendant les réunions suivantes, Ausbund prend en charge l'explication des données militaires, les holotrucs et les cartes. Addie Stark est très vive mais pose beaucoup de questions avant de se retrancher en râlant chaque fois qu'un Eol est incapable d'expliquer en détails une chose qui la perturbe. Quand Atridès les regarde, il voit Arès en Stark, et Athéna en Ausbund. Jake ne dit trop rien depuis la réunion. Il semble perturbé et exceptionnellement, il passe du temps en salle holographique.

Il leur reste cinq jours de route...

Atridès passe du temps à continuer d'en apprendre plus sur les Eols. Entre autre sur leurs liens avec les "Circéens", les Rouges. Avant que Circée arrive. En fait, il s'intéresse surtout à ce qu'il y avait avant l'arrivée de Circé. Malheureusement, les Eols ne sont pas intéressés par l'histoire, et ne sembelnt pas avoir accès à un long historique de leur espèce, ce qui est franchement perturbant.

Il passe aussi un peu de temps à modérer Ausbund et Stark, quand ils abusent trop de leur statut. Ce qui n'arrive pas vraiment. Ausbund est tellement prévenant qu'il éest difficile de lui reprocher plus que des avis très tranchés. 

A un moment, il retrouve Jake dans la salle holo...

Qu'est ce que tu fous là, tout ce temps, mon pote ?

Comme les deux autres, je m'entraîne. il faut que j'arrive à dépasser mon nombre de doubles.  Ou quelque chose. Je sais pas. Une chose pour battre les gens sans qu'ils saignent.

Quoi ? Je suis le seul à ne pas avoir commencé à m'entraîner ? Merde, alors...
Bah, je vais m'y mettre, donc... Je vais peut-être aller voir le Doc, alors. Il pourra peut-être m'aider à comprendre ce que je sais faire, et donc en faire plus !

Je sais pas trop si j'ai besoin de lui. Dis, tu sais lire, toi. Tu peux me dire ce que ça dit, le papier qui sent comme Ausbund et Stark ? Ils ont posé ça sur le mur.

Après inspection, sur le mur près de la console de la salle holographique, quelqu'un a déposé une affiche représentant un emploi du temps sur deux semaines. Tous les jours à 18h, il est juste écrit : "Combat à mort".

Ah putain ! Nan, mais c'est pas vrai ! Ils vont continuer leurs conneries...
Atridès explique à Jake ce qui est écrit.

'Fait chier. A 18 heures, 'faudra que je sois là-bas. Pas envie qu'un débile tente sa chance face à eux. Pffff...

Je serai là. Vas voir le docteur, plutôt. Je veux bien mourir pour l'entraînement.

Nan, nan, nan... Je vais voir le doc', ouais, mais je te rejoins avant 18 heures. T'y vas pas seul. Ça fait pas mal de temps qu'on bosse à deux, non ? On fonctionne bien, non ? Alors on reste à deux...

Oui oui... Je suis juste inquiet. Et on ne sera pas tout le temps à deux au bon moment. Je crois que ce serait bon de savoir que je peux les battre seul.

Évidemment que tu peux les battre seul. T'es le meilleur.
Et puis, de toute façon, c'est pas eux, l'ennemi, non ?

... Mais c'est vrai que je préférerais qu'on soit à deux quand ils sont à deux. 'Fin, tu vois ce que je veux dire ?

C'est fou comme l'ambiance change sans Vadran à bord. Tous les gens sympa ou normaux chez les sources étant partis avec Mia, Atridès est rassuré de croiser des visages amicaux dans les couloirs du vaisseau. On lui indique que le doc est en rendez-vous médical avec Adam jusque 13h, ce qui lui laisse juste le temps de casser la croûte.

Ce qu'il fait accompagné de ses mortels favoris, avant de les laisser pour aller voir le doc, le ventre plein. Il y va lorsqu'il sent la source d'Adam s'éloigner, et le doc manque de le heurter car il regarde plus son pad que ce les géants sur son passage.

Oh ! Atridès. Parfait, parfait. Vous auriez un moment ?

Oui, bien sûr ! Justement, je venais vous voir...

 J'ai mille questions pour vous, j'ai peur que nous n'ayons jamais eu le temps de nous poser pour discuter. Voulez-vous bien venir avec moi ? J'ai une salle prévue pour ce moment précis. Ça ne devrait prendre que quelques heures.

Aucun problème. je devrai me rendre disponibe pour 18 heure, mais je suis tout à vous pendant ce temps ! Je vous suis...

 Alors finalement, vous pouvez m'expliquer de quoi vous êtes le dieu ? J'ai des notions de biologie divine, vous savez.

Ah ? C'est bien, ça... Moi, je ne sais même pas ce que c'est, la "biologie divine".
Et sinon, bah, tout le monde me pose toujours cette question : "de quoi tu es le Dieu ?". J'en sais rien, moi ! Je savais même pas que c'était obligatoire ! Il y a des gens qui m'appellent le "tueur de Dieu". Il y en a d'autres qui me prient parce que je les ai libérés. Et d'autres parce que je suis sympa. Il y en a même une qui me prie, juste pour baiser avec moi et communiquer...

Donc voilà, je sais pas trop...

 D'accord. Eh bien ce qui compose les gens humains, c'est de la chair. La chair est composée des traits de nos parents, on les appelle "gènes". Le gène des cheveux blonds, des yeux verts, un gène peut être déficient et mener à des maladies chroniques de famille. Tu me suis jusque là ? Eh bien les dieux, eux, voient leurs gènes créés par une matérialisation physique de l'inconscient collectif. Les demi-dieux ce n'est pas si rare que ça, tu sais. Les dieux sont souvent réputés pour leur libido. Les demi-dieux tirent leurs gènes principaux de la mère. Les gènes hérités du père se manifestent systématiquement. Ton père était Héphaïstos. Un dieu guerrier troublé et défiguré, mais à l'âme juste. Un artisan de génie et dieu du feu. Je crois qu'au moins un de ces traits doit t'avoir été passé. Il paraît que malgré tes talents de combattant et de forge, ton talent personnel serait la cuisine. 

Non ? Tu ne serais pas le dieu de la cuisine ? Bon, passons. Je peux avoir un de tes cheveux ?

Atridès s'arrache une mèche de cheveux et lui donne.

Ma mère, maintenant, je sais qui c'est ! Et si les "gènes" viennent d'elle en principal, alors... Je dois être un sacré dur-à-cuire ! Elle déchire tout ma mère, tu sais ? Pour mon père, eh bien, je sais forger et un peu tout faire. Je sais me battre. Je crois que je ne suis pas un trop sale type. Troublé, ça m'arrive parfois. Mais je ne suis pas défiguré !

Pour la cuisine, bah... C'est juste que j'aime bien. Et ça fait plaisir à tout le monde d'avoir un bon repas à partager, tous ensemble. Donc, ça me me fait plaisir de le faire.

Par contre, Dieu de la Cuisine... C'est naze, non ? Et puis, il y a déjà Athéna qui fait ça avec l'artisanat, et Hestia avec le foyer et tout ça...

Toujours ne marchant, Vells dépose les cheveux dans un appareil en forme de pince et le branche à son pad. Des images en résultent, et des centaines de lignes de charabia. Le doc lit ça comme si c'était la solution à son problème, et puis soudain, ses yeux s'écarquillent et ses sourcils remontent. Puis il les fronce et revient en arrière deux fois. 


 Tu es un mutant ? Enfin, je pose la question mais non. Tu es un mutant. J'imagine que ta mère aussi. Ou au moins une porteuse dormante. Il regarde Atrids des pieds à la tête, et semble se dire que c'est logique. Puis quelque chose le chifonne.


Alors... Quels sont tes pouvoirs, Atridès ? Tu es fort, d'accord. Endurant. Doué, mais ça c'est du talent et peut-être un don divin ou deux. Mais quels sont tes pouvoirs ? A part tout ça. JE n'en ai jamais vraiment entendu parler. Es-tu comme Ausbund ?

Euhh... Euuhh... Sûrement ! Je suis balaise, moi aussi ! Mais je suis pas homo. Un ange passe.
Ça veut dire quoi, Doc, être comme Ausbund ? Parce que, là, en fait, j'suis pas sûr que... Ça devait être une question plus technique, votre question, non ?

 Ausbund ne montre aucune capacité surhumaine. Même pas de télépathie. A peine une absorption d'énergie supérieure, mais c'est dû à l'entraînement, et Stark sait aussi le faire. Très intéressant d'ailleurs. Le souci c'est qu'il faut se soumettre des années à des chocs électriques pour en arriver là.  Mais bref, à part ses énergies qui sont à un niveau aberrant, Ausbund est normal. C'est rare chez une source, d'où ma question : En tant que mutant divin, tu dois bien avoir quelque chose qui te démarque ?

Oh, oui, bien sûr !

Déjà, on m'a déjà dit que j'avais une sorte de pellicule autour de moi. Qui arrête la divination, la sorcellerie, la magie, et surtout la magie divine. J'ai l'impression que je peux l'étendre, où même la rétracter. Mais je ne sais pas trop comment le faire.

Évidemment, il y a aussi tout les trucs avec les Dieux. Je peux communiquer avec ceux qui me prient. Je vois les âmes, je peux investir une partie de ma force dans quelqu'un, je crois... Passer les portes divines, aussi... Et sûrement d'autres trucs, mais je ne sais pas trop comment ça marche non plus.

... Ah ! Et oui, aussi ! Parfois, quand je me concentre très, très fort, mon corps, il... Mes muscles et mes tendons, ça se renforce... Je décuple mes forces. Mais après, je suis une loque !

 Oh. Eh bien cela nous laisse pas mal de choses à explorer alors. Je vais poursuivre l'analyse de tes gènes. Mais disons... à partir d'après demain, il faut que l'on se consacre une ou deux heures par jour jusqu'à votre arrivée sur Eol Prime. C'est faisable ? Par exemple... 14h à 16h ? Ça va me faire jongler avec mes obligations mais tant mieux, quelque part... J'ai vu en observant Vadran qu'il leur faut savoir se débrouiller seuls.

14 à 16 heures ? Ça me va parfaitement ! De toute façon, je n'ai pas tant de truc à faire que ça, donc... Bon, bah... A plus, Doc, je vais vous laisser pour aller voir Ausbund, Stark et Jake !

Il sort tout de même de son disque un plat avec une part de moussaka. 'Fin, une part pour Atridès. Celle-ci doit pouvoir nourrir une petite famille.

Ça, c'est cadeau, c'est pour moi ! Pour votre temps ! Mais je récupérerai le plat.

 Oh. Eh bien merci. Un peu surpris, il réagit rapidement aux émnations de tomate et d'olives et sort son propre disque de stockage pour récupérer le plat pour un moment approprié. Atridès le regarde ensuite repartir, le nez dans son écran, marmonnant de temps à autres un "Fascinant"...

A son arrivée dans la salle holo, véritable repaire des deux nazi, Atridès les retrouve avec Jake. De la salle de contrôle qui sert de sas, il peut observer le thème de leurs activités. A la surprise d'Atridès, Ausbund est face à une machine qui lui tire dessus à intervalles réguliers. Des balles de métal comme celles d'une arme à feu. Armé d'une épée qu'il tient horizontale entre ses deux mains, il les dévie. Mais il semble tenter de viser une cible située derrière la machine.

Stark s'acharne au corps à corps sur un robot d'entraînement plus rapide qu'elle en pestant contre l'idée qu'elle puisse manquer un jour de projectiles. 

Et Jake fait la course sur un parcours élaboré d'obstacles mouvants, de jets d'air ascensionnels, de lance-flammes et de chausses-trappes.

Salut ! Je ne dérange pas ? , dit-il en entrant dans la pièce.
Eh beh... Les bougres... Ils bossent respectivement sur les réflexes défensifs, le corps à corps, et la mobilité ! Ils sont sérieux, les loulous...
Atridès commence par retirer sa chemise.

Denk schnell ! 

La machine tire, Ausbund dévie le coup sur la gauche. La balle file droit vers Stark, qui évite la balle en plaçant ses mains autour de sa trajectoire. Et elle fait quelque chose. Quelque chose  d'invisible à l’œil nu. Puis elle recule hors de portée du robot et agite les mains pour guider la trajectoire de la balle. Cette dernière, d'une manière pas du tout naturelle, parcourt un arc de cercle autour de Stark, et percute avec violence la tête du robot.

Bullseye.

Ah... Rien compris à ce qu'ils racontent. Mais ça à l'air chaud !

Atridès plie donc sa chemise en quatre, et la pose sur le banc collé au mur. Et il avance un peu.

C'est la salle d'entrainement, donc ?

 C'est l'endroit idéal : Terrain aménageable à souhait, enregistrements disponibles, Et on peut casser ce qu'on veut. En plus l'ordinateur va plus vite que moi, ce qui est franchement pratique. Tu voulais la salle pour autre chose ? On peut...

Nan, je venais surtout pour voir, et m'entrainer aussi.

 Salle, arrêt de toutes les simulations. 

L'imagerie holographique se résorbe et la salle reprend son apparence réelle : beaucoup de machines sur des murs de métal froid. 

 Vraiment ? On peut pas parler et travailler en même temps ? 

Non, on peut pas tous faire ça. Le grand là, c'est censé être le chef d'équipe. Et s'il demande qu'on l'entraîne, c'est mon plaisir de l'aider. N'est-ce pas, monsieur "travail d’équipe" ? 

Oui, oui... On va partager une guerre ; elles sont toutes différentes. Que veux-tu travailler ? Le combat réel, c'est à 18h.

Oui, oui... Je verrai à 18h si je reste ou pas.
Bon, bah pour commencer, quantifier tout ça, non ? Pour voir après l'évolution... Vous avez des charges marquées ? Des trucs pour mesurer la vitesse ? Des trucs pour calculer la puissance d'impact ?

... Et puis, je verrai après.

 On peut faire tout ça. Stark, tu vas te charger de monitorer le chef, moi je ml'amuse bien. Jake, je te vois souffler. Mais l'entraînement reprend !

Je suis.. prêt. 

Manifestement, les machines de la salle permettent de jauger avec précision les participants. Ce n'est pas aussi versatile que les sens de la source, mais c'est utile. Ausbund, qui a une endurance similaire à celle du jeune géant, tient à pousser chacun jusqu'à sa limite, avec ce raisonnement : si tu régénères constamment et que tu progresses par la confrontation, tu devrais être fréquemment confronté à des problèmes que tu ne peux pas encore régler, si tu tiens à progresser. 

Je te suis, Addie. A la cool, hein ? On y va à la cool pour commencer. Se chauffer...

 On va juste prendre tes mesures. Tu veux la forêt ou la plage ? Pendant que je te configure le connard ultime...

La plage. Le sable, c'est bien pour le combat, et ce sera plus clair. On verra mieux.

L'environnement sélectionné apparaît tout autour. Chaque détail y est, sauf les odeurs. Tout le reste disparaît. Il entend Jake Haleter au loin, et Ausbund et les tirs, et le bruit des balles sur la lame. Mais il ne les voit plus. Face à lui une silhouette floue semble faîte de métal et de plastique, et se recouvre d'une image de synthèse jusqu'à devenir... Arès. Le dieu de la guerre, ou plutôt un piètre simulacre, se tient devant lui, désarmé. Il pose une jambe derrière l'autre et tend un bras vers l'avant, en garde. Mais pas une garde Olympienne. .

 Oh pardon, attends. Fait la voix d'Addie. Arès reprend une pose neutre. Vas-y. Tape le le plus fort possible.

Avec une arme, ou uniquement avec...  ? Bah, une bonne vieille patate de forain, pour commencer, c'est pas si mal. Aussi, Atridès ne finit pas sa phrase, mais fonce vers Arès, se décale, poing en arrière...
... Avant de se dérouler, poing filant vers le visage du Dieu de la Guerre. Frapper ce corps est comme frapper un homme anormalement résistant, mais pas comme frapper un bloc de métal. A l'impact, il vole comme un adversaire qui n'aurait pas lutté, sur le côté, avant de se relever pour reprendre une pose neutre. 


 Tu frappes plus fort qu'Ausbund. Terrifiant. Presque deux fois plus fort, en fait. Pas que ça change grand chose pour moi... Par contre en termes de vitesse, il a peut-être sa chance. Si on se base juste sur ce coup. En se basant là-dessus je dirais que tu dois pouvoir briser le mannequin en... une dizaine de coups, peut-être. Ces trucs sont flippants : on les a testés au maximum de leurs capacités, et ils nous ont fumés. Même toi, je pense que tu peux pas lutter. Vous avez vraiment du bon matériel.

Tu veux un scénario plus.... tendu ?

Ce que tu proposes... J'y connais rien, aux simulateurs.

Peu à peu, Arès fait place à Hadès, avec la robe et tout ce qu'il a connu de son oncle, quand il était au pire. Il se met à reculer pour arriver à une vingtaine de mètres d'Atrdès. Alors, dans un ricanement, il soulève lentement les bras, et le sable se met à remuer. Des mains décharnées sortent de la plage et tentent de l'attraper par les chevilles. 

 Tu dois arriver jusque Hadès pour gagner.

D'accord ! Atridès se met à courir. Une prise d'élan brutale, avant que les mains squelettiques ne soient toutes sorties. C'est l'histoire de quelques mètres. Et il bondit. Flottant à près d'un mètre du sol, la poussée le lance sur presque dix mètres, et il entend les jurons impressionnés de la jeune femme. En vol, il sort l'épée d'Héphaïstos de son disque, la lève au dessus de sa tête, et retombe sur Hadès, lame en avant. L'effet du vent dans la lame le maintient assez longtemps dans les airs pour qu'il retombe presque à portée. Il écrase des mains au passage et saute à nouveau, sans que l'épée cesse de chanter. Le prochain saut passe littéralement au travers du robot, qui explose et fait craquer l'ilusion sur lui. Il retombe en morceaux au sol et Stark coupe toutes les sessions en cours. 


Dans un coin de la pièce, un mur s'ouvre pour faire apparaître un autre automate, dont la première tâche est de disposer de son prédécesseur. 

 On va devoir relever le niveau, je crois.

Après un entraînement de qualité - les machines ont des programmes qui leur permettent de reproduire les passes de maîtres, et ne ressentent pas la fatigue - Presque tout le monde est épuisé. A 17h40, Ausbund annonce la pause. Ils mangent et discutent des prouesses de chacun et de l'objet de leurs entraînements respectifs, assis sur une plage imaginaire.  

On va bientôt faire les matches à mort. Tu veux participer ? Sans ton épée, hein. Mains nues.

 S'il participe, je passe pour aujourd'hui. Ou alors je me fais le chien ? Tu joues, le chien ?

Et si je ne participe pas, que je ne fais que regarder, vous êtes combien ? Deux ?


On est trois. 

 On a mis ça pour nous, mais on interdit rien. Si un match à mort peut nous pousser vers l'amélioration, je dis : essayons. On n'a rien à perdre si ce n'est du temps. A mains nues on reviendra en quelques jours, maximum. Il suffit de ne plus faire ça trois jours avant l'arrivée. J'avoue que tu ne ferais qu'une bouchée d'Addie. Je ne sais pas ce que vaut Jake, mais je pourrais vous fournir un match. Ca m'aiderait de t'affronter, Atridès.

Bon, bah, ça me va. Si ça peut aider... On évite les "morts" qui mettent trop de temps à régénérer, hein ? Genre, par exemple, les têtes arrachées : si on peut se contenter d'une trachée écrasée, c'est mieux, non ?
... Je préfère passer du temps à baiser les "filles bleues" du vaisseau qu'à le perdre à revenir à la vie ! Bon...

La salle prend l'apparence d'un dojo. Tapis tressés, murs sobres et une arène circulaire dans une salle carrée de trente mètres par trente. 
Atridès retire sa tunique, fait un peu craquer sa nuque, et s'assouplit les poignets en les faisant tourner dans tous les sens, mains jointes. 

Un bandeau pour les cheveux. Qu'on soit à égalité. Pas d'armes. Juste la force et le talent. Il garde un bras le long du corps, et présente l'autre, la paume vers l'intérieur. Ses jambes sont droites. Drôle de position. 

Quand tu veux.

Atridès se positionne d'une façon presque inverse à ce que fait Ausbund. Jambes fléchies. Ramassé sur lui même, bras un peu en avant, pour protéger la petite cible qu'il constitue désormais. Son regard est fixé sur les jambes de son adversaire. Le jeune grec semble plus concentré qu'à l’accoutumée.

C'est parti. Atridès avance lentement, comme une tortue. Son but est clair. Attraper quelque chose. N'importe quoi... Après, on fait avec. Ils finissent par être très proches et l'adversaire ne bouge pas. Une fois certain d'être à portée de bras, Atridès lance sa large main vers la direction générale d'Ausbund. Ce dernier pousse la main d'Atridès au dernier moment, ce qui la dévie juste assez pour qu'il rate sa prise. Puis d'un petit pas, il passe sur le flanc et assène trois coups aux côtes avant de se retirer derrière le théopolien.

Fulgurant. Atridès a à peine le temps de réaliser ce qui vient de se passer que la douleur lui arrive. Rien de fatal, mais ses coups se font ressentir. Il mettra du temps, mais il a de quoi faire tomber Atridès. Et ce sourire satisfait... 

 Encore.

Hummm... Atridès ne change rien. Il couvre toujours ses parties les plus vitales, avance vers son adversaire lentement. Cherche une prise... Mais l'échange est très serré. Trois fois, Atridès trouve la prise parfaite,referme ses mains sur de l'air et subit trois coups dans les jointures du poignet, du coude et le dos de la main. Trois fois, le parangon nazi joue avec sa taille pour se faufiler dans un angle mort et le combat reprend. S'il ne trouve pas rapidement une faille, il va finir par perdre l'usage d'une main. 

D'un autre côté, Ausbund est étrangement sur la défensive, pour un gars aussi fort. Mais il semble s'amuser. Ce qui est aussi énervant que le fait qu'il voie tout venir à l'avance. 

 J'ai l'impression qu'on va rester là longtemps. Tu ressens la douleur, au moins ?

Ouais. Mais j'ai l'habitude...

Atridès reste très concentré. D'accord, il a tendance à ne pas toujours être le gars le plus sérieux de l'univers, mais pour un combat, à mort qui plus est, son état d'esprit n'est plus le même. Ça se voit. Et puis, c'est un peu le duel entre les deux "forces de frappe" de chaque équipe. Le théopolien n'a pas envie de faire honte à Jake et Mia.

En fait, il habitue lentement Ausbund à ce niveau de force. Mais il sait qu'il peut le faire "exploser". Reste à trouver le moment approprié. Forcé de prendre l'offensive, Ausbund montre l'étendu de son jeu. Seul son pied bouge lorsqu'il saute, et sa force est telle qu'il semble avancer sans mouvement. Là un instant, le voici directement dans la garde du théopolien qui n'a pas pu suivre le mouvement. Pour lui, Ausbund vient de se rapprocher par magie. Ses deux mains se précipitent alors doigts tendus vers les jointures, sous les épaules d'Atridès. Il y met tant de force que le géant ne réalise pas tout de suite que ses bras ne fonctionnent plus. Il est donc incapable de parer le coup suivant, droit au visage. Il n'arrive pas non plus à se rattraper au sol et se cogne la tête à l'atterrissage. 


Au dessus de lui, Ausbund lui explique.

 Tes bras vont arrêter de fonctionner un moment. Je veux savoir combien de temps. Et il commence à compter sur ses doigts, laissant Atridès tenter de se relever. Pendant près de trente secondes, qui paraissent une éternité.


Marrant, ton truc... Ça marche bien... Atridès s'avance à nouveau vers Ausbund. Cette fois-ci de façon mon subtile. L'idée est de se renforcer au niveau de sa capacité à encaisser les coups, et de l'attraper. A la lutte, au sol, ce ne sera plus la même histoire. Atridès écarquille les yeux, serre les mâchoires et bande chaque muscle de son corps. 

L'assaut suivant, Ausbund fronce juste les sourcils. Il est évident que l'humeur du géant vient de changer. Il reste sur ses gardes, mais quand l'assaut se passe encore et encore de la même manière, il semble se détendre. Pas Atridès. Comme prévu, la prise échoue. Les trois coups aux jointures suivent, mais le bras d'Atridès ne s'arrête plus. Il avance, inexorable, subissant les coups. Aucun de ses nerfs ne bronche, aucun muscle n'est plus gêné par quoi que ce soit. Le parangon est pris au bras, parce qu'il aurait été pris à la gorge s'il n'avait pas été si rapide.

Atridès est toujours crispé, et plus fort que jamais. Les yeux fous du demi-dieu s'accompagnent alors d'un atroce sourire convulsé quand il soulève son adversaire par le bras, lui faisant faire un demi-cercle dans les airs...
Avant de le fracasser à même le sol et de le rejoindre dans le même mouvement. Sans jamais lâcher sa prise.
Profitant du choc qu'a subit Ausbund, Atridès, maintenant au sol avec le gaillard, assure sa prise, trouve un levier sur son coude, et pose sa lourde main sur l'ensemble de sa gorge.  

Ausbund ne peut que taper de la main sur le sol, en panique. Il lutte pour rien contre la main implacable d'un dieu qui a décidé qu'on ne le bougerait pas, mais réalise son prédicament.

Atridès pousse un peu plus sur le levier du coude, histoire qu'Ausbund sente la douleur. Mais pas assez pour briser l'articulation. Il serre un peu plus la gorge de son adversaire pour qu'il suffoque, mais pas assez pour écraser la trachée... Il a bien vu qu'Ausbund a tapé de la main au sol, signe qu'il abandonne. Ça lui rappelle les entrainement de lutte avec ses potes de garnison.

T'as bien compris que tu es mort si j'insiste un peu, hein ? , dit-il avant de relâcher la pression, se désengager, et rouler an arrière. Avant de se relever. Il la pu voir les paupières d'Ausbund indiquer qu'il avait bien compris la situation. A l'entrée de la salle, Stark et Jake approuvent du regard. 

Atridès, lui, est déjà rassuré. "Combat à mort" ne voulait pas dire massacre idiot, mais "entraînement dangereux". Il rejoint la salle de contrôle à la place des deux autres, et Ausbund le rejoint, un peu ralenti par leur échange. La salle lance la simulation, et Jake et Stark prennent le relai. Cette fois ils sont en forêt, mais les spectateurs voient le décor en transparence, aussi peuvent-ils aisément repérer les participants. 

Jake ne se contente pas d'arpenter la forêt. Il l'investit. Trois Jakes se forment. L'un se mue en serpent poilu, l'autre rampe au sol et un troisième se fait pousser des mains pour grimper aux arbres. Pendant ce temps, Addie avance et semble fabriquer ses propres projectiles, un peu plus loin.

 Ce chien est hallucinant. Combien de fois peut-il se multiplier comme ça ? Fait le Parangon à la voix meurtrie.

Là, maintenant ? Aucune idée... Mais dans le futur, ce sera des dizaines de versions de lui qu'il pourra lever !

Dis, c'était bien notre combat. J'ai bien aimé. Surprenant, le truc de se battre en donnant des coups de pieds. Et le machin sous les épaules aussi !
T'as plus de technique que moi. Nous, tu sais, le corps à corps, c'était secondaire. C'était pour le moment où on était désarmés, sur le point de crever. Histoire de pouvoir encore nuire à l'ennemi. La formation à mains nues, c'était surtout pour rigoler avec les copains.
'Faudra que tu m'apprennes des trucs !

 Et que je me méfie plus. Quand tu fais ton truc avec l'énergie psychique, là... Tu deviens un véritable monstre, plus un dieu. Oh... regarde. Ça commence.

Jake ne laisse aucune chance à la nazi. Elle en repère deux, et le combat s'engage. Techniquement, Addie Stark est propre et sans détour. Chaque  coup porté est fait pour tuer ou pour placer sa cible en position pour le coup suivant, qui lui, tuera. Mais Jake est vif, et contrairement à elle, il mord à chaque opportunité et se replie. Malgré tout, elle abat finalement le premier Jake d'un coup de pied dans le crane, qui produit un atroce craquement. Atridès est rassuré quand le chien disparaît, tandis que le second attaque. Il s'ensuit un plus long combat où la fille réalise que le temps joue contre elle. Mais chaque fois qu'elle le tue, le chien revient à la charge, issu du serpent-Jake caché dans les arbres. A la fin, elle tombe par manque de sang, au bout de trente minutes d'un combat acharné... dans lequel c'est Jake qui ne lui a laissé aucune chance de gagner.

Bon, bah... Comme prévu. Tu sais, tout le monde le sous-estime parce que c'est un chien. Mais il est vraiment fort. Malin. Et très sympa.
Je t'ai déjà dit que c'est mon meilleur pote ?

 Tu as pu le mentionner une ou deux fois...

Ah ? Bon, je dois y aller. On se refait ça une autre fois ?

Le lendemain, à bord du Sigma, la matinée se passe entre théopoliens et Jake, et après un copieux repas et un échauffement de course à pied sur une plage holographique (par miracle, une salle était libre des allemands), il est temps de voir le docteur Vells. Le rendez-vous lui arrive sur son appareil vivant qui lui  indique la route la plus courte, aussi Atridès se rend-t-il à une sorte de cabine avec des machines dedans. Sur les conseils de son appareil, il tapote des numéros supposés définir un endroit sur la carte... Et voilà que dans un flash de lumière, tout autour de lui change. Il est toujours dans le vaisseau, mais dans une zone complètement différente si ce n'est pour cette cabine. Mais comme la source du doc est dans le coin... Il se dirige tout seul vers la salle d'examen. Autour, de graves bruits de machineries lourdes. 


Ah ! parfait, pile à l'heure.

Ouais... Vous avez les résultats des tests ?

 Oui. Pour commencer, tu ne seras pas surpris d'apprendre que ta structure génétique présente des gènes théogoniques. Mutants aussi, c'est validé. Je crois que tu es d'ascendance gitane, un peuple nomade de la Terre pré-exode. Ce matériel génétique mutant compose la plupart de tes gènes. Les gènes théogoniques se répartissent sur des parties de ton ADN liées aux réflexes, au développement musculaire et à ce genre de choses. Mais à des niveaux impressionnants, je dois dire. Au niveau de la déduction de capacités, j'ai été surpris de voir un potentiel psychique. Pas de la télépathie, c'est certain. Zéro disposition de ce côté. 

Mais je pense que cela ne nous apprend pas tout, n'est-ce pas ? Il range son appareil. J'aimerais essayer autrement. Avec juste mes propres sens. Asseyons-nous en tailleur, face à face, et faisons l'inventaire de ce que tu m'as dit. Tu as parlé d'une sorte de pellicule malléable, qui te protège de la magie. Je peux la sentir d'ici. Et tu peux la contrôler ?

Atridès suit les consignes, et s'assoit en tailleur en face du savant.

Je pense que c'est faisable, parce que je l'ai baissé dans mon sommeil, la fois dernière. Mais je ne sais pas comment faire...
Sinon, pour les autres trucs que vous m'avez dit, c'est juste : ma mère est gitane. Et aussi pour le truc psychique. Ausbund m'a parlé de ça, lui aussi, après que je me sois concentré pour renforcer mes muscles et mes tendons.

 Oh. Tu peux devenir encore plus fort ? Eh bien... Et tu ferais ça mentalement. Mmm. Mais concentrons-nous sur ta pellicule pour commencer. Peux-tu la voir, ou la sentir ? La bulle, il l'a déjà agrandie en écartant les bras devant les autres ou en les prenant dans son espace vital. Atridès, consciemment ou pas, sait où se trouve sa protection ; c'est comme une peau au dessus de sa peau. Mais il n'a jamais essayé de la voir.

Atridès lui fait part de ses réflexions sur le sujet. Et puis, il essaye de la voir, de la ressentir mieux, cette pellicule. De se focaliser dessus, en fait.

En fait, ça serait carrément bien, si j'arrivais à l'étendre un peu plus... Parce que résister à la magie face à une déesse folle, c'est bien. Mais protéger les autres en même temps, c'est mieux !

 Je comprends pourquoi Stark évite la confrontation. Son pouvoir de ciblage mystique ne marche pas sur toi, faut d'accrocher sa cible.. D'autre part, si ta motivation est de protéger les autres, c'est parfait. Tu apprendras mieux ainsi. 

Si on peut commencer, j'aimerais que tu coupes ta protection. Complètement.


Bah, Doc, protéger les gars de son groupe, c'est la base... Tout le monde protège tout le monde. C'est pour ça que notre hoplon couvre à moitié le gars sur notre gauche. Et celui à notre droite nous protège à moitié aussi. Comme les écailles d'un poisson...

Mais, pour la pellicule, je vais essayer...

Déjà, mentalement, il se persuade que l'endroit est sûr. Sur le vaisseau, avec le Doc... Histoire de se détendre.
Il prend ensuite une grande inspiration, et il regarde son bras. Plus précisément la pellicule sur son bras. Il essaye, comme pour avec le  Renforcement, de convaincre son corps de se décontracter, de faire tomber l'enveloppe.

 C'est bien ce que je pensais. Ca ne te requiert pas d'effort, juste.. de la volonté et de la sérénité. Bien. Tu vas rester comme ça pendant trois jours.

Trois jours à rester complétement concentré sur ça ?
Je veux bien essayer, Doc, mais honnêtement... C'est pas possible. Je n'y arriverai pas.

 Crois-moi. Ce sera difficile, mais très instructif. Et puis il n'y a pas vraiment de menace surnaturelle tant qu'on ne sera pas arrivés à destination. Donc pas besoin de bouclier magique, n'est-ce pas ?

Non, bien sûr. Ce n'est pas le problème...
Le problème, c'est que j'aurai du mal à rester concentré aussi longtemps. Mais je vais essayer quand même !

 Bien. On va déjà voir si tu peux le faire tout en continuant les tests. Nous sommes ici parce que c'est un lieu doté de capteurs de pression extrême et d'appareils hydrauliques dont la seule fonction semble être d'appliquer des forces extrêmes. C'est comme si c'était une salle d'entraînement à super-force, en fait. C'est amusant de se dire que les anciennes sources avaient une salle de gymnastique qu'elles seules peuvent utiliser. 

Ce disant, il montre du doigt les appareils étranges de la pièce, et tout devient plus clair. Comme la salle holographique, elle comporte une salle d'analyse et de programmation ouverte sur cette pièce énorme et pleine d'appareils de tests. Celui que propose Vells est une sorte de cylindre métallique qui pourrait écraser un homme, et semble prévu pour exercer un poids choisi par l'opérateur de la machine. Comme un énorme marteau, qui descendrait lentement sur vous avec la force d'un titan, s'il le faut.

 Combien penses-tu pouvoir supporter ? Avec ta force, rien n'est indéracinable ou impossible à soulever. Mais quelle sont vraiment tes limites ? Tu dis pouvoir te rendre temporairement plus fort, mais que ça te fatigue. J'aimerais savoir à quel point. Pour que tu ne prennes pas de risques inconsidérés, et qu'on puisse voir si un travail améliore tes dons... ou non. Qu'en dis-tu ?

Ça me va ! Je vais la battre, ta machine ! , dit il en s'installant sous le piston.

Atridès commence à pousser. L'appareil remonte jusqu'en haut, sans aucun effort. 

 Il faut que je lui dise quel poids exercer. On sait que tu es fort, commençons par 500 kilogrammes. 

Atridès soumet un léger effort, mais il pourrait porter ça sur des kilomètres sans soucis. Puis le métal monte en force graduellement, et le demi dieu commence petit à petit à devoir assurer sa position , puis à réellement forcer à mesure que Vells énonce les chiffres. Et finalement, Atridès finit par plier. Le doc en est à neuf tonnes quand le géant finit par commencer à céder du terrain. Dans un grincement, le piston gagne petit à petit la bataille, et Vells laisse faire. 

 Impressionnant. Est-ce que je dois m'arrêter ?

Non, non... J'étais juste en train de m'échauffer un peu.
Au niveau de la force physique brute, Atridès est presque à son maximum. Mais il y a cette sensation de surpuissance, lorsqu'il se voit comme un Dieu... Il essaye de se représenter ça. Il pousse sur le piston, dans le but très clair de le remonter. Aussi fou que cela paraisse, il réalise qu'une main sera pour lui plus simple que deux pour équilibrer l'objet. Il place naturellement sa main droite au centre et à la surprise de Vells,là où il peinait, il semble ne plus faire d'effort du tout. 

 Comment... Tu n'as pas l'air d'avoir déployé d'énergie psychique, pourtant. Je vais augmenter le tonnage. 

Vells monte à 10 tonnes, et le théopolien souffle un peu. son biceps semble sortir de son bras alors que le piston, dépassant les 13 tonnes, grince pour battre le dieu.Instinctivement, il pousse le centre de l'objet avec son index uniquement. Et la charge lui semble moins insupportable. En fait, il remonte même le piston. Il fait encore le malin sans générer de fatigue jusqu'à 16 tonnes. Ensuite, même si le doigt est plus utile que deux bras, il finit par plier le genou, petit à petit...


 Seize tonnes... C'est impensable ! Mais je crois que tu as trouvé une nouvelle limite. Non ?

Non. Je peux faire plus... Et il se concentre cette fois ci sur son esprit. Qu'il ajoute à ses forces mystiques et physiques. A faible dose pour commencer. Par paliers, il fait remonter la machine tant que Vells peine à la faire revenir à l'assaut. Mais inexorablement, elle presse plus fort et plus fort encore,jusqu'à ce que, vers 50 tonnes, on puisse entendre un CLANG très net d'un mécanisme qui s'enclenche. Atridès est au maximum de l'effort. 

 Par l'Oracle ! 60 tonnes ! 65 ! 70 !

Ses bras à nouveau réunis, Atridès pousse des poings sur la masse inflexible. A la fin il hurle, et redonne un dernier effort... avant que tout ne se brouille, et que faute de tension et d'adrénaline, il tombe au sol, fessier en avant, et commence à se masser le front pour que sa vue revienne à la normale. Au dessus de lui, le piston s'est arrêté avant d'être à une hauteur dangereuse. 


 La dépense psychique est phénoménale... Je ne sais pas si c'est bien sage d'utiliser une telle ressource.

Après quelques grommellements, Atridès fini par se relever, retrouver le sourire et demander :

Alors, Doc ? J'ai gagné contre la machine ? J'ai eu beaucoup de points ?

 Eh bien pour faire court, oui. On a aussi établi ta limite. 70 tonnes de poussée, mais sur une période de trente secondes. Ton maximum avant ça, c'est plutôt de l'ordre des 8 tonnes. L'impulsion psychique est extraordinaire, mais épuisante. Je vais télécharger des exercices de logique sur ton pad. Tu devras les réussir tous. Tu viendras me voir quand tu seras bloqué, d'accord ?

D'accord ! Mes exercices de logique à faire, ne pas relever mon bouclier mystique pendant trois jours, continuer à foutre Ausbund et Stark en position fœtale à la fin de chaque duel...

Nan, bien... Sérieux, l'entrainement ! Merci, Doc ! Vous me balancez la prochaine date d'entraînement sur mon pad, hein ? Atridès s'en va donc, l'air satisfait.

Il ne s'arrête à la porte que pour rajouter :

C'est beaucoup 70 tonnes ? Ça représente quoi, en fait ?

 Un seigneur de la mort Drass. C'est le niveau d'un seigneur de la mort. Sûrement pas les plus anciens. Mais dépasser un simple soldat Drass est déjà hors de portée pour Ausbund, sur le simple plan de la force physique. 70 tonnes, c'est le poids d'un bateau remorqueur.  Ça dépasse la physique ; la façon dont tu as repris de l'équilibre avec un doigt, c'est insensé. Quant à ce que tu fais avec ton esprit... Je crois que c'est de la télékinésie. Certains déplacent les objets avec leur esprit à distance. Tu sembles le faire à très courte distance. En fait, cela recouvre la même zone que ta pellicule spirituelle quand tu l'utilises. Avec du travail, tu devrais en théorie pouvoir l'améliorer mais... Tu as besoin de renforcer ton esprit, d'abord.

Tant que ça ? Waoooh... Bah, dans ce cas là, ouais, on va bosser sur l'esprit, alors...
A bientôt !

Atridès sort donc du laboratoire, satisfait, en quête de bon temps. Et qui dit 'bon temps" dit Jake. C'est le premier qu'il contacte, en tout cas...

A partir de là, le rythme du voyage est établi. En fait Atridès n'a que peu de temps libre, mais il peut faire ses tests de logique n'importe où. Prfois il doit appeler le doc ou quelqu'un dans l'auberge pour réaliser la solution du kilo de plomb et du kilo de plumes, ou calculer l'angle du triangle, et il finit par chercher les pièges dans les questions de logique. 

Il passe du temps à se battre avec Ausbund et Jake avec Stark, et les deux remontent dans la compétition. Un jour, Atridès hésite à tuer Ausbund, juste pour ne pas avoir à l'affronter à nouveau le lendemain. Mais quelque chose dans sa façon de ne jamais abandonner est admirable.
Mais il ne le tue pas. Certes, Atridès est énervé. Mais il se souvient des règles. Du contrôle sur soi qu'il doit acquérir.

Jake semble vraiment inquiet à cause de sa vision de l'avenir, alors les temps libres sont bien rentabilisés à le rassurer et ranimer sa motivation. Au bout de deux jours, Atridès réalise qu'il comprend mieux son ami, et plusieurs personnes qu'il touche par hasard ou volontairement : leur âme est souvent plus lisible lorsqu'il les connaît un peu, ou que les sentiments montent à la surface. C'est certainement l'absence de la protection spirituelle. Il ressent plus de fatigue le soir. Il contrôle moins bien ses sentiments les plus négatifs. C'est un challenge de ne pas utiliser son aura, mais un challenge qui le rapproche de son côté mortel. Et de ses amis mortels. 

Aussi, un autre bénéfice qui devient évident rapidement, c'est qu'il peut entendre les prières beaucoup mieux. Il a pu prendre des nouvelles de Latrelle, qui a décidé d'abandonner ses études pour suivre l'enseignement de Macar pendant sa quête pour Théopolis. Ses fidèles, partout sur sa planète natale, mais aussi dans le noyau, et les quelques fervents éparpillés à travers la galaxie, tous puisent parfois leur courage dans les exploits qu'ils l'ont vu accomplir. Ou dont ils ont entendu parler. Sans la pellicule, Atridès se sent plus vulnérable, plus humain. Mais comme la façon dont les adorateurs le voient forment autant Atridès qu'Atridès modifie leur vision de lui, il se retrouve aussi plus fort, plus sûr de lui, et prêt à relever tous les défis. Un avatar de force et de courage, de résistance face à l'autorité usurpée.

Mais étant moitié homme, Atridès réalise ce phénomène. Un dieu serait juste changé. Un demi dieu a un esprit d'homme, préexistant aux vues que les autres ont de lui. Atridès se retrouve face à des décisions. Doit-il vraiment se rendre vulnérable à tout cela ? Les avantages valent-t-ils les effets secondaires de la divinité ? Sa bulle le protège de tout. Du bon comme du mauvais.

Les soirs seul avec ses problèmes sont plus durs, mais plus intenses. Il pleure en repensant à son passé deux fois en deux jours. Mais d'un autre côté, il a appris à accepter ces sentiments. Il retourne voir Vells un midi, fort d'une décision :

Salut, Doc.
C'était chouette d'avoir fait tomber cette 'bulle"... J'ai appris plein de choses. Je vais essayer de la laisser baissée encore un peu plus longtemps.
Je la garderai pour le combat.

 N'hésite pas à partager, surtout. Qu'as-tu découvert ? Mon objectif était de te faire comprendre que la bulle pouvait t'empêcher de grandir. Une chose que tu as besoin de faire, après tout. Tu n'es qu'un jeune homme !

En fait, c'est exactement ça. Cette bulle est vraiment utile. Mais pas tout le temps.
J'entends mieux les mortels qui pensent à moi. Et ce qu'ils pensent me renforce. D'ailleurs, il faut que je leur fasse signe... Qu'ils comprennent que je suis là, avec eux. Mais je ne sais pas trop comment...

... Mais par contre, je dois pouvoir lever ce bouclier à tout moment. C'est indispensable face à Circée.

 C'est indéniable. Il me semble que vu ce que nous affrontons, tu es clairement l'arme parfaite contre cette déesse. J'ai étudié son histoire de près et c'est une de ces déesses multimineures. C'est un terme que nous utilisons pour décrire les mythes incarnés qui semblent mineurs au premier abord, mais qui se retrouvent souvent à plus d'un endroit à la fois, dans plus d'une culture. Les Multimineurs ont cette faculté de pouvoir traverser d'autres panthéons. Comme L'Oracle Sorsha, par exemple. Souvent, ils survivent ainsi dans l'inconscient humain quand leur panthéon d'origine tombe. 

Et je me disais qu'une déesse comme Circé doit avoir été difficile à persuader de partir. Avec des drass, des humains de divers peuples et des guerriers génétiquement modifiés, et zéro croyants ? Quel dieu ferait ça, ce serait du suicide. C'est habiter près d'une rivière et la quitter pour vivre seul dans le désert. Bon, ma réflexion ne va pas vraiment plus loin, mais j'avais le sentiment qu'on ne cherchait pas du bon côté. J'ai essayé de rêver du problème, mais le résultat n'est pas probant. Avec Traüm nous correspondons à heures fixes, vois-tu. Bref, mon rêve n'a pas porté sur Circé, mais il se déroulait ainsi : 

   Je suis au dessus du Sigma, et il avance dans l'espace. Il vogue sur une rivière et suit les embranchements de la rivière qui sont nombreux et sautent de l'un à l'autre comme autant de veines dans le corps de l'espace. Il ne dévie de sa course que pour éviter les soleils et les objets disséminés dans le vide. Parfois, il fait un saut entre deux pans de rivière, mais il y retourne toujours.

C'est un rêve étrange en soi, mais j'ai étudié les systèmes de navigation du vaisseau et il y a une sorte d'esprit dans le processeur hyperspatial qui établit les routes les plus rentables en mappant les lignes telluriques entre les mondes. Et c'est intéressant parce d'après la fin de mon rêve, nous passons près d'un nœud massif de forces telluriques demain, d'après mes calculs. Et à ces coordonnées se trouve une planète, alors j'ai pensé que tout dieu digne de ce nom serait allé voir ce nœud tellurique. Ergo, Circé a du passer par là. Avant de devenir... Rouge. J'ai fait ce rêve cette nuit, et je crois qu'on va faire un arrêt là-bas. 

Je me demandais si tu voulais faire partie de l'équipe d'investigation.

Bah, vu ce que tu viens de me dire, oui...  J'ai pas trop le choix.

 Oh, j'ai peur que tu ne comprennes pas ma demande. Nous allons à un endroit et j'ai le sentiment que cet endroit pourrait avoir corrompu un dieu. D'où ma question. As-tu peur de venir ? Moi oui; Si nous créons un second monstre...  Et que nous y perdons un ami...

Ah ? C'est gentil, ça... Merci.
Mais non, je n'ai pas peur. Je ne pense pas que j'ai à avoir peur. Je ne suis pas du genre à me faire corrompre. Pour ça, il faudrait que j'accepte un maître. Et ça n'arrivera pas. Je fais ce que je veux, quand je le veux, selon ma propre balance morale. C'est la seule chose qui me définit au final... C'est Moi.

'Fin, voilà, quoi, tu vois ce que je veux dire...

Je viendrai, Doc. Et il n'y aura pas de problème.

 Alors c'est décidé. Je vais prévenir les autres d'arrêter de se démembrer pendant leurs entraînements. Prends du repos, fais tes exercices, et je te revois au repas demain midi ? Je me disais que ce serait une forme de réunion moins formelle pour les sources. Un repas, quelque chose de familial.

Exactement ! Les moments du repas, pris tous ensemble, ce sont les meilleurs moments de la journée ! C'est une super idée ! On t'as déjà dit que t'es un génie, Doc ?

... Bon, évidemment, c'est moi qui fait la bouffe. 'Faut que ce soit bon, quand même ! ... J'ai pas mal de "frais" stocké dans le disque que m'a offert Mia, je devrais réussir à faire un truc correct.

Par contre, votre truc, là, dans les exercices... Huit personnes se rencontrent. Elles se serrent toutes la main... Combien de poignées de main ont été échangées ?
Eh bien, sérieux... J'y arrive pas. J'essaie de compter, mais je me plante toujours à un moment...

 C'est toujours bon d'essayer des approches graphiques. Prends ton pad et fais comme moi...

Les exercices de logiques sont parfois contraignants, mais quand une question teste une subtilité déjà étudiée, la satisfaction que ressent le géant est bien réelle. 

Merci, Doc ! A demain ! Je m'occupe de la bouffe, mais toi, des boissons et du local !

Le lendemain, l'heure du repas arrive et Atridès croise Stark et Ausbund dans les couloirs menant aux appartements qui leur serviront de salle à manger et de cuisine à la fois. Ils portent des tonneaux de liquides en tous genres pour le repas ; le Capitaine en second aura délégué sa tâche. 


La partie cuisine est fraîchement modelée par les drones et l'Assistant de fabrication, toute de métal poli dans lequel on peut se voir. Elle donne sur un bar qui la sépare à peine de la partie salle à manger. Il y a assez d'espace pour passer à plusieurs ou pour porter des plats d'une taille décente pour les appétits massifs des deux surhommes et d'autres individus hors normes, canins inclus.


Mes amis, je ne sais pas si Atridès est dieu de la cuisine ou de la justice, mais il serait dommage de synthétiser notre nourriture quand on a un tel chef à notre disposition. De plus, nous arrivons en vue de la planète-nexus. 

A quel point les lignes telluriques convergent-t'elles à cet endroit ? Par rapport aux autres ? 

Quand je dis "Nexus", mes amis, je réfère au terme médical désignant une jonction intercellulaire mettant en relation le cytoplasme de deux cellules voisines.... Bref, disons juste que les planètes sont toutes des jonctions telluriques. des nœuds. Ce qu'on a ici ressemble plus à une pelote de laine. De gros filaments qui tissent un tissu plus large que ce que nous avons jamais croisé. Les cartes du vaisseau le confirment.

Et ça fait quoi, un Nexus ? En pratique, hein ? J'imagine que si ça a un nom, c'est étudié. Et si c'est étudié, les savants savent des choses... , lance Atridès en ayant déjà pris sa place devant les fourneaux. Bien sûr, il a préparé tout ce qu'il pouvait préparer et stocker "au frais" dans son disque, et il lance déjà les entrées froides, le temps de réchauffer le plat principal.
Il s'est amusé a tenter des recettes terrannes récemment découvertes : avocat, crevettes décortiquée, épices, citron et mayonnaise maison.
Puis un curry d'agneau et son riz.

... Atridès n'a aucune idée de de la qualité de ce qu'il sert, à part les moments où il a gouté lors de la préparation : c'est la première fois qu'il tente ces recettes. Aussi, c'est l'air un peu stressé qu'il apporte les plats.

 Il y a un réseau naturel de forces qui lient le monde spirituel au monde physique. Il semble juste que toutes les routes mènent ici. On n'a jamais vu ça à ma connaissance, ou alors ce n'était pas dans mes cours de biologie maritime. J'imagine... que ce serait un monde très magique ? 

De toutes façons, quoi qu'il ait été, le dévoreur l'a détruit il y a deux cent ans, avec le reste du secteur. On ne détecte aucun signe de vie sur cette foutue planète, Fait-elle en se faisant passer les plats.

Par contre, on y a trouvé toute une série de villes et de monuments plus ou moins conservés.

D'accord. Donc, je résume pour voir si j'ai bien compris :
On fait une expedition archéologique, histoire d'essayer de comprendre le rapport entre cette planète, Circé, et le Dévoreur.
On fait gaffe à la magie, aux éventuels trucs divins - ça, c'est ma partie - et je remets ma protection mystique avant qu'on débarque.

J'ai bon ?

 Bingo. Il y a même un atmosphère respirable, donc on prend des scaphandres juste par sécurité ou pour explorer en profondeur.

Parfait ! Si tout le monde a fait son paquetage, alors, on peut y aller....
Oh, attendez ! Le nom de notre section... On s'appelle comment ? 'Faut toujours un nom pour les groupes d'assaut !

 Les... Errants ? On a un chien errant, et trois vagabonds.

Non. On est pas des errants. Les errants, c'est ceux qui ne savent pas où ils vont.
Nous, on est des Vagabonds : on va où l'on veut !

Super ! Les Vagabonds, c'est parfait ! Donc, les Vagabond partent explorer les Ruines ! Aouh !

 Tu t'es fait mal ?

Je crois qu'il initie un cri de guerre théopolien.

Ouais, non... On trouvera un autre truc, okay ?

Le repas achevé, personne n'a trouvé de cri de guerre digne de ce nom. Cela n'empêche pas les Vagabonds de sourire quand ils s'équipent ensemble avant de rejoindre le doc dans le vaisseau d'atterrissage. Addie pilote, et les hommes parlent de ce qu'ils espèrent trouver sur la planète. Mais alors Qu'Ausbund demande comment Atridès utilise ses sens de dieu, Quelque chose change. Jake aussi le sent, et leurs regards se croisent. Lorsqu'ils se retournent, les autres sources ont disparu. 

Oh, encore vous.

Ehhh ! Gordon ! Comment ça va ? Et qu'est ce que tu fous ici ?

 Les yeux perdus me montrent les mystères perdus. Celui-ci a l'air gros. Trois yeux, trois mystères. Et vous ?

Nous, on va explorer cette planète. Tu viens avec nous ? Je sais que tu te fais chier...

 Oh, non, je ne m'ennuie plus depuis que je comprends ce que je vois. Enfin, parfois. Parfois suffit. Les yeux ne m'amènent que là où les choses sont perdues pour toujours. Si tu me vois, c'est que tu es toi-même perdu. Ou que tu vas trouver quelque chose qui l'est. Faites attention, les gamins. La mer de sang n'est pas loin d'ici, et l'entrezone s'arrête là où la mer commence. Il montre clairement la direction qu'ils prenaient avant de faire un arrêt.

Allez, quoi. Vous pouvez amener vos yeux.

 ... Je peux vous suivre. J'ai le temps, après tout.

 Oh oh ! Atridès ? J'espère qu'il va pas nous faire l'autiste sur le champ de bataille... ATRIDES ? Le retour à la normale est brutale ; ils sont en train d'entrer dans l'atmosphère de la planète sans nom. La cabine tremble et ils n'entendent Addie que gràce aux communicateurs dans leurs oreilles.

On va avoir quelques turbulences, mais c'est juste que toute la planète est de type "pas de technologie", ici. Tout va bien se passer, c'était un cas de figure envisagé. Accrochez-vous quand même.

Euh, oui ? , dit-il avec le ton du gars qui vient d'être réveillé, et qui sent bien qu'on lui a parlé. D'un truc important, de surcroît. Pendant qu'Addie déploie les ailes rétractables en quelques clics, Ausbund lui demande à nouveau de tirer sur un levier. Une fois cela fait, des ballons émergent de leurs containers, et se gonflent à mesure qu'ils descendent. Les secousses finissent par se calmer, et leur appareil ne lutte plus que contre le puissants vents. 

 Par l'Oracle, je ne suis décidément pas fait pour le terrain. Heureusement que nous avons des alliés puissants. Il utilsie son communicateur de poignet et demande : Sigma, faisceaux tracteurs s'il vous plaît. J'aimerais autant qu'on arrive sans dommages.

 Mais... Doc !!! Je peux le faire ! 

Cependant, leur discussion se termine lorsque leur appareil est posé avec plus ou moins de douceur au sol. Lorsqu'ils émergent de la porte qu'il leur faut forcer pour qu'elle s'ouvre correctement, ils réalisent qu'ils sont en pleine ville. Des bâtiments systématiquement à moitié détruits, si ce n'est pire. Depuis que la porte est ouverte, Ils peuvent tous sentir l'ambiance mystique qui entoure la planète. Surtout Atridès : l'oppressant poids de cette magie pèse en permanence sur son bouclier. Au ricanement de Stark, ses propres dons doivent en être renforcés. 


 Bien. C'est quand même terrible, non ? dit-il en adressant l'étendue de destruction et l'absence de végétation. C'est fou qu'il n'y ait pas de végétaux, ou de bruit d'origine animale. 

 Je croyais qu'un gros dévoreur avait tout dévoré. Ca semble logique, non ? Pas de vie, pas d'animaux.

 C'est vrai mais... Les plantes auraient repoussé. En fait, c'est le cas partout ailleurs,mais d'en haut on pouvait voir un net cercle, sans végétation. Avec une cité en plein centre. J'ai toutes les données, sur mon pad... Mais il ne fonctionne plus. Peut-être en haute altitude...

 Je peux voler et trouver le centre du cercle, moi. Si vous voulez.

C'est une bonne idée ! De toute façon, on peut déjà aller vers la cité, pour commencer.

Peu à peu, Atridès commence à voir les âmes de chacun, sans avoir à les toucher. C'est perturbant, surtout pour Vells.

Je vous attend. 

Tu sens quelque chose de divin, "Chef" ?

Attendez-moi !

T'inquiète, Doc, on t'attend !
Et vers Ausbund : Non, rien pour l'instant. A part que j'ai l'impression que mes capacités divines sont plus développés ici qu'à Théopolis. je vois nettement vos âmes, là... D'habitude, il faut que je touche la personne.

 Il m'arrive quelque chose du même genre. Le chien a l'air d'indiquer la route depuis les airs, suivons-le.

Ainsi, les cinq sources s'avancent au travers de l'ancienne cité. ils arpentent ruelles et escaliers, et tout est vide et détruit. Puis Atridès, sûrement à cause de sa taille, est le premier à voir une anomalie dans l'architecture au loin. Plus ils avancent,et plus il pense qu'il s'agit d'une gigantesque main. 

Intrigués, les Vagabonds avancent de nouveau entre des bâtiments de plus en plus grands. Et puis, dans cette rue escarpée, deux statues titanesques montrent une main et de l'autre, tiennent de grands bâtons. 



Hautes de bien douze ou quinze mètres, ce sont de superbes indications de ceux qui vivaient là auparavant. Des sortes d'humanoïdes fins, aux yeux démesurés, sans nez et sans bouches. Et ces deux-là en particulier montent la garde. 

 Oh ! Il y a des inscriptions ! Je crois qu'on va établir le camp ici pour ce soir.

 Je trouve une tanière digne de ce nom et je marque le terrain. Restez dans le coin.

D'accord, on t'attend. Je vais en profiter pour voir comment fonctionnent mes autres pouvoirs divins... Aussi, il essaye plusieurs choses, dont communiquer avec ses "fidèles". Simplement pour voir s'il existe une différence notable. Les prières sont audibles et faciles d'accès. Et elles viennent de par là, derrière les statues. En tous cas c'est l'impression du demi-dieu. En se tournant vers le centre de la ville, c'est comme s'il se tournait vers un microphone à prières. La distance n'affecte pas les voix. Sur Zibbarrit, le peuple qui a appris la rébellion prie Atridès de bénir leurs échanges commerciaux. Et de leur donner la sainte Audace. Sur un vaisseau perdu dans l'espace Terran, Latrelle et son robot accompagnent Macar. Sur le vaisseau, toute une ville prie pour leur prompt retour. Tout est clair et audible. 

Ses autres sens perçoivent rapidement autre chose. Au centre de la ville se trouve certainement un domaine divin, si puissant qu'il résonne avec le monde des hommes, ou quelque soit le nom que ces êtres portaient. Une porte vers ailleurs. 

Oh, les gars ! J'ai trouvé un truc , dit-il en se relevant, un truc divin, au centre de la ville.

 Tu veux qu'on aille voir ? Doc, y'en a pour la nuit, vraiment ?

 Au moins la nuit. Je ne suis pas traducteur, je n'ai pas d'instruments, alors je vais compter sur mes rêves pour nous guider. 

 Bah... Vous faîtes quoi alors ?

 Une copie des inscriptions ! Quoi d'autre ?

Je propose qu'on attende le retour de Stark, et après on va faire un tour là-bas, tous ensemble.

Addelaïd revient vite ; comme elle dit elle-même : 

 C'est pas les bâtiments vides qui manquent. J'ai trouvé un espace discret, difficile d'accès et...  vide, forcément. Qu'est-ce que ça dit ?

 Le doc veut utiliser ses rêves pour en apprendre plus, mais Atridès sent un truc par là. 

Oui, l'oeil de sang confirme. Par là se trouve un mystère oublié. Je crois qu'on va dans la même direction !

Qu'as-tu dit, Jake ?

Qui, moi ? Rien.

Eh, Doc, tu n'aurais pas entendu un truc genre : "Par là se trouve un mystère oublié." ?

 Juste un murmure informe. C'est très précis, comme question, ça, Atridès. Non ?

Ahaha ! Oui ! C'est parce que j'ai oublié de vous le dire, mais il y a Gordon avec nous.
C'est une sorte de fantôme, qui se trouve dans la dimension des trucs perdus... Je crois. Il m'a expliqué, mais j'ai pas tout compris...
Jake le connait et le voit aussi. Et il venait de dire ça quand tu as semblé entendre quelque chose, donc...

 Une "sorte" de fantôme ? Pourquoi te suit-il ?

 On s'en fout, non ?

 Non, ça m'intéresse. C'est peut-être lié à ce qu'on va trouver.

Bah, il est lié aux trucs perdus, donc, ouais.

Mais sinon, si ça vous intéresse, je ne vais pas parler à sa place. Jake et moi, on peut faire relais.

 D'ailleurs, la proximité affole l’œil. Vous feriez bien d'avancer, je le sens impatient.

Là, par exemple, il dit : "D'ailleurs, la proximité affole l’œil. Vous feriez bien d'avancer, je le sens impatient." Et ne me demandez pas ce que c'est que cet œil, j'en sais foutrement rien ! A part qu'il y en a un qui flotte autour de lui et que... Que... Huum.

Un ange passe.

... Dis, Gordon, on va y aller, mais c'est quoi cet œil ? Juste comme ça...

 Aucune idée. Mais leur compagnie est rassurante, et sans eux je serais déjà mort. Enfin, re-mort. Dévoré par une horreur titanesque. Je sens bien qu'ils m'orientent vers des choses. Ils ne font que regarder, après tout, c'est normal qu'ils cherchent des choses intéressantes.

 Ils t'obéissent ?

 Jamais. En fait à y penser ,ce serait plutôt moi qui leur obéit. Quand ils partent, je les suis. C'est ça ou rester seul jusqu'à ce que vous apparaissiez de nulle part.

Euuuhhh... Ouais. En fait, il nous explique que ces "yeux", ils sont curieux de choses intéressantes, et que lui, il les suit. Parce que sinon il serait dévoré par un truc qui tourne dans le même espace, une "horreur titanesque". Il les utilise en garde du corps, ces yeux, en fait...

Moi, je pense qu'il faudra s'intéresser à Gordon après... 'Fin que le Doc s'intéresse à lui. Parce que moi, je suis pas sûr d'avoir tout compris.

Mais on commence par aller voir la structure ?

 Bon... D'accord. Vous êtes tous si jeunes et si pressés... Et à contrecœur, le doc finit par se ranger à l'avis du chef de terrain. Bientôt, les sources remontent la rue principale, le long des bâtiments délabrés, même s'ils sont de plus en plus rares après les statues. le chemin de pavés jaunes les mène doucement vers le centre de la ville, et lorsqu'ils passent les derniers bâtiments, une grande étendue circulaire d'un kilomètre de rayon s'étend devant eux. Répartis en un cercle parfait, des centaines, des milliers... peut-être des centaines de milliers de squelettes les attendent. Répartis en deux cercles concentriques si parfaits qu'ils ont dû être disposés à la main, on distingue vite les différences. Le cercle extérieur est composé d'ossements difformes et gigantesques, alors que le cercle intérieur est composé des restes des habitants de la planète. Et ils sont tous morts à genoux.


Au centre, une construction étrange ressemble à un massif diapason. On peut distinguer un escalier à l'intérieur, qui descend sous la construction.

Euhhhh... Alors, Jake peut confirmer que je suis pas du genre à flipper pour un rien, mais là... C'est flippant. En fait j'ai vraiment pas envie de descendre dans ce truc. Du moins comme ça, les mains dans les poches.

 Ça va de soi. D'un autre côté, ils sont tous morts.

 Une idée de ce qui a pu se passer ici, Doc ?

 Pas de certitude avant la nuit, mais... Vu les énergies ambiantes massives à faire peur à un dieu, je dirais que même le dévoreur n'a pas pu aller plus loin que cet endroit. Derrière le doc, un des yeux volants file vers l'escalier et le dévale à toute vitesse. Gordon regarde dans sa direction, puis vers les vivants... Les deux autres yeux semblent regarder partout ailleurs. Les aliens sont tous en position identiques, et ne sont pas morts par violence. Chaque squelette est intact. Si ce n'est pour les ravages du temps. Les monstres, eux... Sont difformes mais je ne saurais pas dire si c'est de naissance ou si ils ont subi des modifications. En tous cas eux non  plus n'ont pas été arrêtés par la force.

 Et si c'est vrai que les énergies résiduelles sont fortes... Je ne sens pas de protections mystiques particulières. 

Pour Atridès par contre, l'ambiance semble plus pesante que pour quiconque. Il peut sentir une sorte d'Olympe au fond, loin sous ses pieds. Peut-être pas une Olympe... Un Tartare ? Quelque chose d'ancien, en tous cas. 

Nan, je ne sens pas de protections non plus, mais une chose est certaine, il y a un domaine de Dieux au fond, là... Et... Je... Je n'ai pas trop envie d'y aller.

... Sans en savoir un tout petit peu plus, du moins. Pour Atridès c'est l'inconnu. Un vrai inconnu. Un inconnu excitant, certes, mais dangereux. Même pour lui. Le genre de chose qui pourrait être assimilé à un saut d'une falaise maritime affichant une vingtaine de mètre de haut pour un mortel.
Si on se loupe pour son entrée en eau, c'est fini. Si le fond est plus bas que prévu, c'est fini aussi. On a envie d'y aller, bien sûr. Mais on sent aussi sa vessie faire des siennes. Et on préfère que quelqu'un aille tranquillement sonder la profondeur avant.

Gordon, un de tes yeux est parti voir, je le sais. Il y a quoi, là-bas, mon pote ?

Je vais aller voir.

Addie ? Qu'est-ce que tu fais, depuis tout à l'heure, avec ces pierres ? Tu laisses ton odeur partout depuis les statues.

 T'occupes, toutou. Je prévois, c'est mon truc. 
 Alors si on ne descend pas, que fait-on ?

 Vous je ne sais pas, mais moi je vais aller voir les inscriptions sur cette arche.

Je peux rester là ET aller voir.

Bah, le Doc n'a pas tort : on n'est pas pressé, hein ? Ça serait mieux d'y aller - même pour toi, Jake - une fois que Gordon sera revenu pour nous en dire plus, ou même une fois les inscriptions de l'arche décodées.

Imagine qu'il soit marqué : "si un Chien descend, il sera maudit sur dix générations". Bon, c'est pas très crédible, d'accord, mais vous voyez l'idée ?

Le groupe reste donc soudé et avance au-delà du premier cercle. Les sources se fraient un passage à travers les os de dévoreurs, et marchent quelques centaines de mètres dans un silence si oppressant qu'il ralentit chaque mouvement. Dos à dos, les Vagabonds avancent jusqu'au second cercle. 

 Au moins y'en a un qui garde son sang froid, fait Ausbund en pointant Jake du doigt, qui porte dans sa bouche un croc de dévoreur de la taille d'un bras. 


 Marrant, ça. Ils n'avaient pas de nez, les locaux. A voir leurs cadavres, ils sont morts en plein rituel pour protéger cet endroit. 

 J'insiste pour que nous attendions une nuit avant d'entrer. Peu importe votre ennui. Regardez, il y a des inscriptions sur cette sorte de  diapason. 

Autour de l'arche donnant sur l'escalier, on peut maintenant voir l'entrée en forme de diapason de plus près. Cette fois, peu d'écrits. Juste des dessins. Des histoires lisibles. Le doc réfléchit beaucoup, note sur du papier et suppose... Mais Atridès lit ça facilement. Déjà, il y a un liseré décrivant l'aube des temps jusqu'à la nuit des temps.

 Oh, bien vu.

D'abord, il y a une foule qui subit les attaques incessantes de... beaucoup de choses. Ils ont l'air malheureux, comme s'ils étaient en enfer. Puis, des gens se sont réunis et ont créé le diapason. Il sert de prison. Et là, les dessins se séparent en trois histoires. Il y a l'histoire d'un arbre, pleine de flèches allant dans tous les sens et de trucs difficiles à interpréter. Puis, celle d'une sorte de gourde et d'un démon. Et les histoires s'entremêlent. Chaque démon part des histoires pour tourmenter les gens du début. Et puis après le diapason... 

La première histoire est si étrange... Tout part d'un arbre. Et quelqu'un y grimpe, et coupe la seule branche saine. L'arbre meurt, et l'homme part en voyage avec sa branche.Il a des aventures, il revient chez lui, meurt, et toute l'histoire est une répétition de cette aventure, avec à chaque fois un protagoniste différent. Chaque fois, un démon en sort et tourmente les gens du début. Alors ils décident de jeter la branche dans le diapason. Fin. 

La seconde histoire raconte la vie d'un démon et celle d'un héros. Un jour leurs routes se croisent pour la première fois, et un proche du héros est tué par le démon. Le démon tue, le héros grandit. Il amasse des objets de pouvoir, et devient puissant. Leurs routes se croisent à nouveau, mais chaque fois le démon détruit tout ce qu'a le héros. Jusqu'à ce qu'il aille dans un village plein de gens affamés, avec un gros qui les maltraite en buvant sans cesse de sa gourde. Le héros tue le gros, prend la gourde et confronte le démon pour la dernière fois. Il fout le démon dans la gourde, et la gourde, dans le diapason. Fin. 

La troisième histoire est la fin du monde, d'après le liseré. Des démons pleuvent du ciel pour assaillir le diapason. Tout le monde meurt, Fin... mais il y a une suite. Une femme trouve le diapason. Elle marche au travers de deux cercles d'os... et prend la gourde. Puis, elle couche avec le démon, et ils ont genre, plein d'enfants. C'est hyper graphique et vachement bien orné. 

 Gott im himmel...

Atridès regarde ses compagnons un par un, l'air un peu perdu.

J'ai rien compris... C'est quoi ces histoires ? C'est chronologique ? Ce sont des choix ? Et c'est quoi cette gourde ?

Huit épaules se soulèvent et redescendent en rythme pour marquer l'incompréhension générale. Addie se risque à une explication.


 Ils ont créé cet endroit pour y enfermer leurs merdes. Et ils devaient connaître le futur, et savoir qu'ils allaient tous mourir un jour. Regarde, la femme. C'est la seule dans toute l'histoire, et surtout... Elle a un nez. 


 Alors le doc avait raison. C'est Circé.


Attends, un endroit pour enfermer toutes les merdes... C'est... C'est exactement ce qu'il nous faut ! Et... Ça voudrait dire que Circé a enfanté des démons ?

 Ça me semble évident, non ? Elle corrompt des planètes entières pour en faire des soldats-mages tout rouges... C'est assez démoniaque pour moi. Tu crois qu'on pourrait l'enfermer... Ici ?

Oui, c'est ce que je crois. Et cet endroit est une bénédiction pour nous...

Mais il va falloir amener Circé et son démon ici. Ça ne sera pas facile. Et, si j'ai bien compris, il nous faudrait cette gourde. Pour enfermer le démon. Et mieux comprendre la façon dont fonctionne cette gourde : pour le héros, cette gourde, c'était un simple récipient.
Je pense que ce qu'il faut, c'est surtout de savoir comment il a fait pour en faire une prison. Obtenir la capacité d'enfermer un esprit maléfique dans quelque chose. C'est peut-être un don des Dieux.

Il faudrait que je parle de ça à mon père...

Après les découvertes de la journée, le soleil de la planète perdue finit par se coucher. Pris par l'hésitation, même les plus hardies des sources finissent par se ranger à l'avis de Vells ; une nuit d'introspection leur sera peut-être utile. Aucun d'entre eux n'est assez humble pour le dire, mais tous sont assez intelligents pour sentir à quel point l'ambiance locale pèse sur les épaules de chacun.

Retirés dans le bâtiment sécurisé par Addie, ils installent leur couchage pendant que le doc leur explique son plan nocturne :

  Bien. Comme vous le savez certainement, mes talents prophétiques sont limités aux rêves. Enfin, pas uniquement, mais une grande partie de mes prévisions viennent en rêves. je peux aussi utiliser mon talent pour réussir sans faute certaines tâches durant le jour, mais je dois d'abord rêver de l'événement. Bref. Sachant cela, j'ai demandé à votre ami Traüm de rester en contact avec moi. Ce que je vous propose, c'est de le laisser entraîner vos âmes dans mon rêve, et de partager mes visions. Elles sont spirituelles par nature, comme l'essence des rêves.

 Okay, on a l'habitude.

  Oh. Je m'attendais à autre chose.

 Doc, on a vécu avant de vous rencontrer. Qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse ?

 Nous allons dormir en nous tenant la main, c'est à peu près tout. Je ne peux donc emmener que deux personnes.

J'aimerais bien faire parti du voyage. Vu que je risque fort d'être parmi ceux qui descendent dans ce trou, je pense que ce serait une bonne idée d'en avoir un petit avant goût.
Et puis, maintenant que je peux baisser mon bouclier, c'est possible, donc...

Je vais monter la garde. Et attendre le vieux avec ses yeux volants. Il n'est toujours pas revenu, ça m'inquiète un peu.

Oui, moi aussi. Mais là, tout de suite, on ne peut pas faire grand chose sans prendre des risques complétement inconsidérés.

 Bien, qui d'autre ?

 Si Atridès dort, je devrais rester éveillé avec Jake.

 Ça tombe bien. Je voulais essayer.

 Parfait. Prenons un bon repas, faisons un feu. Nous dormirons plus facilement.

Les sources sortent alors leur matériel. Un simple briquet leur permet de mettre le feu à quelques branches séchées ramenées par Jake, et ils réalisent alors que sans disques de stockage, leur nourriture leur était inaccessible. Ils se passent donc de repas pour ce soir. Dans le feu, Atridès peut sentir l’œil de son père les observer de loin pendant que le doc leur installe trois couchettes, côte à côte.

Il continue de fixer le foyer, et, les yeux dans le vague demande au feu...

Dis, Père, qu'est ce que tu en penses de tout ça, de cet endroit ? Et aussi, je me demandais : tu sais si c'est vraiment possible d'enfermer un Démon dans une gourde ?

Bien sur. Les dieux sont des créatures conceptuelles. Maints dieux aux yeux bridés ont fini leurs jours dans une gourde ou un puits. Pour tout t'avouer, depuis le renouveau que toi et tes amis avez provoqué, plusieurs des dieux survivants ont demandé asile chez nous. Certains d'entre eux m'ont promis de veiller sur toi pendant que je veille sur le peuple. 

Ah ? C'est gentil, ça ! Tu les remercieras de ma part... Mais, pour le coup de la gourde, tu sais comment ça marche ? Moi, par exemple, je pourrais enfermer un Démon dans une gourde, si je savais comment faire ? Genre, il faut faire des mouvements particuliers, dire certains mots ?

 Tout dépend du type de démon que tu affrontes, mon fils. Dis m'en plus. 

Je ne sais pas vraiment... Là, je suis devant un truc que je ne comprend pas trop. C'est une sorte de temple xéno. Et tout ce que je sais, c'est que Circé est passée par là avant moi. Et qu'elle a du y entrer, et ouvrir une gourde qui contient un Démon. C'est ce que disent certaines écritures.
Et que c'est comme ça qu'elle est devenue la Déesse Rouge qui mange et transforme les hommes. Je sens une porte vers un royaume divin au fond de ce temple... Mais je n'y suis pas encore allé. J'imagine que c'est le lien avec les Dévoreurs de la Galaxie du Chien. Elle a du libérer ce qu'il ne fallait pas.

... Il y a plein d'écriture devants, des squelettes de ces xénos, et de leurs agresseurs devant. Arrangés en cercle. On essaye d'en savoir plus avant de rentrer, parce que je ne le sens vraiment pas, ce temple...

 Tout ce que je peux faire, c'est demander à Izanami de te prêter sa force durant la nuit. Tu pourras peut-être converser avec l'un de ces morts. Je n'ai pas trop de mal à te parler, c'est surement dû à l'endroit où tu te trouves. Je pense que ça pourrait marcher. 

Ça tombe bien, j'allais me coucher.

... Et merci, père.

 Tout pour mon fils.


Ainsi, malgré leurs ventres vides, les sources trouvent-elles tout de même le sommeil après un temps, main dans la main. 

Le corbeau aux yeux bleus vole au dessus du désert, caché parmi une nuée de corbeaux ordinaires. En bas, à même le sable, les hommes et les femmes enturbannés arpentent  l'aride étendue sans fin. Chaque arbre qu'ils trouvent est déraciné, chaque cactus est réduit en miettes. Un seul homme ne porte aucune protection, et ne s'attarde pas à détruire les végétaux. En fait, il n'accompagne même pas les locaux. Non, à la place, il suit le corbeau aux yeux bleus du regard. Ses cheveux sont noirs, ses traits fins, son visage long. Le corbeau aux yeux bleus le reconnaît, mais pas assez pour mettre le bec sur son nom. 


 D'en haut, il ne peut pas voir les vers géants qui nagent dans le sable, au loin.

Le corbeau descend en formant de petits cercles vers la silhouette. Lorsqu'il se pose, c'est pour plonger ses yeux dans ceux de l'homme aux cheveux noirs. Et pencher sa tête sur le côté, d'un air interrogatif. Sur le perchoir qu'est ce cactus abattu, il réalise que l'homme, au visage flou, prend soudain plus de substance que tout ce et tous ceux qui l'entourent. Et finalement, lorsque son sourire se forme, le corbeau réalise qu'il connaît ce visage.


Eh. Je suis navré, mais tu as l'éternité pour finir ce rêve. Tu dois venir avec moi.

Je te suis, donc. Guide-moi, je n'ai pas l'habitude de me balader dans les rêves...

 Ouf, tu sais qui tu es. Tu étais en pleine dissociation d'identité. C'est dangereux pour les esprits humains. Le doc nous attend, mais on doit passer par Addie d'abord. 

Traüm sort une paire de ciseaux, pas vraiment de sa poche, mais plutôt de nulle part. Un instant il a la main gauche vide, et le moment suivant, pouf. Ciseaux. Puis il perce à travers le rêve, et lève le bras, créant un passage. Les deux sources s'y engouffrent, Atridès en premier, puis le "rideau" se referme. 
De l'autre côté, une petite fille blonde est agenouillée face à des soldats aux masques et armures noirs et rouges. Leurs visages sont des têtes de mort, et ils tiennent de larges fusils équipés de viseurs avancés. A leurs pieds, la jeune Addélaïd a les mains posées sur la plaie d'un homme aussi blond qu'elle. Le sang s'écoule, et elle tente tant bien que mal de remettre ses organes à l'intérieur, en proie à une véritable crise de nerfs. 

Encore ...? Gott... 

Quand Atridès tente de trouver des détails, il réalise que les soldats sont désormais des agents du Sélénium aux costumes reconnaissables à leur coupe impeccable et à leurs code couleur. Il pourrait jurer qu'ils étaient habillés différemment l'instant d'avant. De plus, il remarque vite en regardant le mort que son visage est flou. 

 Addie ? C'est juste un rêve, ma belle. C'est moi. Isidore, tu sais ? Viens, avant qu'elle n'arrive.

Atridès ne fait pas de réflexions quant à la scène qu'il a pu observer. Mais il ajoute pour Traüm :

Ça veut dire quoi, dans les rêves, quand un visage apparait flou ?

 Quelle l'a oublié. Vu le changement des uniformes des soldats, je dirais que quelqu'un a modifié ses souvenirs. Quelle surprise, hein ?
.....

Addie essuie ses larmes. Comme Atridès avant elle, son visage passe rapidement de la terreur et des larmes à l'indifférence adulte qu'elle exude habituellement. Quand elle donne la main à Traüm, elle retrouve son apparence. Traüm agit réellement comme une ancre pour sa personnalité. A-t-il fait de même pour le demi-dieu ?

 Allez. On est pas obligés d'en parler. Rejoignons le doc.

Tandis que la scène se fige, Traüm reprend ses outils pour découper un passage. Addie s'y jette sans regarder derrière elle, et les garçons la suivent rapidement avant que le rêve, privé de rêveuse, ne cesse d'exister.

Le rêve suivant est surprenant, surtout parce qu'il est bien plus étrange que les deux précédents, ce qui paraissait impossible. Il se trouve que non. 

Vells est dans le vide de l'espace, peut-être même dans l'Entrezone de Gordon. Partout autour flottent des choses absurdes, petites ou titanesques. Une pyramide de pierre dotée d'un oeil humain, des crayons, des clés, des chaussettes dépareillées, des couronnes et des cadavres, des véhicules et des armes, des morceaux de corps, humains ou pas. La vraie différence avec l'Entrezone, c'est que le doc, vu de dos, marche sur une gigantesque branche d'arbre. Il suit le tronc principal, mais elle se ramifie à l'infini, et il semble impossible d'en voir le bout. 

Oh wow. J'en ai vu des bizarres, mais là...

Eh, doc ! On était pas censés voir le futur ? C'est quoi cette merde ? Si c'est pour faire ça, je préfère autant retourner dans MON rêve. Et il était franchement déprimant, pourtant...

Mais le docteur continue d'avancer sur la route de cette branche, sans se retourner, les bras écartés pour conserver son équilibre.

Ouais mais là, il va se planter, le Doc ! 'Faut l'aider ! , annonce le théopolien en partant rapidement à la suite du scientifique.
Il est agile comme une moule à marée basse, et il tente ça !

Dans un acte de pure bienveillance, Atridès rattrape le doc, tout en s'assurant au passage de ne pas choir lui-même dans le vide. Malgré leurs appels, il semble en transe, et continue d'avancer. Aussi, Atridès finit-il par se saisir de son épaule, assurant au moins qu'il ne tombera pas. Comme s'il réalisait enfin leur présence, il se retourne... Et c'est Atridès qui manque de tomber !

Je vais vers la meilleure version de moi !

Ses yeux sont vides, extirpés de ses orbites. Perdus à jamais. Le sang qui s'écoule de ses orbites est noir comme le jais, et sa voix est celle d'un illuminé...

Oh putain de merde !

Comme en écho :

Putain de merde ! 'Bouge pas, Doc, bouge pas, on gère ! En fait, Atridès prend sur lui, et maintient le scientifique sur place. Une grosse paluche sur l'épaule.
... Traüm, c'est quoi ce truc, c'est un cauchemar ?

 Euh... Je ne sais pas trop ; c'est la première fois que je viens dans un rêve prophétique. Je ne crois pas que ce soit le doc. Ça a plutôt l'air d'être une partie de sa vision.

Ouais, bah, sa vision, ça à l'air d'être un putain de cauchemar !
Tu peux l'aider ?

 Je ne crois pas. Pas pour le moment en tous cas. Vu qu'on est dans son esprit, et que c'est une vision, il faut la laisser se dérouler. Je ne sais pas où est le doc. Le vrai, je veux dire.

 Il faut suivre la branche parfaite pour se connaître soi-même, ou boire de la gourde pour obtenir le pouvoir. Œil pour œil, espoir pour savoir. La vue perdue est un savoir retrouvé. Je dois suivre le chemin. Je vais vers la meilleure version de moi !

Et si on va à l'envers ?

 ...

Le Vells illuminé ne répond pas ; il essaie de se débattre, un peu mollement, pour retourner vers l'avant.

Atridès le maintient tranquillement sur place, du moins jusqu'à aboutir à un consensus avec Traüm et Stark.

Bah, je sais pas... S'il ne risque rien dans son rêve, ça serait bien de savoir où ça mène. Puisque, si c'est prophétique, c'est là qu'il ira. Mais l'idée d'aller dans le sens inverse, j'aime bien aussi...
On pourra même faire les deux, s'il on a le temps.

 Je ne crois pas. La zone de rêve classique est centrée sur le rêveur. Vos rêves ne sont pas des dimensions qui continuent ce sont littéralement vos esprits qui les créent. Si on sort de sa zone, il se pourrait qu'on ne fasse que sortir du rêve. Mais encore une fois, c'est prophétique. Je nage en plein terrain inconnu.

 Lâche-le, je crois qu'il est assez déconnecté pour ne pas tomber. 

A contrecœur, Atridès finit par relâcher le doc aveugle, et il reprend sa litanie en suivant la branche. Les embranchements s’enchaînent et se multiplient, mais le doc suit la branche principale, la plus longue et la plus forte. Au bout d'un moment, plus aucune branche ne se sépare plus de la leur, et bien qu'elle soit de moins en moins épaisse, les trois suivants ont un excellent équilibre, et le doc semble marcher comme s'il allait chercher son kawa matinal. Dans l'espace autour d'eux, des yeux titanesques les regardent avancer, si immenses qu'ils font partie du décor désormais. A la fin de la branche, se trouve une seule feuille. De la taille du doc. Il y pose la main, et la lumière emplit alors... tout.

Les trois spectateurs se retrouvent alors dans un étrange palais, ou plutôt une tour, dans un espace si blanc et aseptisé qu'on se croirait dans un hôpital, mais du futur. Pas comme la version réelle du futur dans lequel Atridès vit depuis son départ d'une planète aux mœurs médiévales. Le futur futur. Des fenêtres on peut voir une planète florissante et le soleil couchant sur la mer en contrebas -un contrebas vertigineux puisque la tour semble être construite sur une falaise. Un pilier central semble déborder d'énergie, et leurs sources en captent d'ailleurs une grande partie. Une sorte d'oeuvre d'art gravée de milliers de symboles et faîte de maints métaux différents. On y trouve quelques runes Olympiennes, et quelques celtes, et d'autres trucs de prêtres.

Le doc a retrouvé ses yeux. De derrière le pilier, une source se manifeste si vite dans sa splendeur, que personne ne l'avait remarquée malgré sa proximité. Celle de l'Ange et celle Williams ne sont rien face à cet individu. Dos au soleil, seul son contour est envisageable. 

 Non... C'est.. C'est...

Ah. Nous savions que ce moment devait arriver. Parfait.

 C'est toi, la meilleure version de moi ?

La version parfaite, le futur ultime. Je sais tout ce qui va t'arriver, quand tu es, et pourquoi tu veux devenir moi. 

L'échange semble être indépendant d'eux, et malgré la sensation que tout cela est trop réel pour être un rêve, leur présence quasi fantomatique est troublante.

Vers Traüm et Stark :

Le Doc a l'air de le connaître, ce type bizarre... Moi, je ne l'ai jamais vu.
Il vous dit quelque chose ?

 Je crois que c'est lui. Avec un costume high-tech. Et une aura monstrueuse. 
 J'aime pas son langage corporel. Il est sur l'attaque.

 Alors... Tu vas pouvoir me dire comment nous battons Circé ?

 Oui, je pourrais. Ou je pourrais devenir toi. Entamer une nouvelle fois le parcours, mais sans les erreurs de parcours. Et te laisser ici, à gérer l'utopie. 

 Je ne sais pas, je... 

 Oh, je suis navré, ce n'était pas vraiment une question. Le doc se met sur ses gardes, prêt à bondir. Avant que tu ne t'emportes, considère ceci : Je sais tout ce que tu ne sais pas. J'ai deux mille ans de plus que toi. J'ai l'appui d'une race ancienne et une technologie qui te dépassent. A l'heure actuelle, tu ne peux prédire l'avenir qu'en rêve. Je prédis la seconde qui suivra, j'ai déjà vécu cette scène, mais en plus j'ai déjà vécu notre avenir immédiat. Ne me force pas à revivre le moment où je te tue.

 Mais pourquoi ?

 On s'ennuie, dans une utopie... Ta vie est pleine de défis à relever. D'options d'évolution. Tu n'en ferais pas usage comme je vais le faire.

Hé, le Doc du futur, tu me vois, tu m'entends ? , dis Atridès en se rapprochant tranquillement du duo. Pas de réaction, ni de l'un, ni de l'autre. Traüm n'essaie même pas de le retenir. Atridès passe au travers des deux Vells pendant que celu du futur continue d'expliquer son funeste dessein.

 Imagine. Je peux définir le meilleur choix pour chaque situation. Tout sera ordonné bien avant ce que j'ai pu faire auparavant. Tu ferais un sacrifice logiquement valide. 

 On... On pourrait en parler, plutôt ? Fait le doc tout en se rapprochant petit à petit de la feuille géante qui l'a amené là. Mais le doc masqué réagit plus vite. Il bondit si vite que la tête de Vells ne s'est pas encore détachée du cou lorsqu'il touche la feuille en premier. 

L'espace autour d'eux devient noir. Puis ils voient, de très loin les yeux géants et le champ de détritus oubliés de l'entrezone. Et de loin, la branche. Le Vells la parcourt à l'envers. 

 Ah, bah on va voir ce que ça fait au moins ! Les trois spectateurs sont tirés à une vitesse incroyable pour suivre le chemin du monstre. Pourtant, on dirait que c'est le monde qui bouge, et pas eux. Vells se retrouve face à la cassure dans le tronc qu'est la base de la branche. Il saute dans le vide, entraînant les sources derrière lui. Ils se réveillent et découvrent la scène avec lui : Atridès, Stark, Traüm et Jake lui demandent s'il a la réponse. 

 Oh, ne vous en faîtes pas pour Circé. J'ai le plan parfait.

Tout le monde s'éveille. Traüm n'est pas de la partie, il faut un temps pour qu'Atridès se rappelle qu'il est quelque part, avec Mia. Le Doc semble confus, et Addie brise le silence la première.


 On est d'accord, le doc ne touche à aucune branche sur cette planète ?

Ouais... Euhhh... J'ai pas tout compris. Mais ce que j'ai compris, c'est que tout ça, ça craint. Et que le Vells du futur, il a l'air très con. Quand on a tout vu du chemin, on ne joue pas au salopard devant ses alliés, non ? C'est débile. Ah ouais, non... C'est vrai qu'il ne nous voyait pas le Doc du futur. Et donc... Atridès réfléchit à des dizaines de possibilités. Et ce n'est pas son fort. Il s'embrouille dans ses propres pensées.

Il faut qu'on en parle avec le Doc... Ce qu'il initie :

Doc ? Ça va ?

 Sous le diapason, il y a un chemin que seul Atridès peut ouvrir. Derrière se trouve un royaume-prison, On y trouvait une gourde, une branche et mille autres maux qui ont hanté ce monde. Qui boit de la gourde devient cupide et peut enchaîner la volonté des autres. Elle enferme aussi un monstre. La branche a été coupée de l'arbre du temps. Et si jamais on la touche, elle nous conduit à un futur où nous sommes à notre maximum de pouvoir. 

Mais ça peut très mal tourner. Je n'y toucherai pas.

 On a du louper le début.

Atridès fait un signe de tête à Stark, acquiesçant, avant de se retourner vers Vells.

D'accord. Merci pour les infos, Doc. Et ne t'inquiète pas : la magie, les Dieux, les malédictions, les trucs du genre, je vais m'en occuper. Je pense que je suis né, destiné, à nettoyer ces conneries... Moi, je n'ai pas d'ambitions débordantes. Je suis juste un bon gars, un bon soldat.

... En fait, tu sais, ce que je voulais, c'était seulement savoir si tu vas bien.
Il fait encore nuit. On a encore largement le temps de discuter avant de se remettre en route.

Tu te souviens de ton rêve ?

Ma mémoire est impeccable, même avec les rêves.

Parfait. Donc, tu vas pouvoir nous expliquer, le coup de ton double du futur ? T'avais l'air de le connaître... Et aussi nous dire comment tu as interprété ton "rêve prophétique".

Le doc ne comprend pas bien la question mais se plie aux interrogatoires sous l'oreille intéressée d'Ausbund, de garde. Vells ne semble pas se rappeler le passage où il perd ses yeux et marche sur sa branche, mais à part ça son rêve fait trois fois ce qu'ils ont pu partager. 

 Et j'ai su qui c'était... Parce que c'était moi. Et puis, mes prémonitions aident à limiter la surprise.

Oui, bien sûr... Mais nous, on t'a vu avec les orbites vides, marcher sur les branches d'un arbre, ses ramifications, comme un zombie. C'était flippant.

Alors, demain, on va y aller, dans ce trou. Et tout le monde devra veiller sur tout le monde, comme des hoplites. J'étendrai mon bouclier sur vous tous. Et vous, eh bien, vous ferez aussi de votre mieux pour que l'on soient les premiers à entrer dans cet endroit et à en ressortir sain d'esprit...

Sauf que je ne suis toujours pas sûr de pourquoi on doit entrer là-dedans. Même si je suis sûr qu'on doit le faire.

Pourquoi on devrait ? Si c'est une prison comme tu penses, on ferait mieux de ne pas tenter le risque. Qu'est-ce que vous avez vu, au juste ?

C'est une prison. Mais on doit le faire parce que je pense que ça nous donnera une chance d'obtenir l'avantage sur Circé. Et Circé compte tout dévorer, donc il faut l'arrêter. Ton toi du futur nous a dit que c'était bon... Qu'il nous expliquerait comment faire...

... Mais tu sais, Doc, je fais confiance au toi du présent. Pas au toi d'un futur possible. Lui, c'est un sale con. C'est compliqué à expliquer, mais...

Et Atridès se met à raconter à Vells ce qu'il a vu dans le rêve. Dans le détail. Prenant aussi le temps qu'il faut pour laisser à Stark la liberté d'intervenir dans son récit. Tous deux concordent et Jake et Ausbund écoutent. Le doc ne les interrompt pas, et acquiesce à tout, sauf aux passages concernant leur présence. Il se souvient de toute la séquence d'événements comme un spectateur, mais comme il dit :


 Je n'avais pas conscience de mon corps comme vous. Ni conscience de vos présences.




Qu'est ce que tu penses de tout ça, Doc ?

 Je crois que l'entrezone joue un rôle important dans tout cela. 
 Ouais, je suis pas fan de cet endroit. 

D'après les explications de Jake et Atridès, il s'agit d'une dimension poubelle, où les choses perdues ou bannies se retrouvent. Il doit contenir des horreurs et des merveilles. 

 Ouais, mais c'est inhabitable.

Ca reste utilisable. Je crois que la branche pourrait être utilisée pour accéder à cette dimension. Il suffit de ne pas aller jusqu'au bout de la branche. 

 Alors quoi ? On force Circé à la toucher, on la suit, et on la pousse dans le vide ?

Je pensais à y jeter sa gourde, mais si on pouvait l'envoyer elle... oui, pourquoi pas.

Vos plans sont ridiculement compliqués. C'est quoi l'histoire de cette gourde alors ? C'était ça les gravures ? Le village était hanté par un homme rendu avide qui possédait l'âme des autres ? et le héros lui pique la gourde, n'en boit pas, et y enferme un démon à la place. 

C'est quoi alors, l'histoire du démon ?

sur les gravures, il était juste gravé de façon profonde pour créer de l'ombre.

 En tous cas ce qui est certain, c'est qu'on doit séparer la gourde de Circé. Mais je parierais que c'est pas le seul fil du nœud d'embrouilles. A mon sens on en a appris assez pour ne pas aller risquer nos vies pour une branche.

 Mais, Adelaïd, les implications et les utilisations...

  ...Ont une bonne chance de nous péter au visage. De toutes façons, c'est Atridès le seul a pouvoir ouvrir cette porte, alors autant le laisser décider.

On va y aller. On n'a pas le choix. Circé menace le monde entier. Même le monde de Mia. J'ai vu ses armées dans le futur... Elles sont énormes.
La question, c'est ce que l'on fera là-bas, en dessous. Je ne sais pas encore... Je vais y réfléchir.

Pour l'instant, prenez tous du repos. Vous devrez être prêts demain matin. Je vais veiller. Avec Jake.

Merci, je vais en profiter. De toutes façons cette planète est morte, il n'y a pas eu un bruit de la nuit. Ausbund part se loger dans un coin, pendant que les trois autres se préparent. Le doc écrit et finit par sortir ; il est fasciné par toutes les inscriptions, surtout depuis qu'ils ont un peu de contexte. Addie reste avec lui, et lorsqu'ils sortent elle lui fait signe qu'elle l'a à l'œil. 


Jake pose à peine la tête sur les genoux du géant, et ses yeux se ferment à moitié.

Atridès caresse la tête de Jake et lui murmure :

Je vais prendre la bonne décision, mon pote. Il faut juste que je me souvienne de tout. Que je pèse le pour et le contre... Pourquoi on laisse au plus débile de tout le groupe le choix le plus important ?

... Peut-être parce que moi, je n'ai pas d'ambitions. Que je n'ai pas peur de mourir. Ma seule peur, c'est pour vous, pour ceux qui croient en moi. S'il savaient à quel point je suis impuissant... Tout ceux qui croient en moi... Ouais...

Et Atridès plonge dans un semi-sommeil. Ou toutes ses pensées s'entrechoquent. Blotti contre Jake.
Et il se voit partir seul vers le diapason. Aucune raison d'emmener d'autres vers un danger inconnu. Jake a sombré, Ausbund aussi. Leurs âmes battent comme des cœurs apaisés. Atridès quitte le bâtiment, et croise Addie et Vells. 

 Les gravures mentionnent tellement de démons...

 Ouais, ouais. Ca avait l'air d'être un endroit chaaaar-mant.

La route l'amène alors auprès des cercles de squelettes. Les monstres restent là, immobiles et décharnés pour l'éternité. Mais pas les prêtres. Leurs âmes sont encore là, et prient pour la préservation de cet endroit. 

Mmmmmmmm... celui-ci pourrait ouvrir la porte. Notre service touche peut-être à sa fin.

Mmmmmmm.... La pierre est éternelle....

Mmmmmmmm.... Ne rêve pas, mon frère. La pierre est éternelle. Ce qui doit être sera.

Quelle Pierre, les amis ? Et qu'est ce qui doit être ? , demande tranquillement Atridès aux prêtres.

 Par la pierre ! Il nous a entendus, vous croyez ?

 Certainement pas. Et même s'il pouvait, il ne peut pas parler le Duru. La pierre est éterneeeeeellle....

 Euh... vous êtes certains ? Regardez comme il penche la tête à mesure qu'on parle ! 

 Mmmmmmm.... La pierre est éternelle....

Nan, mais les gars... Je parle pas le Duru, mais je comprends vos mots ! Je suis là, vous savez ? Donc, la Pierre éternelle ? De quoi parlez-vous ?

 Par la Pierre ! 

 Qu'est ce que je vous disais !? Quel est ton nom, alien ?

Moi, je m'appelle Atridès. De Theopolis. Une planète d'une autre galaxie, d'après ce que j'ai compris.
Enchanté !

Et vous êtes... ?

 Nous sommes les derniers gardiens de la Pierre. Nous avons sacrifié l'ascension de l'âme pour protéger le monde physique. Lorsque les derniers démons sont arrivés pour détruire ce monde, nous étions prêts. Chacun de nous est né et a passé sa vie à se préparer à cette éternité. Pour toujours, nous aidons à garder ce lieu indestructible. La Pierre est éternelle.

  La pierre est éternelle...

 Un jour nos ossements auront disparu, mais nous serons toujours là, pour garder le nexus. Nous avons vu la fin, et la suite. Mais nos prédictions ne vous mentionnaient pas. 

 Peu importe désormais. Nous avons joué notre rôle. Même s'il ouvrait la porte, le diapason tiendra. La pierre est éternelle.

Ces gars sont bloqués sur place, fantômes éternels, liés à ce lieu et voués à une chose et une seule : le perpétuer pour toujours. A mesure, Atridès réalise que s'il se concentre, déplacer son regard fait apparaître des dizaines et des dizaines de types similaires, tous prostrés en prière, comme si ce lieu était leur dieu.


Non, vous n'avez pas encore complétement joué votre rôle. Vous avez tenu, et pour ça vous méritez le respect. Gloire à vous !
Cette Pierre, cette prison, est Éternelle. Et celle qui a causé tout ces meurtres, tout ce Chaos devra y reposer.

 Sa voix charrie le torrent poétique de la justice. 
 Sa tâche ne sera pas aisée. Il doit Savoir.
 Mais la branche a toujours ramené un démon. Sauf une fois.
 Etranger, ton seul espoir est enfermé dans l'Oubli. Sous le diapason se trouve l'accès à un monde où vont les choses perdues. 
 Notre peuple y a jeté les armes les plus dangereuses. Mais ne doute pas de leur sagesse : La plupart briseraient hommes et mondes, si on les laissait libres. 
 La Branche parfaite de l'Arbre du Temps est la chose que tu cherches. Seul un cœur éternellement pur peut en profiter. En tous cas, c'est la seule sagesse que les anciens ont laissé dans la pierre.
 La pierre est éternelle...



... La Pierre est éternelle. Et je vais devoir descendre. Est-ce que les Anciens ont un conseil pour celui qui va partir seul vers le monde perdu, afin de mettre fin aux agissements de la déesse Rouge ?

 Celui dont le chemin descend dans la Pierre doit abandonner son passé. 
 Seul un cœur éternellement pur peut en profiter. 
 Ton salut est dans la persévérance.
 Celui qui marche dans la pierre n'est nulle part, enfermé avec les démons qui naguère tourmentèrent le monde. 
 Mais Nulle part est dans la pierre. Aussi, celui qui marche dans la pierre n'est jamais seul.
 A l'intérieur comme à l'extérieur, tout est un. Mais un est plus qu'un. 
 Fais ce que tu peux, Vagabond. Ne te perds pas. Et quoi que tu fasses, laisse derrière toi le passé et le futur. Sois. Au présent.


Alors qu'il se demande pourquoi les trucs éthérés se sentent toujours obligés de parler en énigmes à la noix, Atridès regarde les esprits dans la pierre lui montrer le chemin. Il descend l'escalier vers l'ombre au fond.


Sous l'arche, il est un angle ou l'ombre devient si dense qu'il ne voit plus sa main. Mais il peut sentir une lourde et longue buche de bois devant deux panneaux de porte, à hauteur d'homme. Ou peut-être que c'est ainsi parce que son esprit imagine que c'est à quoi une porte fermée doit ressembler. 


Parce que cette porte là n'a rien de naturel. 

Aussi, Atidès soulève la buche.


Bah, on va voir, hein ?

Après avoir ouvert la porte, Atridès s'engouffre dans l'ombre. Il marche sur quelque chose, mais ce n'est pas entièrement solide. Quand il étend les bras, il peut sentir des murs de larges pierres taillées de chaque côté : il est dans un petit couloir. Le plafond est horsd'atteinte, cependant.

Alors qu'il s'avance, ses yeux finissent par s'acclimater à l'obscurité. Il entrevoit les choses de plus en plus clairement. Il est désormaisdans une pièce cubique, sans issue. Au milieu de la pièce, une porte tient debout sans le soutien d'un mur. Elle siège juste là, au milieu de rien, sans fermoir d'aucune sorte ; juste une petite pancarte suspendue à un clou et un fil. Comme la porte d'entrée, comme ces pierres, Atridès sait au fond de lui que tout cela est bien plus qu'une porte. C'est son esprit qui rend les choses compréhensibles. Mais il sait qu'il est proche. 

Néanmoins une porte, c'est facile d'utilisation. Alors qu'il s'apprête à pousser la porte, il se demande comment "demander" à une porte de ne pas l'emmener vers n'importe quel démon, mais bien à cette branche du temps... et une branche apparaît alors sur la petite pancarte. Il pousse la porte, et se retrouve... derrière la porte. Rien n'a changé. Puis il regarde à terre, et sur les dalles au sol, il trouve une branche. On dirait une branche d'olivier.

Satisfait de la facilité de la quête, il la saisit dans la main. La pièce disparaît, et il se retrouve sur la branche géante. 

Comme dans la vision de Vells.

Autour de lui, l'espace infini, les étoiles... Et au loin, les yeux. Devant lui, son avenir, derrière lui son présent.

Aussi, Atridès glisse la branche d'olivier à sa ceinture. Il garde le bûche qui bloquait la porte à l'épaule.

... Et il avance sur la branche géante d'un pas tranquille, en chantant à voix basse un chant de marche des phalanges de Lycopolis. Une de celles où l'on parle de cailloux sous les souliers, du poids du sac, des jolies filles qui regardent les soldats passer en leur faisant des clins d’œils, et de la fête que ce sera quand tout le monde rentrera à la maison, dans pas longtemps.
Une jolie chanson. Très entrainante.

Il s'arrête de temps en temps, observant le paysage étrange. Et lors d'une ces pauses, il en profite pour héler...

Gordon, mon pote, t'es dans le coin ?

Gordon ne répond point. Mais certains des yeux semblent intrigués, et se mettent à chercher. Quant à lui, au détour d'un embranchement, il finit par réaliser que le chemin se rétrécit en largeur. Il peut voir la feuille au bout de la branche.

Comme pour le bon vieux Doc'...
... Bon, il faut y aller, hein ? , dit-il aux Yeux autour de lui.

Et c'est assez confiant qu'il avance sa main vers la feuille. Les gens qui veulent beaucoup peuvent être corrompus. Beaucoup.
Lui, eh bien... Il ne veut pas grand chose, alors, sûrement qu'il n'y aura pas grand chose à en retirer...
Une surprise l'attendra peut-être. C'est plus de la curiosité que de l'appréhension.

Alors que ses yeux s'adaptent, Atridès relève la tête et prend appui sur un pilier pour se remettre sur pieds. De larges tentures et des rideaux de velours pourpres ornent la pièce. Plus loin, les yeux de l'Olympien trouvent d'autres plumes. Et du sang.


Plus loin dans le couloir, un féroce combat. Un fauve féroce grogne et mord, et du métal frappe du métal. 

Ah, putain, 'fait chier... Une baston.

Atridès passe son bouclier de son dos à son bras, dégaine son épée, essaye de se remettre les idées en place en secouant vivement sa tête de gauche à droite.
Il essaye de comprendre ce qu'il se passe, puis avance d'un pas rapide vers... Ce qui se passe ? 

Sa source lui fournit rapidement une partie des informations. Déjà, il sent sa propre source, à l'origine du fracas. Son moi futur est entouré d'un grand nombre de sources, ou plutôt d'une source multiple... Jake ? Oui, ça ressemble à des Jakes. Alors qu'il arrive au bout du couloir, ce dernier se change en escalier. Dehors, le soleil est à son zénith. Il peut sentir les sources se séparer, et alors que les chiens de guerre continuent de descendre l'escalier, ils écharpent au passage la population locale. Des hommes et femmes ailés... Et chacun d'entre eux pourrait écraser Atridès d'une pichenette. Les énergies de ce lieu sont aberrantes. Pourtant, ils tombent comme de simples civils durant une guerre... Menée par deux sources.

Pendant ce temps, l'autre Atridès fait simplement demi-tour. Atridès est là quand un ange tente d'abattre son futur d'un coup d'épée dans le dos... Mais Atridès "le noir", vêtu d'une armure de jais, n'est pas pris par surprise. Son arme, dans un ouragan, s'abat sur la poitrine du pleutre et il tombe comme les autres. Atridès le noir pose son épée au sol, à côté du corps.



Je n'ai pas de temps à perdre avec toi, l'angelot. J'ai une boucle à boucler. Le dieu Atridès se tourne alors vers le demi-dieu Atridès.

 Alors, on a des soucis divins ? Je me souviens à peu près de cette conversation, tu sais. Et de fait, il semble presque réciter son texte.

Ah...

Mais si tu ne me laisses pas le temps de poser ma question dans ton passé, ça veut dire que tu ne le saura pas dans ton futur, et... Atridès rengaine son épée, et se gratte la tête, en pleine réflexion.

... Laisse tomber.

Bon, bah... Vas-y alors.

 J'ai dit : "à peu près". Et ne joue pas au plus malin avec toi-même. Tu es hors du temps, mais moi, j'ai des choses à faire. Et avant que tu ne me juges, je suis en train de sauver l'humanité. Encore.

Atridès ne peut s'empêcher de noter les détails qui lui sautent aux yeux : Ces yeux sont d'un bleu anormal ; la marque de l'épice. Son armure et son arme sont d'un métal alchimique, et sa conception est purement géniale : à chaque croisement de plaques, Atridès ne peut qu'admirer l'ingéniosité et les gravures de cette œuvre d'art. Détail intéressant, il a continué à grandir ; ce n'est pas juste l'armure qui fait ça. Aussi, il semble (ou est-ce l'armure ?) avoir des ailes. 

Alors que ses yeux s'habituent, Atridès voit son avenir s'asseoir sur un des meubles, dégageant la vue de l'escalier.



Ne me fais donc pas attendre, mon gars. Tu sais comment ça doit marcher. Tu poses les questions, je ne réponds pas à tout, et tu es satisfait de voir que tu ne vas pas devenir un monstre qui veut prendre ta place.

Ouais, je ne vais pas te faire trop attendre : je vois bien que tu es occupé. Mais quand même, avant que je pose mes questions, auxquelles tu ne répondras pas forcément...

... Qu'est ce qui se passe, mon pote ? Tu as l'air sur la défensive. Tu sais le "avant que tu ne me juges...", le "satisfait de voir que tu ne vas pas devenir un monstre"...

Moi, nous... Je... On n'est comme ça que lorsque qu'on a fait une grosse boulette !

Et puis, tes adversaires, ça ressemble vachement à des civils. Et il y a des femmes... On a jamais fait ça, à Theopolis. On les envoyait chier, les officiers, quand ils nous demandaient des trucs pas très net... Et nos potes, ils nous écoutaient... 'Fin, ils savaient qu'ils allaient se prendre une rouste, de retour à la caserne, s'il ne nous écoutaient pas et qu'ils touchaient aux civils et aux femmes... Alors, forcément, ils nous écoutaient...

 Je me souviens de la phalange. Elle a conditionné ma vie pendant quoi... cinquante ans ? Cent ? Les siècles suivants ont prouvé que mes idées étaient trop petites pour le Dieu Vagabond. Mes décisions m'ont poussé vers les suivantes, et chaque fois, comme une boule de pachinko consciente, j'ai suivi le meilleur chemin. Souvent, il est pavé de changements et de sacrifices. Quand la Lumière a fini par montrer son vrai visage, l'humanité entière a décidé qu'elle devait périr. 

Alors me voilà. Être un dieu a un poids. Mais je suis ce qui peut t'arriver de mieux. JE suis celui qui a fait les bons choix, les bons sacrifices. Ce que tu vois ici, c'est le choix des humains. J'ai vu d'autres réalités. Dans la plupart, les sources et les hommes en général finissent par disparaître, ou par devenir obsolètes entant que cultures. Si tu voyais les hommes de mon époque, tu n'y entendrais rien. Je suis leur dieu principal, maintenant. Ils sont libres, parce que je ne tourne mon attention que vers les tyrans potentiels. Et ils m'adorent pour ça. Tu sais comme moi que nous ne l'avons même pas fait exprès. Quelqu'un d'autre décide de notre sort. Les croyants le font. 

A terme, après avoir terminé l'épice, tu verras au travers du temps et de l'espace. Tu verras, comme moi, que rien n'est livré au hasard. En tant que source, nous avons plus d'emprise sur le destin. Mais en tant que dieu, nous avons bien moins de libre-arbitre que nous aimerions le croire. Surtout à ton âge, quand notre âme est si chétive. 

Alors crois bien que je sais ce qui est mon choix... et ce qui est le choix des hommes. Le pouvoir a un prix.

Sa voix ne trahit guère d'émotion. Mais le contenu dévoile les doutes d'Atridès. Il ne veut pas... ça. Que ce soit. En contrebas, il peut entendre et sentir les Jakes dévaler la cité. Le regard de son double futur se perd un temps dans les soleils couchants. Le poids de ses mots s'imprègne pendant le silence.

Ouais...

Je comprends. L'ancien Atridès du passé avance vers celui du futur, et le prend dans ses bras, à la façon des guerriers Lycopoliens, avec quelques claques dans le dos. Tu... On... Tu en a chié, et je vais en chier salement, je le sens. Je suis fier de toi, tu sais ? De celui que je vais devenir... Celui qui a fait les bons choix.

Tout ce que je voulais savoir, au début, c’était comment vaincre cette pute de Circée... Mais maintenant, j'ai aussi envie que tu me dises à quel moment ça a foiré. Le moment que tu aimerais changer.

... Il n'y a pas grand monde qui a la chance de dire ça à son soi du passé. Épice ou pas épice. Alors profites-en. Tu me connais, je suis toi. On ne juge pas les gens de bonne volonté.

Et appelle un Jake, pour que je le vois, s'il te plaît.

 Non. Le mot est sans appel. Atridès cache quelque chose. Tu te souviens, quand on nous prédisait un avenir de destructeur ? Je savais bien que ce n'était pas moi. Je ne voulais tuer personne, moi, je voulais juste voir l'espace. Mais le monde n'est pas fait de ces vérités fugaces, quand on est immortel. Les amis meurent. Même les sources. 

Mes humains perdureront après moi, je l'ai vu. Mes sacrifices ne sont pas vains. Mais...

Si j'avais su ? Je crois que je serais devenu ce "tueur de dieux". Plus tôt. J'aurais probablement rejoint le camp de Williams à la place d'Arès. Et j'aurais tué tous les dieux, un par un, si ça avait pu m'éviter d'en devenir un.

Non... Excuse-moi, c'est ton attitude qui me perturbe. On a ce talent pour brouiller les talents divins des autres dieux. J'imagine que tu dois avoir cet effet sur moi. Je me sens... Je me sens...

Triste ? L'Atridès du passé garde celui du futur dans ses bras.
On voulait juste voir l'espace. On ne voulait tuer personne. Je sais. C'est moi, c'est nous. Et à un moment, ça a du arriver...
On ne voulait pas devenir un Dieu. Parce qu'on sait ce que c'est qu'un Dieu. Un Dieu, ça donne des ordres, ça prend des décisions, c'est poussé par ses fidèles.
Et ça, donner des ordres, prendre des décisions, être poussé dans un sens ou un autre, sans pouvoir le choisir... On n'a pas aimé ça, n'est ce pas ? Mais on s'en est senti obligé, par l'importance des enjeux... On s'est laissé entrainé.
Par des morts. Des horreurs... On a perdu pied.

...

L'Atridès du passé pousse un sifflement strident.

Jake, mon pote ? J'aimerais tellement te revoir !

Pour la seconde fois, l'Atridès à venir semble perturbé. Manifestement, ni son épice ni ses souvenirs ne l'ont préparé à ce moment. Atridès n'y entend rien au temps. C'est le domaine de ses aïeux. Cet atridès pense boucler une boucle... Mais ce n'est pas une boucle. C'est "une branche brisée de l'Arbre du Temps". Un moment perdu. Donc... dans l'entrezone. Ce futur, il aurait pu arriver. Mais il n'arrivera jamais. 


Il est perdu !


Et devant le dieu si puissant, L'Olympien ne voit que faiblesse. Cet Atridès a perdu sa liberté pour celle des autres. C'est aussi noble que pitoyable. Devant cette vision, la seule chose décente serait de le rejeter en bloc... Mais en le voyant, le jeune demi-dieu se sent très triste pour lui. Et imagine que, même dans une autre réalité, il pourrait changer. Se libérer, redevenir ce qu'il était.

Aussi, il continue de lui parler calmement, un bras sur l'épaule.

Je... T'es devenu vachement fort... On est devenu capable de faire tout ce que l'on veut. Mais on ne peut plus faire ce que l'on veut.

C'est con, non ?

Tu sais... Je comprends bien tout ça. Je me suis vu comme toi, dans des rêves, des cauchemars...
Et ce n'est pas ce qu'on voulait. Nous, on voulait pouvoir bécoter ces petites mortelles tellement mignonnes, sans qu'elles se mettent à nous prier. Aider nos potes avec nos muscles, mais être capable de dire "stop" s'ils faisaient n'importe quoi. Se faire une bonne bouffe, et faire profiter les autres de notre cuisine.

Tu te souviens de l'époque où les gens nous demandaient "Tu es le Dieu de quoi ?"

... Et qu'on ne savait pas quoi répondre. Alors on sortait des conneries... Le Dieu au Chien. Le Dieu de la Cuisine. Le Dieu qui Baisse Ta Fille et se Barre Avant de se Faire Chopper... Et ces conneries, ça nous faisait rire !

On peut faire machine arrière, non ? On peut être utile sans tuer plus que de mesure.

Simplement en montrant au monde qu'on peut être Libre. En inspirant aux Mortels que les Forts ne peuvent pas tout, ne peuvent pas toujours nous obliger à faire ce que l'on ne veut pas faire, si on Lutte. Et nous, on sait Lutter...

Le jeune Atridès sort un bocal d'olives, et du fromage de chèvre enveloppé d'une feuille de vigne, une miche de pain. Il pose tout cela entre eux deux.

Déjà mon pote, retire cette armure. Elle est belle, mais elle ne te va pas...
Les armures, c'est pour ce protéger soi-même. Les boucliers de la phalange, c'est pour protéger celui à notre gauche. Et celui à notre droite nous protège... Pas besoin d'armure.

Et arrête ce massacre. J'ai vu comme tu regardes les soleils... Ce que l'on fait, ça te donne envie de vomir. Tu penses au passé. Quand on était heureux... Quand on était libres. On peut le redevenir, mon pote.

Je suis là pour toi. Ton Éclat du Passé est là. Pour toi.

... Et mange ça. C'est bon. Ça vient de chez nous.

 Des olives De Paraopolis ! J'en fais pousser sur l'Olympe. Mmmm. Celles-ci ont une saveur différente. Le dieu, dans le champ d'Atridès, semble momentanément coupé de ses fidèles. Pendant un temps, ils peuvent parler librement. Jusqu'à ce qu'Atridès réalise que de nouvelles idées prennent pied dans son propre esprit. Toutes ces prières doivent aller quelque part. Aussi, après l'avoir touché, Atridès commence à voir l'âme du dieu futur. Il ignore à quoi ressemble sa propre âme, mais celle de son futur est une image claire. Tel Atlas, portant le poids du monde, Celui-ci porte le poids d'une galaxie. Les prières sont si nombreuses que ses pensées sont inaudibles. Mais le temps est compté : Si Atridès reste, il portera ce fardeau à son tour.


Tu sais, je commence à croire que tu n'es pas mon passé. Mes souvenirs sont flous, mais je n'ai jamais fait ça.

Non, tu n'as jamais fait ça.
Et si, je suis ton passé. Ton passé, qui n'a peut-être pas choisi le même chemin que toi.

... J'y comprend rien à ces conneries de voyages dans le temps, tu sais ? Bah, oui, tu le sais, forcément...

Écoute bien : je suis là pour te rendre un grand service. Te donner un conseil venu de loin.
Lâche prise. On ne peut manipuler la machine que si l'on est hors de la machine. Et toi, tu es dedans jusqu'au cou. Tu es noyé dedans.
... Bouche tes oreilles mystiques : tu le peux. Au moins un moment.
Redeviens celui que tu étais. Tu seras bien plus utile comme ça que maintenant.
L'Univers a de nombreux soldats, mais peu de gens qui décident par eux-même. C'était le cas il y a mille ans, c'est encore le cas aujourd'hui.

Moi, je vais partir. Je ne peux pas rester lus longtemps. Les prières de tes, nos, fidèles, m'oppressent.

J'ai juste une question pour toi, pour moi... Comment a-t'on vaincu Circée, la Déesse Rouge ? Je suis curieux...

 Oh, oui. Circé... Un long combat. La vaincre est impossible. Il faut la priver de ses atouts, un par un, avant de l'affronter. Elle tire son pouvoir de ses esclaves et des troupes qu'elle vainc. De sa gourde, elle tire son avarice mais du démon à l'intérieur, elle tire un nihilisme qui rentre en contradiction avec l'avarice. C'est ce qui la maintient en vie, c'est ce qui retient Circé. Elle a trois serviteurs majeurs : le cyclope métallique, le dévoreur et un sorcier Drass qui l'accompagne depuis le début. Si tu ne te débarrasse pas de ces atouts un par un, la guerre durera sept ans avant que tu ne comprennes comment faire.

Battez ces gars-là, armez vos armées pour résister, ne lui jetez pas de troupes au visage. Elle les prendra pour les rejeter sur vous. A la fin, elle peut peut-être être sauvée. Je ne l'ai pas fait, parce que c'était trop dangereux. 

Moi aussi j'ai un avertissement, avant qu'on ne se quitte. Parmi tous les dieux que tu croiseras, le pire, le plus dangereux... sera Mars. Compor. A terme, même les nazi réaliseront qu'ils abritent une chose qui les dépasse. Quand tu le croiseras... tu devras être prêt, ou tu perdras une personne qui t'est chère.

Merci de tes conseils, mon Frère, mon Frère perdu. J'en tiendrai compte.
Tiens compte des miens, je t'en supplie. Et Atridès sert le poignet de son homologue, à la Lycopolienne. Un salut de guerrier.
Et il repart en arrière.

Je n'ai pas vu Jake. Mais dit lui que je l'aime. C'est mon seul vrai pote. Avec la petite Mia...

 Je le ferai. Pars en paix, mon frère. Tu sais quoi faire maintenant, et... moi aussi.

Et ils s'en vont.
 
Chacun de leur côté, résolus, et rééquilibrés. Atridès repart avec toute l'énergie des prières que sa nature divine peut supporter, renforcé dans sa détermination de sauver chaque homme et chaque femme, et les guider vers la Grandeur. Futur Atridès, lui, repart avec ses esprits. 

La voix se fait entendre dès qu'Atridès pose la main sur la feuille. Il passe de l'autre côté, sur la branche. Et la voix retentit de partout à la fois. Dans le "ciel", les yeux et les choses perdues flottent toujours. Mais ils sont tous immobiles, comme une tridéo mise en pause.

Atridès, toujours dans ses réflexions, répond de manière automatique. Dans sa tête, il est toujours avec son lui du futur. Et ça le perturbe.

Oh non. Si tu savais le nombre de fois où j'ai voulu faire des saloperies...
... Simplement parce que je le peux, sans conséquences : je suis un demi-dieu.

... Mais bon... Être libre, ça implique d'être capable de se fixer ses propres limites, non ? Être libre et sans limites, c'est être fou. Alors, 'faut savoir se contrôler soi-même. C'est la base de la liberté. Sinon, quelqu'un d'autre doit te control...

... Ehhhh putain ! T'es qui toi ?


La voix reprend lentement, d'un ton immémorial, d'une patience sans fin. Elle vient de partout à la fois, mais en même temps, de nulle part.






 Ah ? Peut-être... En tout cas, je ne me suis pas détruit mutuellement, c'est sûr. Ça aurait été très con... C'était un bon gars. Complétement paumé, mais un bon gars.

Et pourquoi tu attendais quelqu'un comme moi ? Je peux t'aider, Vieille Branche ?







J'en dis que je n'aime pas promettre des choses sans savoir si je peux tenir mes engagements.

Alors, peut-être que tu pourrais m'en dire plus, avant que je m'engage ?
Où te trouves-tu ? Ou dois-je te remettre ?
Tu es qui, vraiment ? C'est quoi, cet endroit ? Pourquoi il y a plein de prêtres morts qui protègent le lieu ? Qui sont morts en le protégeant de quoi, de qui ? Et Circée ?

... En fait, moi, je suis plus efficace quand je sais ce que je dois faire, et pourquoi je dois le faire. Quand j'ai le contexte. Ça me permet d'improviser au mieux quand il faut improviser. Ça arrive souvent, malheureusement...